Les forces russes évacuent l’Île aux Serpents après avoir revendiqué la destruction d’un CAESAr ukrainien

D’une surface d’environ dix-sept hectares et située à 50 km des côtes, l’Île aux Serpents a été conquise par la marine russe dès le début de l’invasion de l’Ukraine. D’un point de vue stratégique, son contrôle permet, en théorie, de verrouiller l’accès du port d’Odessa, qui est désormais le seul d’importance encore aux mains des Ukrainiens, après la perte de celui de Marioupol.

Si son intérêt est limité d’un point de vue strictement militaire, Kiev a fait de la reconquête de cette île un enjeu majeur, dans la mesure où elle renforcerait l’idée que ses troupes sont en mesure de contester la suprématie – présumée – des forces russes. Et c’est sans doute pour cette raison que Moscou entendait la conserver jusqu’à présent, en y déployant, notamment, des systèmes de défense aérienne Tor et Pantsir S1.

Ainsi, ces dernières semaines, les forces ukrainiennes ont lancé au moins deux attaques pour tenter d’en déloger leurs adversaires russes. Ce qui a pu donner lieu à des récits contradictoires.

Par exemple, la semaine passée, et après avoir revendiqué la destruction du Spasatel Vasily Bekh, un petit remorqueur russe qui naviguait dans les environs de l’île, Kiev a dit avoir remporté une victoire « significative » après avoir visé les éléments russe qui y étaient déployés avec de l’artillerie et des drones Bayraktar TB2. Ce que Moscou a démenti, parlant d’une « attaque folle » ayant échoué, assurant que « pas un seul missile ukrainien n’avait atteint sa cible »…. Alors que l’imagerie satellitaire suggérait le contraire, au moins un Pantsir S1 ayant été détruit.

Quoi qu’il en soit, avec la livraison aux forces ukrainiennes de systèmes d’artillerie à longue portée comme les CAESAr français et les M142 HIMARS américains, la position de la garnison russe sur l’Île aux Serpents risquait de devenir rapidement intenable. D’autant plus que le ravitaillement par mer allait être rendu encore plus compliqué avec les missiles anti-navires Harpoon reçus par l’Ukraine.

Cependant, parmi les matériels engagés dans la reconquête de l’Île aux Serpents et déployés, a priori, sur l’île de Kudansky, Kiev a surtout mis en avant le 2S22 Bohdana, un obusier automoteur de 155 mm de conception ukranienne [et ressemblant au CAESAr français], ainsi que le drone Bayraktar TB2.

À plusieurs reprises, ces derniers jours, l’état-major russe a indiqué avoir justement visé l’île de Kudansky afin de réduire l’artillerie ukrainienne au silence. Dans son compte-rendu du 29 juin, il a ainsi assuré qu’une « unité de CAESAr de fabrication française » y avait été détruite, sans donner plus de détail. Jusqu’alors, il n’avait jamais évoqué la destruction de l’une de ces pièces d’artillerie fournies par la France. Comme il n’a encore pas confirmé la capture de deux d’entre-elles, comme cela a pu être avancé sur Twitter [et démenti, à Paris, par l’État-major des armées].

Dans la foulée, une vidéo censée montrer la frappe contre ce CAESAR a été diffusée par la télévision russe… et des comptes pro-russes sur les réseaux sociaux.

Sauf que ces images ne montrent pas la destruction d’un CAESAr… mais celle d’un système 2S7 Pion de l’armée ukranienne, alors engagé dans le Donbass. Elles avaient d’ailleurs été diffusées le 9 juin dernier.

Cela étant, ce 30 juin, devant les difficultés à se maintenir sur l’Île aux Serpents, les forces russes ont annoncé qu’elles venaient de s’en retirer. Le porte-parole du ministère russe de la Défense, le général Igor Konachenkov, a fait valoir qu’il s’agissait d’un « signe de bonne volonté », les « objectifs fixés » ayant été « accomplis ». Et d’assurer que ce retrait aller faciliter les exportations ukrainiennes de céréales.

« La Russie ne s’oppose pas aux efforts de l’ONU pour créer un couloir humanitaire permettant d’exporter les productions de céréales d’Ukraine », a affirmé le général Konachenkov. « Cette décision ne permettra plus à Kiev de faire des spéculations sur une crise alimentaire imminente en disant qu’il est impossible d’exporter des céréales à cause du contrôle total exercé par la Russie sur le nord-ouest de la mer Noire », a-t-il conclu.

Mais pour l’état-major ukrainien, c’est avant tout une victoire, rendue possible par l’artillerie, laquelle a contraint les Russes à se retirer de ce territoire « stratégique » en mer Noire.

« Je remercie les défenseurs de la région d’Odessa qui ont fait le maximum pour libérer un territoire stratégiquement important », a commenté son chef, le général Valeriï Zaloujniï. « Incapables de résister au feu de notre artillerie, de nos missiles et de nos frappes aériennes, les occupants ont quitté l’île aux Serpents », s’est-il félicité.

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