La Marine royale néerlandaise lance un projet innovant pour ses opérations amphibies

Jusqu’en 2017, la Marine nationale disposait de Bâtiments de transport légers [BATRAL, classe Champlain] qui lui permettaient de mener des opérations amphibies et logistiques dans les territoires d’outre-Mer.

Ces navires ont été remplacés par des Bâtiments de soutien et d’assistance outre-mer [BSAOM] qui, s’ils sont dotés de nouvelles capacités, n’ont pas celle qu’avaient leurs prédécesseurs pour débarquer jusqu’à 12 véhicules et 130 militaires. D’où l’idée, développée à l’occasion des débats sur la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30, de lancer un projet de BATRAL de nouvelle génération.

Pour autant, il n’est évidemment pas question de renoncer aux trois porte-hélicoptères amphibies [PHA] de type Mistral, dotés chacun de quatre chalands de transport de matériel [CTM] pour mener à bien des opérations de débarquement.

Disposant de deux navires entrant dans la même catégorie que les PHA Mistral même s’ils sont moins imposants, à savoir le Zr. Ms. Rotterdam et le Zr. Ms. Johan de Witt, les Pays-Bas, qui ont également des territoires outre-mer, ont l’intention de faire un tout autre choix.

En effet, le 6 mars, le ministère néerlandais de la Défense a annoncé qu’une seule et même classe de navire allait remplacer non seulement les Zr. Ms. Rotterdam et le Zr. Ms. Johan de Witt mais aussi les quatre patrouilleurs hauturiers [classe Holland] de la Marine royale des Pays-Bas [Koninklijke Marine].

Pour justifier l’acquisition de six « navires de transport amphibie », le ministère néerlandais de la Défense explique que « la doctrine des opérations amphibies modernes appelle à une action légère, rapide et dispersée, avec un soutien logistique réduit ».

Aussi, poursuit-il, la « nouvelle génération de navires sera plus petite » que celle de la classe Rotterdam. « Cela pourrait, par exemple, conduire au déploiement simultané de plusieurs navires de transport amphibie », précise-t-il. Quant aux patrouilleurs hauturiers, ils n’ont pas été conçus pour tenir « le haut du spectre » mais pour des missions relevant de l’action de l’État en mer [police des pêches, lutte contre les trafics, etc.]. D’où la nécessité pour la Koninklijke Marine de posséder de navires dotés de capacités accrues pour intervenir en cas de conflit.

En outre, fait valoir le ministère néerlandais, combiner deux classes de navires en une seule donnera « plus de flexibilité » à la Koninklijke Marine. « Disposer d’une seule classe de navire accroît l’efficacité » et « garantit des économies d’échelle en matière d’achat, de formation et de maintenance », plaide-t-il.

Le contrat pour le développement et la construction de ces six « navires de transport amphibie » devrait revenir à Damen, qui propose le concept « Enforcer 14426 Landing Platform Dock« , un navire de 11’000 tonnes pour une longueur de 144 mètres [voir photo]. Quant à la coopération avec le Royaume-Uni en matière d’opérations amphibies, annoncée en juin 2023, elle pourrait se traduire par l’acquisition conjointe de sous-systèmes [grues, propulsion, plateforme aéronautique, etc.].

Cependant, la Marine royale néerlandaise pourrait connaître une réduction temporaire de capacité d’ici la livraison du premier « navire de transport amphibie », prévue en 2032, le Zr. Ms. Rotterdam devant arriver en fin de vie dans quatre ans. « La Défense examine donc quelles mesures sont nécessaires pour maintenir le navire en service au moins jusqu’en 2032 », précise le ministère.

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25 contributions

  1. Félix GARCIA dit :

    Très pertinent pour leurs besoins.
    Je ne serais pas étonné qu’ils rencontrent du succès à l’export, comme le montre l’exemple récent du Portugal :
    https://www.opex360.com/2023/11/27/la-marine-portugaise-va-se-doter-dun-navire-polyvalent-particulierement-innovant/

    • Félix GARCIA dit :

      « DIMDEX 2024: Damen MPSS, Dearsan FAC, Fincantieri in Qatar, Meteksan latest systems »
      https://www.youtube.com/watch?v=OCDk8jE3wnA
      (00:40 – DAMEN MPSS design for the Portuguese Navy)

    • HMX dit :

      @Felix GARCIA
      Le concept est en effet intéressant… mais interroge quand même. On ne connaît pas encore les caractéristiques détaillées, les capacités d’emport, ni l’armement, notamment d’autodéfense, de ces futurs navires qui semblent sur les visuels disponibles se contenter d’un simple canon d’artillerie (40 ou 76mm ?).

      Sur le papier, la Marine néerlandaise va donc remplacer 2 « vrais » TCD et 4 patrouilleurs hauturiers par une classe unique de 6 « mini-TCD » de 11 000 tonnes. Un tonnage à la fois « overkill » pour effectuer des missions de police des pêches aux Antilles… et très « léger » pour envisager une participation à un débarquement amphibie dans une guerre de haute intensité. Ce compromis est-il pertinent ?

      Dans un contexte « temps de paix », l’idée de « super patrouilleurs avec capacité amphibie » me semblerait très intéressante. Dans un contexte où les pays européens et l’OTAN doivent remonter en puissance pour faire face à de potentiels conflits de haute intensité, pas sûr que renoncer à deux « vrais » navires amphibie au profit de « mini-TCD » constitue un calcul judicieux.

      • Félix GARCIA dit :

        Bonjour HMX,

        Voyez toutes ces parties plates : pensez à la modularité que cela permet, notamment « à l’heure de la conteneurisation » des armes et équipements.
        Le radier permettra une vaste gamme d’opérations : déploiement de drones navals, de navires de débarquement, de mines, de capteurs, d’embarcations rapides, de véhicules amphibies, etc …

        De toute évidence, dans « la division du travail » au sein des alliés, ils comptent jouer un rôle de soutien.

        Il y aura probablement de plus en plus de « vaisseaux-mères ».

      • anthonyl dit :

        Pertinent dans un contexte néerlando-néerlandais…
        La marine néerlandaise utilise essentiellement ses moyens amphibies aux Antilles pour dispactcher des secours pendant la saison cyclonique. En temps de guerre les Néerlandais n’auraient pas besoin de plus de 3 ou 400 hommes pour intervenir dans leurs iles qui a elles toutes ne font pas la superficie de la Martinique et la moitié des sa population. Sorti de ce contexte effectivement c’est faible…

        • Lado dit :

          Aruba face aux Venezueliens qui veulent du bien à l’Otan..et aiment les infra petrolieres

        • dolgan dit :

          Mais 11 000 T pour faire de la patrouille le reste du temps, c est gros.

  2. Qui ça ? dit :

    Serait-ce le retour de navires pouvant plager, une capacité perdue avec la fin de la classe BATRAL ? C’était pourtant une capacité bien utile en outre-mer.

    • HMX dit :

      Visiblement non, le concept présenté ici ne prévoit pas la capacité de plager.

    • Le Chouan dit :

      Il me semble qu’un projet de 4 BATRAL NG a été acté dans la nouvelle LPM 2024/2030.
      En ce qui concerne les caractéristiques de ces futurs bâtiments, rien ne parait avoir été défini pour l’instant, j’espère qu’ils seront un peu plus grands.
      Ils sont prévus pour stationnés en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie, à la Martinique et à la Réunion vers 2030.
      Le non remplacement des BATRAL de la classe « Champlain » c’est traduit par une réelle perte de capacité de plageage (hommes, véhicules blindés, chars et autres matériels), que n’ont pas les nouveaux BSAOM.
      Je pense qu’il serait bon de reconstituer en plus des 3 PHA, une véritable flotte amphibie basée en métropole (Brest), avec 2 TCD NG plus long et plus large que ceux de la classe « Foudre » et 2 BATRAL NG de plus des 4 prévus pour les O-M.
      Cela nécessitera de construire au minimum 4 EDA-R et 8 EDA-S supplémentaires.

      • Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? dit :

         
        Le non remplacement des BATRAL S’est traduit par une réelle perte de capacité.

        • Le Chouan dit :

          Ouais, ouais, vous n’avez que cela à faire, pfff…
          Heureusement que vous êtes là !

  3. anthonyla dit :

    il me semblait que disposer les superstructures sur l’avant, comme ça causait des perturbations qui gènent l’appontage. Raison pour laquelle on a abandonné le concept, après l’ancien croiseur porte hélicoptère Jeanne d’Arc…

    • YU dit :

      pouvez vous développer car je ne comprends pas votre remarque. Toutes les plateformes Hélico sont à l’arrière des bâtiments de surface il me semble.

      • anthonyl dit :

        Tous les batiments ont une plateforme arrière à 1 spot pas un long pont d’envol à 3 spots comme le navire néerlandais. Nous avions expérimenté ce type de configuration avec la Jeanne d’Arc (copié par les Russes, avec la classe Moskwa) et abandonné parce que ce la générait des perturbations à l’appontage. Les porte-hélico français ont un ilot décalé comme les porte-avion, pour cette raison.

    • E-Faystos dit :

      pourtant, les FReMM et FDI ont une grosse superstructure centrale.
      probablement que même gênant, il faut faire avec si on veut optimiser l’espace utile à bord

      • anthonyl dit :

        L’a Marine nationale a testé la configuration long pont d’envol arrière, bloc passerelle avant à deux reprises avec la Jeanne d’Arc et avec les TCD Foudre. La Jeanne d’arc resta un exemplaire unique sans vie opérationnelle autre que son tour du monde annuel, les deux Foudre ont été vendus à mi-vie. Les TCD Orage a ilot déporté ont servi pendant 40 ans et les successeurs de Foudre sont les Mistral également à ilot déporté. Cherchez l’erreur…

  4. Guerre durable, verte et inclusive dit :

    le problème, si j’ai bien compris, est que les nouveaux équipements arrivent au moment où les anciens partent… ce qui annule tout accroissement de masse…

    • Guerre durable, verte kaki et incomplète dit :

      Mais qui en Europe a encore les sous… pour de l’accroissement de masse… a part à la marge… la Norvège peut-être…

  5. Elwin dit :

    La ligne est très esthétique en tout cas.

  6. Alex dit :

    Ce genre de projet me semble effectivement très important, quand on voit l’importance qu’ont pris les drones. Le fait d’avoir un navire intermédiaire, pas trop chère qui puisse employer des drones, aérien, sous marin, et de surface, en plus d’hélicoptère et de capacités de débarquement, en gros un couteaux suis, me semble vraiment essentielle pour le prochain années. d’ailleurs la marine Portugaise à pris de l’avance la dessus… https://www.opex360.com/2023/11/27/la-marine-portugaise-va-se-doter-dun-navire-polyvalent-particulierement-innovant/ Payez en grand partie par l’europe moi bon on ne diras rien ^^

    • Shareholder dit :

      Ce n’est pas qu’il n’est pas trop « chère », c’est qu’il n’est pas trop cher.

  7. CosmicDonut dit :

    Ce qui est bien quand tu changes de paradigme justifiant de fait la multiplication de navires de plus faible tonnage, c’est que tu peux en annuler beaucoup ! C’est magique, les marines européennes adorent ce tour. L’illusion de coller aux exigences opérationnelles avec moins de navire, 30ans qu’on en mange. Ici c’est encore plus du génie parce-qu’ils vont en plus réussir à faire croire que leur marine gagne en volume et densité.

  8. E-Faystos dit :

    pourtant, les FReMM et FDI ont une grosse superstructure centrale.
    probablement que même gênant, il faut faire avec si on veut optimiser l’espace utile à bord

  9. PK dit :

    « « Disposer d’une seule classe de navire accroît l’efficacité » »

    L’avantage, quand elle est coulée, est que l’on a deux manques à combler, au lieu d’un.

    « « garantit des économies d’échelle en matière d’achat, de formation et de maintenance » »

    Ah oui, la vraie raison : les gros sous. Parce que c’est vrai, on gagne la guerre en tirant sur la bourse…