Pour un général américain, la British Army n’est plus une force de combat de haut niveau

Début mars, le gouvernement britannique publiera une actualisation de la revue stratégique de défense et de sécurité rendue publique en mars 2021. Pour rappel, celle-ci avait acté une nouvelle réduction du format de la British Army [force terrestre, ndlr], avec « seulement » 72’500 engagés [contre 82’000 actuellement]. Ce qui supposait une réorganisation de ses brigades, l’objectif étant d’en faire une force « plus légère » et « mieux adaptée aux menaces actuelles et futures ».

Pour schématiser à grands traits, la British Army devait alors se recentrer sur ses capacités à contrer des actions menées en-deçà du seuil de déclenchement d’un conflit [autrement dit, à mener une guerre dite « hybride »] et à miser sur la technologie, comme la robotique, pour gagner de la « masse ».

« Nous ne pouvons plus tenir pour acquise la supériorité des forces occidentales. Nos ennemis ont infiniment plus d’options. […] Nous nous retrouvons constamment confrontés dans une ‘zone grise’ – des actions agressives en dessous du seuil de conflit ouvert », avait alors soutenu Ben Wallace, le ministère britannique de la Défense.

Seulement, cette nouvelle orientation ne fut pas du goût de tout le monde… Peu avant de partir en retraite, le général Sir Mark Carleton-Smith, qui était alors son chef d’état-major, avait estimé que la British Army allait être bientôt « trop petite » pour défendre les intérêts du Royaume-Uni. La guerre en Ukraine « a mis en évidence le fait que la masse et la taille sont importantes » et « je ne me sens pas à l’aise avec une armée de seulement 73’000 hommes [soit le format de l’armée britanique au temps de Charles II, ndlr], avait-il confié, dans les pages de Soldier Magazine.

Visiblement, il n’est pas le seul à partager ce constat. En effet, selon Sky News, qui cite des sources de la Défense britannique, un général américain de haut rang [dont l’identité n’a pas été précisée] a déclaré à Ben Wallace, en privé, que la British Army n’est « plus une force de combat de haut niveau ».

Cette fuite a-t-elle été savemment organisée pour faire pression sur le gouvernement britannique alors que la révision de revue stratégique de 2021 est en cours? En tout cas, les interlocuteurs de Sky News ont plaidé pour une hausse du budget de la Défense d’au moins trois milliards de livres sterling par an, l’arrêt de la réduction du format de la British Army et l’assouplissement des règles en matière d’acquisitions d’équipements militaires et de munitions. Et de faire valoir que Rishi Sunak risquait d’échouer dans son rôle de « Premier ministre de temps de guerre » s’il ne prenait pas les mesures urgentes qui s’impose, compte tenu de la « menace croissante » posée par la Russie.

Cela étant, ce n’est pas la première fois qu’un responsable américain s’inquiète des capacités des forces britanniques, et en particulier de celles de la British Army. Comme en 2015, quand le général Ray Odierno, alors chef d’état-major de l’US Army, s’interrogea sur leur « fiabilité ».

« Par le passé, nous avions une division de la British Army travaillant aux côtés d’une division américaine et nous avons maintenant une brigade britannique intégrée à une division américaine, voire un bataillon britannique intégré à une brigade américaine », avait-il déploré, dans un entretien accordé au Telegraph, à une époque où la défense britannique était soumise à une nouvelle « cure d’austérité ».

Puis, en 2018, James Mattis, alors chef du Pentagone, fit part des mêmes préoccupations, estimant que le Royaume-Uni pourrait perdre sa place « d’allié le plus proche des États-Unis » en raison de « l’érosion de sa puissance militaire ».

Reste que la British Army n’est pas la seule à avoir perdu de sa superbe… « La crise de la défense est en cours depuis une génération, à la suite de réductions répétées de la taille des trois forces armées depuis la fin de la Guerre Froide […] afin d’économiser de l’argent pour des priorités de temps de paix. L’impact des coupes budgétaires a été aggravé par l’échec chronique du MoD – et de la British Army – à se procurer les équipements les plus nécessaires malgré des des milliards de livres de dépenses », résume Sky News.

Président du comité spéciale de la Défense à la Chambre des communes, le député [conservateur] Tobias Ellwood est allé dans le sens des propos du général américain. « Il y a eu d’énormes investissements pour la Royal Navy et la Royal Air Force ces dernières années. Mais pas pour la British Army, qui est dans un état désastreux », a-t-il affirmé. Et d’ajouter : « J’espère que la révision de la stratégie de défense exeminera ce problème et inversera certaines coupes importantes faites il y a quelques années. C’est au Trésor et au 10 Downing Street [Premier ministre, ndlr] d’admettre que le monde change et que nous devons nous mettre sur le pied de guerre ».

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