Selon un rapport parlementaire, la Royal Air Force ne ferait pas le poids dans une guerre de haute intensité

Si son action a été globalement saluée alors qu’il s’apprêtait à laisser ses fonctions de ministre de la Défense [MoD] qu’il avait occupées durant quatre ans, Ben Wallace n’a visiblement pas convaincu tout le monde, y compris parmi ses « amis » politiques, comme en témoigne le rapport sur la situation de la Royal Air Force [RAF], que vient de publier le « Defence Committee » de la Chambre des communes. Et ses auteurs ne vont pas par quatre chemins.

« De sérieuses questions se posent pour savoir si la flotte britannique d’avions de combat, réduite, est en mesure de dissuader [un adversaire] et de se défendre contre une agression ennemie. Bien que constituée d’avions très performants, elle est simplement trop petite pour faire face à une importante attrition dans le cadre d’une guerre entre pairs », affirme ce rapport. Et celui-ci d’ajouter : « Le retrait imminent des Typhoon de la Tranche 1 [soit 24 appareils, ndlr] et la lente montée en puissance de la flotte de F-35 ne feront qu’exacerber ces lacunes : le ministère de la Défense et la RAF doivent y remédier de toute urgence ».

Pour le moment, la RAF dispose de 137 Eurofighter Typhoon et de 31 F-35B, sur 48 commandés.

Initialement, l’objectif était d’acquérir un total de 138 F-35B pour les besoins de la RAF et la Fleet Air Arm de la Royal Navy. Mais il n’a pas été confirmé lors de la revue stratégique de défense publiée par le MoD en mars 2021, pas plus qu’il ne l’a été quand ce document a été actualisé, l’an passé, afin de prendre en compte les conséquences de la guerre en Ukraine. Toutefois, des négociations pour 26 exemplaires de plus ont été lancées en 2022… et il ne serait pas question d’aller au-delà dans l’immédiat.

Justement, le rapport parlementaire s’en prend aussi aux conclusions de cette revue stratégique de défense… « La diminution des capacités aériennes du Royaume-Uni [prévues dans ce document, ndlr] l’expose dangereusement à ce que le ministère de la Défense décrit comme ‘la plus grande menace pour l’ordre international depuis des décennies’. Malgré cela, son actualisation n’a annulé aucune des coupes budgétaires décidées en 2021 », déplore-t-il.

Quoi qu’il en soit, les députés estiment qu’augmenter le nombre de F-35 au delà des 74 avions prévus « serait un moyen de combler le déficit capacitaire de l’aviation de combat ».

Cependant, notent-ils, « même si les coûts d’acquisition de l’avion ont diminué, les coûts de maintien en condition opérationnelle restent inacceptablement élevés » et « l’incapacité de la RAF à estimer correctement le nombre de techniciens requis pour l’entretien de ces avions est tout simplement inexcusable ». Et d’ajouter : « Il reste actuellement trop de questions en suspens concernant le développement et le déploiement opérationnel de cette flotte ».

Toujours au sujet des F-35, le rapport estime que le MoD « devrait examiner attentivement les avantages qui seraient offerts par une flotte mixte d’avions F-35A [« conventionnel », ndlr] et B [à décollage court et à atterrissage vertical, ndlr]. Il devrait également préciser si son intention est que la flotte soit systématiquement déployée aux côtés des F-35B du Corps des Marines américains sur des porte-avions britanniques ».

Par ailleurs, et comme ils avaient déjà eu l’occasion de le faire dans un précédent rapport, les députés britanniques ont de nouveau critiqué le retrait de l’avion d’alerte avancée E-3D AWACS sans attendre l’arrivée de son successeur, à savoir l’E-7A Wedgetail. Et quand cet appareil « entrera finalement en service [avec un an de retard, ndlr], ce sera sous la forme d’une flotte réduite de seulement trois avions au lieu des cinq initialement commandés », regrettent-ils.

Aussi, « les économies de coûts invoquées par le ministère de la Défense pour justifier cette réduction sont disproportionnées par rapport à la réduction significative des capacités qu’elle entraînera. Le ministère doit revenir sur cette décision irrationnelle le plus tôt possible », font valoir les députés britanniques.

Ceux-ci ont également critiqué le retrait anticipé des C-130J Hercules, celui-ci étant survenu sept ans avant l’échéance prévue. Cette décision « réduira considérablement la capacité de transport de la RAF […] et aura un impact particulier sur nos forces spéciales », estiment les parlementaires.

Enfin, un autre point crucial qui pose problème est le retard pris dans la formation des pilotes, en raison d’une faible disponibilité des avions d’entraînement Hawk T2, de la pénurie d’instructeurs et une combinaison d’autres facteurs. Ainsi, l’âge moyen d’un pilote nouvellement qualifié est de… 29 ans, contre 25 ans il n’y a pas encore si longtemps.

« Ce retards persistants et inacceptables dans la formation font que les pilotes attendent des années pour se qualifier, ce qui a de graves conséquences sur le moral et sur l’efficacité de nos forces armées », souligne le rapport. Aussi, les députés britanniques disent vouloir mettre le MoD et les cadres de la RAF devant leurs responsabilités, afin de ramener « ces retards dans des limites acceptables d’ici la mi-2024 ». Et il n’est pas question d’un recours accru aux simulateurs de vols car ceux-ci « ne remplacent pas le vol réel », soulignent-ils.

« Notre enquête a révélé que la RAF a donné la priorité à la qualité au détriment de la quantité, nous laissant ainsi avec une flotte d’avions de combat haut de gamme et coûteux, mais si peu nombreux que ça en devient alarmant. […] Notre flotte actuelle n’a pas la masse nécessaire pour survivre à l’usure d’une guerre totale avec un adversaire de même niveau », résumé Tobias Ellwood, le président du comité de la Défense.

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