Sur le point d’obtenir des F-16 Viper, la Turquie envisage toujours d’acquérir 40 Eurofighter Typhoon

Suite aux propos récemment tenus à l’antenne de CNN Türk par Victoria Nuland, la numéro deux par intérim de la diplomatie américaine, au sujet d’une possible réintégration de la Turquie au sein du programme d’avion de combat F-35, John Kirby, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, a fait une mise au point lors d’une conférence de presse à la Maison Blanche, le 31 janvier.

« Notre point de vue selon lequel la participation de la Turquie au programme F-35 est incompatible avec l’utilisation des missiles S-300 et S-400 reste inchangé. Nous avons donc toujours ces discussions. Et si la Turquie parvient à répondre à nos préoccupations à ce sujet, elle pourrait alors réintégrer le programme F-35. Il n’y a aucun changement à cela », a en effet déclaré M. Kirby.

Pour rappel, la Turquie a fait l’objet de sanctions prises par l’administration Trump au titre de la loi CAATSA [Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act] pour avoir mis en service des systèmes russes de défense aérienne S-400. Ce qui s’est traduit par son exclusion du programme F-35, alors qu’elle avait commandé 100 exemplaires.

Quoi qu’il en soit, la référence à l’utilisation de batteries russes S-300 par la Turquie est étonnante… Dans la mesure où elle n’a jamais mis en oeuvre de tels systèmes. Ce qui n’est pas le cas de la Grèce, qui a récupéré ceux que la République de Chypre avait commandés à la Russie en 1997. Et cela, pour mettre un terme à la crise avec Ankara provoquée par cet achat. Or, malgré cela, la semaine passée, l’administration américaine a donné son feu vert à la vente de 40 F-35A à Athènes pour 8,6 milliards de dollars…

Cela étant, sauf avis contraire du Congrès des États-Unis, qui s’y est opposé jusqu’à présent, la Turquie est aussi sur le point d’obtenir 40 F-16 Viper [ainsi que 79 kits pour porter une partie de ses anciens F-16 à ce standard]. Il s’agit d’une contrepartie à son feu vert donné à l’adhésion de la Suède à l’Otan… mais aussi à son exclusion du programme F-35A.

Ces dernières années, redoutant de se faire distancer par la Grèce en matière d’aviation de chasse faute de pouvoir obtenir les F-16 Viper qu’elle réclamait, la Turquie fit mine de s’intéresser à des avions de combat russes [Su-35 « Flanker E » et Su-57 « Felon »] et évoqua l’hypothèse d’un achat de 40 à 80 Typhoon auprès du consortium Eurofighter [lequel réunit BAE Systems, Airbus et Leonardo]. Était-ce une manoeuvre pour forcer la main à Washington?

Toujours est-il que, en novembre, l’hypothèse « Typhoon » prit de la consistance après les déclarations faites par Yaşar Güler, le ministre turc de la Défense, lors d’une audition à la Grande Assemblée nationale turque.

« Nous travaillons sur l’Eurofighter. Nous voulons en acheter. C’est un avion très efficace. Ils sont produits par le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Espagne. Le Royaume-Uni et l’Espagne sont d’accord et s’efforcent désormais de convaincre l’Allemagne. Ils nous ont dit qu’ils allaient résoudre ce problème », avait-il dit, en oubliant, au passage de citer l’Italie. « Si possible, nous prévoyons d’acheter 40 Eurofighter », avait-il ajouté, avant d’assurer que la Turquie avait « définitivement renoncé » au F-35A.

On aurait pu penser que le feu vert donné par l’administration américaine à la vente de F-16 Viper à Ankara allait sonner le glas pour le dossier « Typhoon », d’autant plus que Berlin n’a, a priori, pas changé de position à son égard. Finalement, il n’en est rien.

« Même si elle ne s’attend pas à ce que le Congrès bloque la vente des F-16, la Turquie souhaite toujours acheter des avions Eurofighter Typhoon », a en effet déclaré un responsable du ministère turc de la Défense, selon l’agence Reuters. « Nous sommes toujours intéressés et nous attendons une approche positive de l’Allemagne, membre du consortium, sur cette question », a-t-il insisté.

En attendant, l’administration Biden va s’attacher à convaincre les élus du Congrès à ne pas s’opposer à la vente de F-16 Viper à la Turquie.

« Le développement de la flotte turque d’avions F-16 est très important pour la sécurité américaine », a fait valoir Mme Nuland, évoquant la nécessité de partager le « fardeau entre alliés » de l’Otan. Et d’insister : « L’acquisition de ces avions par la Turquie est une priorité pour les États-Unis ».