Un responsable de l’US Air Force suggère de réduire la flotte de F-35A au profit de l’avion de combat « NGAD »

Actuel secrétaire à l’US Air Force pour la technologie et les acquisitions, le Dr Will Roper aimerait bien conserver son poste pour continuer à suivre les projets qu’il a lancés au cours de ces trois dernières années. Seulement, encore faut-il qu’il arrive à convaincre l’administration du président Biden, qui se mettra en place à compter du 20 janvier prochain.

Ayant rejoint le Pentagone sous l’ère du président Obama, Will Roper a pris du galon sous celle de Donald Trump. Aussi insiste-t-il sur le fait qu’il est apolitique. « Je ne m’implique pas en politique. J’ai certainement des opinions personnelles, très fortes. Mais si je viens travailler chaque jour, c’est pour apporter mes connaissances techniques, conduire le changement et promouvoir l’innovation », a-t-il plaidé, cette semaine, lors d’un échange avec les journalistes. D’où sa condamnation des évènements ayant eu lieu au Capitole, le 6 janvier dernier.

A priori, selon Defense One, le maintien du Dr Will Roper dans ses fonctions est dans le domaine du possible, dans la mesure où des proches du président élu et des membres de l’équipe de transition ont mentionné son nom [ainsi que son homologue à l’US Navy, James Geurts] parmi les personnalités susceptibles de conserver leur poste au sein de la prochaine administration.

En attendant, ces derniers mois, le Dr Roper a défendu une nouvelle approche dans la conception des avions de combat, appelée « Digital Century Series initiative« , en référence à celle dite des « Century Series Fighters » durant les années 1950/1960. Pour rappel, cette dernière consistait à développer et à mettre en service des appareils affichant des performances et des capacités en constant évolution, en fonction des avancées technologiques. Ce qui permettait à l’aviation américaine d’avoir un coup d’avance… Ou du moins de ne pas être déclassée.

Une telle approche est rendue possible gràce aux progrès réalisés en matière d’ingénierie, dont le concept de « jumeau numérique », qui permet d’accélérer le développement de nouveaux avions de combat.

« En fonction de ce que l’industrie pense pouvoir faire […], nous devrons définir avec précision la rapidité avec laquelle nous pensons construire un nouvel avion à partir de zéro. À l’heure actuelle, mon estimation est de cinq ans. […] J’espère que nous pourrons aller plus vite que cela – je pense que cela sera insuffisant à long terme [pour faire face aux menaces futures] – mais cinq ans, c’est beaucoup mieux que là où nous en sommes avec une acquisition normale », avait expliqué M. Roper, dans un entretien accordé à Defense News, le 16 septembre, en septembre 2019.

Et, un an plus tard, lors de la conférence annuelle organisée par l’Air Force Association, Will Roper a annoncé que le démonstrateur d’un nouvel avion de combat, développé dans le cadre du programme Next Generation Air Dominance [NGAD], venait d’effectuer son premier vol, en secret. « Nous avons battu des records en le faisant. […] Nous sommes prêts à construire l’avion de nouvelle génération avec une approche inédite », a-t-il dit.

Le programme NGAD consiste à mettre au point un « système de systèmes » centré sur un avion de combat de 6e génération, appelé Penetrating Counter Air [PCA], visant à remplacer les F-15 et les F-22A de l’US Air Force et placé au centre d’un réseau comprenant des drones, des effecteurs et d’autres capteurs avancés.

Mais pour Will Roper, la « Digital Century Series initiative » et le NGAD pourraient être fatals au F-35, dont l’US Air Force doit, à terme, disposer 1.763 exemplaires.

« Les coûts exorbitants du cycle de vie du F-35 signifient que l’US Air Force ne peut pas se permettre d’acheter autant d’avions dont elle a besoin pour combattre et une gagner une guerre aujourd’hui, ce qui rend d’autant plus important le programme NGAD », a estimé le Dr Roper, dont les propos ont été rapportés par Breaking Defense.

« Je pense que le F-35 est loin d’être un avion de combat abordable que nous pouvons acheter en gros », a-t-il insisté. Selon lui, le NGAD représente « une chance de concevoir un avion plus durable que le F-35 si, en fait, ce dernier ne peut pas réduire son coût par heure de vol. »

Sur ce point, le Government Accountability Office [GAO, l’équivalent américain de la Cour des comptes], n’a pas fait dans la dentelle, dans un rapport publié en mai 2020 [.pdf]. « Les avions F-35 en service n’ont pas satisfait aux normes de fiabilité et de maintenabilité, ce qui suggère que le programme ne livre pas des avions au niveau de qualité attendu. » En outre, il a également pointé le dérapage des coûts de développement pour la prochaine version « block 4 » de l’appareil, qui doit lui permettre de gérer des drones et des effecteurs, avec, en prime, des améliorations logicielles.

Cependant, il est peu probable que la suggestion du Dr Roper puisse être suivie d’effet. Réduire les commandes de F-35A aurait immanquablement des conséquences sur le prix unitaire de l’appareil, ce qui compromettrait les efforts de modernisation entrepris par les forces aériennes étrangères clientes. En outre, le programme F-35 constitue pour Washington un moyen de conserver et d’étendre son influence militaire, technologique et industrielle. Et on voit mal l’administration Biden s’en priver. D’ailleurs, il a survécu aux critiques acerbes du président Trump, ce dernier ayant même demandé à Boeing de soumettre une alternative.

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