La marine brésilienne va saborder l’ex-porte-avions « Foch »

Le démantèlement du porte-avions Clemenceau, alors désigné « Q-790 » après avoir été désarmé en 1997, avait donné lieu à maints rebondissements, notamment en raison d’organisations écologistes curieusement peu regardantes pour d’autres navires présentant des caractéristiques identiques, à savoir la présence d’une quantité importante d’amiante à bord.

Devant être initialement « déconstruite » par un chantier naval espagnol, qui décida de sous-traiter cette opération en Turquie, la coque de l’ex-Clemenceau fut reprise par la France, qui la confia ensuite à un industriel indien… Ce qui donna lieu à une vigoureuse campagne médiatique [et juridique] d’associations de défense de l’environnement contre ce transfert. L’Inde ayant refusé de l’accueillir, l’ex-porte-avions revint à Brest, sans passer par le Canal de Suez, lequel lui avait été interdit par l’Égypte. Finalement, il fut démantelé par l’entreprise britannique Able UK.

Le « jumeau » du Clemenceau, le Foch, devenu le « Sao Paulo » après avoir été vendu au Brésil pour environ 12 millions d’euros, ne connaîtra pas un pareil sort.

Désarmé en 2017 par la Marinha do Brasil qui n’avait pas les moyens de le moderniser et de l’entretenir, l’ex-porte-avions fut mis aux enchères en vue de son démantèlement quatre plus tard. Et cela, malgré les appels à en faire un musée… Quoi qu’il en soit, sa coque fut rachetée pour 1,6 million d’euros par Cormack Maritima, qui agissait pour le compte du chantier naval turc SÖK Denizcilik, établi à Izmir.

En août dernier, pris en charge par le remorqueur néerlandais Alp Centre, l’ex-Foch/Sao Paulo quitta les eaux brésiliennes pour rejoindre la Turquie… Seulement, arrivé au détroit de Gibraltar, le gouvernement turc refusa de le voir arriver à Izmir. Et d’expliquer que l’inventaire des substances dangereuses supposées se trouver dans la coque ne lui avait pas été communiqué par Brasilia, comme l’exigeait la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et de leur élimination.

Aussi, l’Alp Centre fit demi-tour… Depuis, déclaré persona non grata au Brésil en raison de la pression mise par les associations écologistes, l’ex-porte-avions est resté en mer, dans la zone économique exclusive [ZEE] brésilienne. Seulement, son état a continué de se dégrader… au point que, désormais, il risque de couler à tout moment, 21 de ses compartiments étant inondés.

D’où la décision de la Marinha do Brasil de saborder l’ex-Foch/Sao Paulo, en raison de la détérioration de la flottabilité de la coque, laquelle rend inévitable un naufrage spontané ou incontrôlé. Celle-ci a été annoncée le 2 février, après un ultime recours judiciaire… et malgré les protestations des écologistes – qui évoquent un « crime environnemental » et l’opposition de l’Institut brésilien de l’environnement [Ibama].

Actuellement, l’ex-porte-avions se trouve à plus de 350 km des côtes brésiliennes, là où la profondeur avoisine les 5000 mètres. Les coordonnées de la position où il sera sabordé n’ont pas été précisées. Mais la Marina do Brazil assure que la zone choisie est exempte de câbles sous-marins.

Par ailleurs, dans son communiqué, la marine brésilienne a accusé la Turquie [et le chantier naval SÖK Denizcilik] d’avoir « unilatéralement retiré son consentement » pour accueillir l’ex-Foch/Sao Paulo, alors qu’elle avait respecté ses engagements.

« Il est […] important de souligner que les mesures administratives liées au démantèlement écologiquement durable, depuis le début, ont été gérées conjointement par la Marine brésilienne, l’Institut brésilien pour l’environnement et les ressources naturelles renouvelables, le ministère des Affaires étrangères et le Procureur général de l’Union, dans l’exercice de ses compétences spécifiques », a-t-elle fait valoir. Et de souligner que, au moment du départ de l’ex-porte-avions vers la Turquie, toutes les autorisations nécessaires avaient été délivrées par les autorités des deux pays.

Juridiquement, la coque de l’ex-porte-avions appartient toujours à SÖK Denizcilik… Mais la Marinha do Brasil a fait valoir qu’elle n’avait pas d’autre choix de la considérer comme perdue et, conformément à la législation brésilienne, d’en « assumer le contrôle administratif » afin d’éviter « dommages à l’environnement et de préserver le la navigation ».

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