La Suède met un terme à son enquête sur le sabotage des gazoducs NordStream 1 et 2

Qui a saboté les gazoducs NordStream 1 et NordStream 2, chargés d’acheminer du gaz naturel russe en Europe occidentale via la Baltique, en septembre 2022 ? Depuis, les hypothèses, y compris les plus farfelues, n’auront pas manqué.

La Russie fut évidemment soupçonnée, même si aucune preuve ne pouvait démontrer son implication, alors que la présence d’un navire ravitailleur de sous-marin de la marine russe fut constatée au moment des faits, non loin des lieux où les gazoducs furent sabotés.

De son côté, Moscou accusa les forces spéciales du Royaume-Uni, puis celles des États-Unis, d’avoir joué un rôle dans le sabotage. En février 2023, le journaliste américain Seymour Hersch affirma, sans le prouver, que le coup avait été monté par l’US Navy, avec l’appui des Norvégiens.

Par ailleurs, le fait qu’un avion de patrouille maritime P-8A Poseidon américain volait au-dessus de la Baltique peu avant les explosions pouvait en outre susciter des interrogations… d’autant plus qu’il avait coupé son transpondeur. En outre, il fut aussi rapporté par l’entreprise américaine SpaceKnow, spécialiste de l’analyse des données satellitaires, que deux navires avaient désactivé leur système d’identification automatique [AIS], pourtant obligatoire pour les navires civils, peu avant les explosions ayant affecté les deux gazoducs.

Cette affaire connut un rebondissement en mars 2023, avec les révélations du New York Times. Le quotidien affirma en effet que les soupçons des autorités américaines se portaient sur un « groupe pro-Ukraine » de six personnes. Et d’avancer qu’il aurait utilisé un voilier – l’Andromeda – pour déposer des explosifs sur les deux conduites de gaz. La mer Baltique étant peu profonde, une telle opération n’était pas impossible pour des plongeurs expérimentés.

Les explosions étant survenues dans leurs zones économiques exclusives [ZEE] respectives, le Danemark et la Suède lancèrent leurs propres investigations. De même que l’Allemagne, étant donné que ce sabotage affectait ses approvisionnement en gaz naturel.

Début avril, le parquet suédois écarta l’hypothèse avancée par le New York Times, en affirmant que seul un État pouvait avoir commis le sabotage des gazoducs. « Mais c’est une affaire complexe », fit-il valoir.

Cependant, la piste d’une action ukrainienne reprit de la vigueur en novembre dernier, le Washington Post et l’hebdomadaire allemand Der Spiegel ayant désigné un certain Roman Tchervinski, un ancien des forces spéciales ukrainiennes, comme étant le « coordinateur » du sabotage. Et d’expliquer qu’il aurait supervisé la logistique de l’opération menée par un groupe de six personnes, à bord d’un voilier loué sous de fausses identités. « Toutes les spéculations sur mon implication dans l’attaque de Nord Stream sont répandues par la propagande russe sans aucun fondement », fit valoir l’intéressé, par l’intermédiaire de son avocat.

Alors, qui a saboté NordStream 1 et NordStream 2 ? La réponse ne sera pas donnée par le parquet suédois puisque celui-ci vient d’annoncer la fin de l’enquête préliminaire qu’il menait depuis près de dix-huit mois, en expliquant que celle-ci n’est finalement pas « du ressort de la juridiction suédoise ».

« L’objectif principal de l’enquête préliminaire était de déterminer si des citoyens suédois étaient impliqués dans cet acte, si le territoire suédois avait été utilisé pour le commettre et si les intérêts ou la sécurité de la Suède avaient été menacés », a expliqué le parquet. Or, a-t-il continué, « rien n’indique que la Suède ou des citoyens suédois ont été impliqués dans l’attaque, qui a eu lieu dans les eaux internationales ».

« Un grand nombre de mouvements de navires ont été analysés afin de comprendre ce qui s’est passé. En outre, une enquête approfondie sur les lieux du crime a été menée et plusieurs interrogatoires ont eu lieu à ce sujet. Dans le contexte de la situation actuelle, nous pouvons affirmer que la compétence suédoise fait défaut », a développé Mats Ljungqvist, le procureur suédois.

Visiblement, la Suède entend laisser le soin à l’Allemagne de révéler le fin mot de cette affaire… « Nous avons collaboré à l’ enquête préliminaire menée par les autorités allemandes. Dans le cadre de cette coopération juridique, nous avons pu remettre des éléments pouvant servir de preuves dans l’enquête préliminaire » qu’elles ont lancée, a en effet indiqué M. Ljungqvist, en précisant qu’il ne fera pas « de commentaires supplémentaires » au sujet de cette affaire pour des raisons de confidentialité.