Le président Biden promet des représailles après la mort de trois militaires américains en Jordanie

En mars 2016, dans le cadre de la lutte contre l’État islamique [EI ou Daesh], les forces américaines installèrent une garnison à Al-Tanf, localité qui, située dans le sud de la Syrie, était alors stratégique étant donné que son contrôle permettait de verrouiller l’axe Damas-Bagdad, d’empêcher d’éventuelles infiltrations jihadistes en Jordanie et, accessoirement, d’assurer la formation de rebelles syriens.

Depuis, le califat auto-proclamé par Daesh a été défait. Pour autant, n’ayant pas perdu son importance stratégique, la base d’Al-Tanf est toujours contrôlée par les troupes américaines. D’où les attaques régulièrement lancées contre elle par les forces syriennes et les milices affiliées à l’Iran.

Cela étant, pour assurer le soutien de leurs forces déployées à Al-Tanf, les États-Unis ont établi la base logistique « Tower 22 », située en Jordanie, à moins d’une dizaine de kilomètres de la frontière syrienne. On ne sait que très peu de choses à son sujet, si ce n’est qu’elle abriterait environ 350 militaires américains… Et que l’on peut aisément la trouver sur Google Maps [avec une photographie satellite en prime…]

Or, le 28 janvier, cette base a été visée par un drone kamikaze [ou munition téléopérée, MTO]. Selon l’US Centcom, le commandement américain pour le Moyen-Orient et l’Asie Centrale, trois militaires ont été tués. Et au moins trente-quatre autres ont été blessés, dont huit ont dû être évacués. Ce bilan est susceptible d’être revu à la hausse, a-t-il précisé.

Depuis le 17 octobre, les forces américaines et celles de la coalition anti-jihadiste [opération Inherent Resolve, OIR] ont été visées à 150 reprises en Irak [60 fois] et en Syrie [90 fois] par des milices affiliées à l’Iran. L’attaque contre la base Tower 22 est la première du genre en Jordanie.

Il n’est pas impossible qu’elle soit aussi une réponse aux récentes frappes effectuées par la Force aérienne royale jordanienne contre des trafiquants de captagon [une drogue de type amphétamines] en Syrie. La semaine passée, Damas, qui tire de gros profits de ce trafic, a dit estimer que « de telles opérations militaires ne sont pas justifiées » tout en assurant vouloir « éviter d’attiser les tensions et de nuire à la poursuite du rétablissement » de ses « relations fraternelles » avec Amman.

Quoi qu’il en soit, le président américain, Joe Biden, a promis des représailles contre les responsables de l’attaque contre la base Tower 22.

« Aujourd’hui [28 janvier], l’Amérique a le cœur lourd. La nuit dernière, trois militaires américains ont été tués, et plusieurs blessés, dans une attaque de drone sur nos forces basées dans le nord-est de la Jordanie, près de la frontière syrienne. […] Nous savons que cela a été mené par des groupes de combattants radicaux soutenus par l’Iran opérant en Syrie et en Irak », a déclaré M. Biden. « N’ayez aucun doute : nous allons faire rendre des comptes à tous les responsables, quand et comme nous le voulons », a-t-il ensuite assuré.

« Nous allons prendre toutes les mesures nécessaires pour défendre les États-Unis, nos troupes et nos intérêts », a affirmé Lloyd Austin, le chef du Pentagone.

J’adresse mes sincères condoléances à Lloyd Austin @SecDef et à la nation américaine après l'attaque qui a coûté la vie à trois militaires américains.

Les États-Unis peuvent compter sur notre soutien dans notre lutte commune contre le terrorisme, au Moyen-Orient et ailleurs. https://t.co/Ek5DfHA3Ya

— Sébastien Lecornu (@SebLecornu) January 28, 2024

Après avoir affirmé que l’attaque ayant visé les troupes américaines n’avait pas eu lieu en Jordanie mais à Al-Tanf, le gouvernement jordanien a finalement condamné la frappe contre la base Tower 22, par la voix de Muhannad Mubaidin, son porte-parole. Et de rappeler que la coopération militaire avec les États-Unis porte essentiellement sur les opérations de contre-terrorisme et de sécurisation des frontières.

« La Jordanie continuera à lutter contre le terrorisme et la contrebande de drogues et d’armes à la frontière syrienne. Elle affrontera avec fermeté et détermination quiconque tenterait d’attaquer la sécurité du Royaume », a-t-il affirmé.

Reste à voir qui est derrière cette attaque… Via Telegram, la « Résistance islamique en Irak », qui fédère plusieurs groupes armés alignés sur les intérêts iraniens, a revendiqué des frappes contre « trois bases en territoire syrien », dont celles d’Al-Tanf et de Rukban. Et, de son côté, Téhéran a décliné toute responsabilité. C’est un « conflit entre les États-Unis et les groupes de ‘résistance’ dans la région », a fait valoir la diplomatie iranienne.

Ces dernières semaines, les États-Unis ont répliqué aux attaques contre leurs troupes en Irak et en Syrie en frappant ponctuellement des milices pro-Téhéran et des positions de la force al-qods, une unité des gardiens de la révolution iraniens. Probablement qu’ils en feront de même après celle ayant visé la base Tower 22, étant donné qu’il est hors de question pour eux de s’en prendre directement à l’Iran.