Le futur drone aérien de la Marine va débuter ses essais à bord de la frégate Provence

Confié en 2017 à Airbus Helicopters, associé à Naval Group, le programme SDAM [Système de drone aérien pour la Marine] repose sur le VSR-700, conçu à partir de l’hélicoptère civil Cabri G2, du constructeur français Guimbal. L’un des enjeux de ce projet est de valider une technologie permettant à cet appareil d’apponter automatiquement sur une frégate, quel que soit l’état de la mer, grâce au système DeckFinder.

En effet, celui-ci est censé permettre « le lancement et la récupération autonomes de drones avec une précision de 10 à 20 cm dans des conditions difficiles, indépendamment des systèmes de géolocalisation par satellite [GNSS/GPS] », selon Airbus.

Seulement, le développement d’une telle capacité suppose de relever plusieurs défis techniques… Ce qui a conduit à reporter la campagne d’essais qui devait être menée durant l’automne 2022 depuis une frégate multimissions de la Marine nationale.

« Le programme SDAM est suivi par la Direction générale de l’armement [DGA]. Les essais réalisés sur une plateforme ont permis d’en montrer tout l’intérêt mais, au moment de passer sur une frégate, le système a connu des difficultés techniques », avait en effet confié l’amiral Pierre Vandier, alors chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM] lors d’une audition parlementaire, en novembre 2022.

Pour autant, le SDAM a depuis passé de nouveaux jalons… Ainsi, en décembre 2022, la DGA fit savoir qu’elle venait de valider les « capacités techniques en phase de survol maritime du démonstrateur de drone VSR-700, dans le cadre de l’étude de levée de risques du programme ». Puis, en mai dernier, elle annonça que l’appareil avait été testé, avec succès, « en configuration opérationnelle pour la première fois »… mais depuis un navire civil.

« Le prototype VSR700 a ouvert son enveloppe de vol dans des vents supérieurs à 40 nœuds, a accumulé huit heures d’essais en 14 vols et a réussi des atterrissages [appontage? ndlr] dans plusieurs états de mer différents », avait ensuite expliqué Airbus Helicopters.

Cependant, quelques semaines plus tard, il fut rapporté que le VSR700 utilisé pour ces essais était… tombé à l’eau, après avoir connu un incident lors d’un vol complémentaire. Mais cet évènement n’aura visiblement aucun incidence sur la suite du programme.

En effet, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 5 octobre, le nouveau CEMM, l’amiral Nicolas Vaujour, a confirmé que le SDAM allait être très prochainement testé à bord de la frégate multimissions Provence [qui vient de sortir d’un arrêt technique].

« Sur le SDAM, on est en train de réussir quelque chose qui sera unique. On va faire des essais d’appontage automatique sur la Provence très prochainement. L’appontage automatique d’un drone hélicoptère sur un bateau n’a jamais été réussi à ce stade. Sauf par nous », a souligné l’amiral Vaujour.

« On est en train de réussir cette rupture technologique. Le [MQ-8C] Fire Scout américain […] n’apponte pas automatiquement sur les bateaux. Donc, on a envie de gagner ce ‘step’ technologique. Notre industrie est capable de le faire et on peut en être fier », a insisté le CEMM « On a envie de réussir car le jour où on réussit à faire l’appontage automatique, on change complétement la donne de la dronisation », a-t-il ajouté.

Pour rappel, le SDAM/VSR-700 sera capable de voler à 5’000 mètres d’altitude, à la vitesse de 185 km/h grâce à un moteur de 145 ch. Le tout avec une endurance de huit heures. Pouvant emporter 150 kg de chages utiles, il sera équipé d’un radar Diades C-Ranger 200, d’une boule optronique Wescam MW-10, d’un récepteur AIS, voire de bouées acoustiques SonoFlash. Selon la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30, la Marine nationale devrait en posséder 8 exemplaires d’ici 2030 [et 15 d’ici 2035], sous réserve des résultats des essais.

Par ailleurs, l’amiral Vaujour s’est aussi félicité d’avoir obtenu les moyens de lancer les programmes à effet majeur [PEM] Evol SNA et Evol Frégates, lesquels sont censés permettre d’intégrer les innovations technologiques sur les navires de combat de la Marine dès que celles-ci sont disponibles. C’est ainsi que la FREMM Provence sera dotée d’un « data center » afin de voir « tout ce que l’on peut tirer de la gestion de données massives et de l’intelligence artificielle à bord de ce bateau », a-t-il expliqué.

« Défions-nous […] de ne pas retarder la solution d’une question dont l’utilité n’est pas contestable sous le vain prétexte de faire mieux. On finit ainsi, pour avoir ce qu’il y a de meilleur, par ne rien avoir du tout. Et en attendant le moment de passer devant les autres, on reste derrière », avait écrit l’amiral Daveluy. D’où l’intérêt d’Evol frégates et d’Evol SNA…

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20 contributions

  1. R2D2 dit :

    « la Marine nationale devrait en posséder 8 exemplaires d’ici 2030 [et 15 d’ici 2035] »
    ouaouh tout ca… à nous la guerre de haute intensité. Quoique si il y en a que un (sans plan B) par frégate le compte est bon ^^’

    • Jack dit :

      A un moment, il faut arrêter de fustiger systématiquement les quantités en mettant comme contre-argument « la haute intensité ». Ce n’est pas parce que vous commanderez 150 SDAM/VSR-700 que vous aurez une supériorité sur un adversaire. Le VSR-700 fait parti d’un ensemble de moyens et non LA solution ultime pour mener un combat.

      • R2D2 dit :

        bah oui ce n’est pas comme si la guerre en Ukraine faisait une piqûre de rappel… c’est exactement le meme soucis que le F35: il peut etre aussi performant que LM le dit si il y a 10 appareils que 1 se fait abattre bah c’est tout de suite 10% des capacités qui disparaissent. Sachant qu’en face (Russie, Chine, Iran) sont capables eux de faire des attaques par saturation qui impliquent qu’il y aura toujours un ou deux trucs qui passera les lignes de défense.

        • dolgan dit :

          Voux noux parlez de la masse de l aviation russe qui lui permet de dominer le ciel ukrainien et de la masse terrestre russe qui lui permet d ecraser l ukraine?

          A un moment donné, les retex, cela existe.

        • FNSEA dit :

          Les collègues horticulteurs s’égosillent à le rappeler : le mot souci, qu’il désigne le tracas ou la fleur, s’écrit sans s au singulier.
          Le même souci, un gros souci, se faire du souci, avoir un souci, sans-souci, le souci de plaire.

        • Jack dit :

          R2D2 : La quantité de matériel ne résoud pas (forcément) le problème car vous oubliez le stockage, la logistique et les ressources humaines.
          .
          Un exemple pour la logistique : une frégate peut embarquer un hélico et un VSR700, le fait que vous en ayez 150 en stock, dans un hangar A TERRE, ne servira pas lors de la melée. Pire, le centre de stockage est une cible de choix pour les frappes à longue distance (cf. ce que l’on voit quasi quotidiennement en Ukraine).
          .
          Autre exemple sur les RH : 10 F-35, c’est environ 20 pilotes. Vous achetez 30 F-35 pour « faire de la masse », il vous faudra 60 pilotes afin de compenser les pertes au combat (1 F-35 abattu = 1 pilote tué, blessé ou capturé).
          .
          Vous pouvez décliner ce problème pour TOUT type d’armement (avions, blindés, navires…). En synthèse, c’est le format des armées qu’il faut modifier et pas uniquement les commandes d’équipements.

    • EchoDelta dit :

      En l’occurence quand on voit les anglais et les US galérer pour y arriver de façon sécurisée, je me dis que c’est déjà pas si mal.
      Même si ce n’est pas une révolution historique, c’est la somme de ces petites avancées qui donnent quelque chose de consistant.

  2. La Prunelle de mes oreilles dit :

    Le drone en question devra être particulièrement résistant à des conditions atmosphériques omniprésentes lors des embarquements : l’air salin qui fait des ravages sur tous les matériels embarqués, le vent et notamment les rafales souvent violentes, auxquelles les drones en général sont sensibles, les brumes, brouillards et faibles visibilités et bien évidemment l’endurance énergétique car un drone qui tomberait « en panne sèche », ou sans liaison fiable avec son porteur, c’est un drone qui se retrouverait au fond de l’océan.

    il ne faut pas oublier non plus que des forces supposées inamicales disposent déjà présent de différents moyens de faire du brouillage des signaux électromagnétiques, sujet particulièrement sensible pour des drones qui évoluent à des vitesses faibles et des altitudes moyennes, donc facilement faciles à cibler.

  3. JILI dit :

    Il arrive enfin, et c’est une excellente nouvelle. Durant sa mise au point, il a été stupidement critiqué alors qu’il a été adapté d’un superbe hélicoptère privé qui a démontré toutes ses excellentes qualités, tout comme pour ses possibilités d’emport en armement, il avait été prévu un peu plus tard d’utiliser un modèle du colibri bien plus grand. Je suis intimement persuadé qu’ils ont dû réaliser l’adaptation de ce nouveau modèle, et cela n’a pas dû leur poser plus de problèmes car la différence est seulement la taille et le poids. Bref, une excellente réalisation à installer sur nos navires, et avec un modèle à venir plus grand et plus armé. Il va y avoir des jaloux qui ne vont pas s’en remettre ! Toutes mes félicitations au constructeur de Colibri avec son équipe et à la Marine!

    • fred glorieux dit :

      Très mauvais choix pour la marine, en vérité. Si le Cabri G2 est un très bon helico, la transformation en drone aeromaritime ne fait pas sens. Trop grand, trop gros. La cohabitation hlo drone va etre difficule sur les batiments, avec des hangars déjà bien encombrés. Le pire : les pales ne sont pas repliables ! Comment fait t-on pour monter – démonter à chaque vol sur la plage arrière par mer 4 – 5 ??? complétement inopérationnel cette manip. Bon courage aux dronistes marine qui se font imposer ce choix « BITD »…

      • Aymard de Ledonner dit :

        Trop gros? Le S100 de Shiebel fait le job pour la catégorie en dessous. La on veut pouvoir embarquer des capteurs plus performants et donc plus lourds.
        Son encombrement est connu et je doute que les marins vous aient attendu pour voir s’ils pouvaient mettre en œuvre cet hélico….

      • B.M. dit :

        Diamètre du rotor 7,2 mètre. Comme c’est un rotor tripales, si on met une pale dans l’axe, la distance entre les extrémités des 2 autre pales n’est que de 3,6 mètre donc pas besoin de les replier ou de les démonter (et donc pas besoin de les remonter sur la plage arrière). Par ailleurs il y avait 2 lynx sur les frégates F70 qui mesuraient à peine 15 mètres de large, alors on doit quand même pouvoir mettre un petit drone dans le hangar à côté du NH90 dans une FREEM qui fait presque 20 mètres de large. Pour les FDI, dans la conception d’origine il y a 2 hangars, un pour un NH90 ou équivalent, l’autre pour un drone qui pourrait peser (enfin c’est ce qui se dit sur certains sites WEB) jusqu’à 1 tonne, voire 1,5 tonne, à comparer aux 450 kg du VSR 700.

      • Frede6 dit :

        A part pour la com, pas sur que l’on voit un jour un NH90 et un SDAM embarqué en même temps pour les raisons évoquées.
        Le 2nd servira au moins à pallier les indispos du 1er

    • Fralipolipi dit :

      @JILI
      « au constructeur de Colibri » … plutôt Guimbal Cabri G2, non ?..
      .
      « il avait été prévu un peu plus tard d’utiliser un modèle du ‘colibri’ bien plus grand »
      … quelqu’un a-t-il des nouvelles du projet Cabri « G4 » depuis Novembre 2021 ?
      https://www.aerobuzz.fr/helicoptere/helicopteres-guimbal-veut-plus-de-places/

  4. Expression libre dit :

    10 grosses frégates, 5 FDI, 7 Patrouilleurs océaniques que je verrais bien évoluer vers le concept petite frégate bien armée. Trop peu, c’est bien les innovations technologiques mais un moment, il faut de la masse.

  5. Félix GARCIA dit :

    Je continue à penser qu’un porte-drones basé sur la classe Mistral resterait l’une des unités de surface avec la plus grande plus-value opérationnelle.

    Avec un atelier et une réserve d’armements à la place de l’hôpital, ainsi qu’un PC/C2 adapté aux drones.
    Avec un pont adapté : brins d’arrêts, pont « lisse », éventuellement une rampe de lancement/un tremplin, dispositif d’aide à l’appontage pour systèmes dronisés.

    Des drones navals à la place des véhicules terrestres, et des drones aériens à la place des hélicoptères.
    —> Drones navals : DSMO, D2i, D19, STERENN DU, SLAM-F …
    —> Drones aériens : VSR700, S-100, Aarok navalisé …

    Avec deux porte-drones, on disposerait de sacrées capacités pour un coup « relativement modeste ».
    —> « Le coût d’un navire de la classe Mistral se situe entre 294 et 420 millions d’euros. »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Classe_Mistral

    Je pense que si on se lançait là-dedans, on arriverait sans soucis à trouver preneurs (pour ceux qui s’inquiètent de la « rentabilité/viabilité » des projets de défense).

    • Félix GARCIA dit :

      « Innovation et Naval Group – Ne pas mollir sur la démarche exploratoire pour prendre la vague des systèmes dronisés et autonomes »
      https://mars-attaque.blogspot.com/2023/10/drones-naval-group-systemes-autonomes-uav-UUV-XLUUV-innovation-days.html

    • dolgan dit :

      sauf que des drones (et ne parlons pas de les navaliser) capables d apporter une grande plus value opérationnelle. Supérieure a des hélicopteres, cela n existe pas encore. Meme pas chez les Américains.

      On en reparle dans 20 ans.

      • Frede6 dit :

        Oui vu les capacités des dits drones, le besoin aujourd’hui est plutôt du petit et pas cher, qui peut équiper en plusieurs exemplaires une frégate ou un patrouilleur. Le défi de notre MN aujourd’hui c’est avant tout l’ubiquité et la permanence…pas urgemment besoin d’un nouvel éléphant blanc.