Marine nationale : Les sous-marins nucléaires d’attaque n’emporteront plus de torpilles lourdes F17

Une page vient de se tourner pour l’Escadrille des sous-marins nucléaires d’attaque [ESNA]. En effet, lors d’un exercice simulant un « contexte opérationnel » exigeant effectué dans le cadre de sa mise en condition opérationnelle, le SNA Améthyste [classe Rubis] a procédé à l’ultime tir d’une torpille lourde F17.2 au large de Toulon. Le Bâtiment de soutien et d’assistance affrété [BSAA] Pionnier avait été mobilisé à cette occasion.

« Les F17.2 ne seront désormais plus mises en œuvre sur SNA et laissent la place aux torpilles F21, qui seront à l’avenir mises en œuvre depuis tous les sous-marins », a en effet indiqué la Marine nationale, le 12 janvier.

Pour rappel, la conception de la torpille F-17 remonte aux années 1970. Produite à l’époque par la Direction des constructions navales [DCN, devenue « Naval Group » aujourd’hui], elle a été améliorée au fil du temps. Utilisant un sonar passif, la F-17 mod 1, d’une longueur de 5,90 mètres pour un diamètre de 533 mm, avait une portée de 20 km et pouvait atteindre la vitesse de 35 noeuds. Quant à la F-17 mod 2, pouvant être filoguidée, ses dimensions sont plus réduites mais sa portée a été allongée.

Le remplacement de la F-17 fut lancé en 2008, dans le cadre du programme Artemis. Il y avait urgence car un rapport parlementaire publié en 2010 avait expliqué que son « obsolescence technique et opérationnelle serait atteinte en 2015 ».

Seulement, le programme Artemis, qui a depuis permis de mettre au point la torpille lourde F-21, a connu des débuts difficiles. Devant initialement être mené dans le cadre d’une coopération avec l’Italie, son schéma industriel dut être revu en cours de route. Finalement, Naval Group se rapprocha de l’allemand Atlas Elektronik [filiale de ThyssenKrupp Marine Systems], de Thales Underwater Systems [TUS] pour le guidage acoustique et d’Eurenco, pour la charge militaire.

Normalement, les premières torpilles F-21 auraient dû être livrées à la Marine nationale en 2016… Elles le furent avec trois ans de retard. En outre, leurs performances n’étaient visiblement pas conformes aux attentes. Du moins, c’est ce qu’expliqua Joël Barre, alors Délégué général pour l’armement, lors d’une audition parlementaire, en 2021.

« Nous achevons la mise au point de la première génération. Elle gagnera à obtenir de meilleurs résultats de tir. Des tirs sont prévus dans les semaines qui viennent dans le cadre de la campagne de préparation de mise en service du [SNA] Suffren. J’espère qu’ils seront de nature à répondre à ce besoin », avait-il déclaré. Et d’ajouter : « Nous avons décidé de refondre le tout en faisant de la torpille l’objet d’un programme incrémental » et « nous sommes en train d’en livrer au Suffren et aux SNA la première définition, dont la performance est dégradée ».

Les choses se sont-elles améliorées depuis? La Marine nationale le laisse entendre. « Les entraînements réguliers conduits depuis trois ans avec cette nouvelle arme [la F21] ont d’ores et déjà permis d’en éprouver les différentes capacités, qui offrent des performances au combat prometteuses », a-t-elle indiqué.

Les performances de la F-21 sont sans commune mesure avec celles de la F-17 Mod 2. Ayant quasiment la même apparence [533 mm de diamètre pour 6 mètres de longueur et deux jeux d’hélices], elle est contrôlée jusqu’à sa cible par le sous-marin grâce à une fibre optique. D’une portée de 27 nautiques [50 km] et pouvant atteindre la vitesse de 50 noeuds, elle est aussi dotée d’un système d’autoguidage acoustique, ce qui lui permet de détecter et de suivre un objectif de façon autonome ».

« Dotée d’une très grande puissance de calcul qui lui confère des capacités exceptionnelles de traitement en temps réel, la torpille F21 bénéficie d’un système de mission avancé et d’une autonomie accrue. Ces caractéristiques techniques élargissent considérablement les possibilités d’emploi tactique avec une capacité de discrimination des cibles sans égal y compris dans des environnements très difficiles », résume Naval Group.

Photo : Marine nationale

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35 contributions

  1. Sorensen dit :

    C’est bien. C’est supérieur.

  2. Félix GARCIA dit :

    « Ep. 4/8 – Naval Group Underwater Weapons in Saint-Tropez: F21 Torpedo Program Update »
    https://www.youtube.com/watch?v=zmR5zTvFNp0
    « Ep. 5/8 – Naval Group Underwater Weapons in Saint-Tropez: F21 Torpedo Heavyweight Torpedo in Details »
    https://www.youtube.com/watch?v=Z00VV5mqi2A

  3. peterr dit :

    On devrait donc refiler le stock de F-17 au ukrainiens. Sûr qu’ils bricoleront un truc avec. Le genre de truc qui amusera fort les russes

    • jp dit :

      des drones torpilleurs, c’est pas mal, pas mal, eux au moins ils sont inventifs, la flotte russe de la mer noire va apprécier.

  4. Kamelot dit :

    Enfin !… et en attente de développements ultérieurs.

  5. Prof de physique dit :

    C’est bien et je félicite les marins, ingénieurs et techniciens pour cette performance.
    Mais ne serait il pas pertinent d’avoir aussi des torpilles rustiques, simples et moins couteuses pour certaines tâches ?
    Je pense par exemple à la destruction d’obstacles fixes comme des champs de mines pour lesquels une torpille moins couteuse, peut-être plus petite, navigant « à l’ancienne » sur une trajectoire rectiligne, serait plus justifiée.

    Autre question, à laquelle je suppose ne pas être le seul à penser, que se passe-t-il en cas de rupture de la fibre optique au bout de quelques kilomètres ?
    Mais peut-être que la réponse n’est pas publique.

    • Delta dit :

      La réponse est dans l’énoncé :
       » elle est aussi dotée d’un système d’autoguidage acoustique, ce qui lui permet de détecter et de suivre un objectif de façon autonome « 

    • Howk dit :

      Lorsqu’un soum est menacé par une torpille, il va tenter (selon les conditions) d’envoyer immédiatement une torpille dans l’azimut de la menace, sans filoguidage, puis dérober. Cette tentative a peu de chances de toucher la torpille assaillante, mais oblige son lanceur à couper son filoguidage puis dérober aussi.

      Une torpille sans filoguidage est efficace jusqu’à une certaine distance, dans un champ de détection moins large qu’avec redirection par le soum. En phase finale, le filoguidage est sectionné par le lanceur bien avant l’explosion (pas l’impact).

      • Le Spadassin dit :

        @Howk… simple question afin d’éclairer ma lanterne : Un sous-marin, avec ses torpilles dirigées par filoguidage, doit donc embarquer des dizaines, voire des centaines, de km de fil de guidage pour l’ensemble des torpilles dont il dispose à son bord…sachant qu’une torpille moderne peut poursuivre une cible située à plusieurs dizaines de km…
        Merci d’avance.

        • Howk dit :

          Je ne suis pas sous-marinier, je précise.

          Oui. Après, le fil en fibre optique n’a pas une épaisseur de taré. Ce qui compte est que la bobine soit soulevable par un homme, jusqu’à hauteur de tube, pour la connexion tube-torpille avec bobine à l’extérieur. Je précise qu’une torpille qui se decale de l’axe du lanceur peut obliger la coupure du filoguidage. Si je fais demi-tour après tir, mon filoguidage est mal parti…

          Les bobines permettent le filoguidage jusqu’à portée maximale de tir, normalement. Je n’affirme rien. Les portées de tir maximales ne sont jamais employées avant tir, puisque les derobades d’évitement à distance inférieure sont prises en compte pour qu’une torpille puisse acquérir (si autonome) sa piste une seconde fois (après leurrage et manoeuvre de la cible).

          Pour traduire: une F17. 2 était chassée du tube à 2 3 nautiques, pour d’une part réduire le temps de réaction (evasive, recherche de couche), d’autre part poursuivre une cible qui accélère en eloignement. Si le tir est effectué à 10 nautiques :
          – la torpille n’a aucune marge de reacquisition.
          – principe de no escape zone très improbable.
          – la torpille est détectable plus tôt par la cible. Gros souci puisque le sous-marin se signale.

          Bref, aller à 25 nautiques n’encourage pas le tir à 20 nautiques, sauf sur PAN par saturation si bulle de protection trop forte. Qui dit saturation dit au moins 3 torpilles, là oui ça peut parler. Pour tout le reste, navire et sous-marin, l’allongement de distance réduit la garantie de coup au but. Trop d’éléments dépendent de la contre-detection adverse, donc son propre signalement dès la chasse de torpille.

        • Aymard de Ledonner dit :

          La fibre optique est très fine et très légère donc cela ne pose pas de problème dans le cas d’une torpille. L’e missile akéron qui ne pèse que 11kg emporte aussi de la fibre optique pour un guidage jusqu’à 5km (et des tirs à plus grande distance ont été réalisés). Cette torpille va 10 fois plus loin mais pèse 1 tonne et demi…. et dispose d’un volume sans comparaison donc sous réserve de ma qualité de profane, je pense que loger la bobine de fibre n’a pas du être le principal problème des concepteurs de la torpille.

          • Howk dit :

            je ne sais pas si la bobine est intégrée sur torpille directement, ou si la bobine est branchée de l’extérieur. Je suis preneur d’infos si détails grand public.

            Je croyais avant ce message que les bobines étaient externes, sans vérification du détail. Si bobine déficiente au moment des solutions de tir envoyées, je croyais naïvement qu’une bobine externe dans le compartiment était plus facilement changeable.

          • Le Spadassin dit :

            Mes connaissances en guerre sous-marine sont des plus lacunaires… mais je doute fortement que la bobine soit intégrée directement à la torpille…d’ailleurs, j’ai du mal à imaginer l’intérêt d’un tel concept…
            Pour moi…la bobine filaire se trouve dans le vecteur sous-marin…Ceci dit, j’imagine qu’il doit y avoir obligation de laisser ouvert le tube de lancement, pour le déroulé du fil de guidage, durant toute la séquence de tir puis de poursuite vers la cible…

          • Aymard de Ledonner dit :

            @Howk
            Je n’ai que ce qui est public. Je pense que le fil se déroule des deux cotés à la fois, tant du coté torpille que du coté sous-marin, comme expliqué ici :
            https://www.meretmarine.com/fr/defense/nouveau-tir-de-torpille-f21-depuis-un-sna

            J’ai trouvé également ce document lus ancien, mais intéressant, qui évoque la possibilité d’embarquer des torpilles lourdes sur des bâtiments de surface ce dont on a pas entendu parler. Les FDI ne sont pas prévues pour cela.
            https://anocr47.com/Files/Other/Torpille%20F21.pdf

          • Félix GARCIA dit :

            Bonsoir Howk,

            « qui évoque la possibilité d’embarquer des torpilles lourdes sur des bâtiments de surface ce dont on a pas entendu parler. »
            Pour les futurs cuirassés nucléaires à canons EM et propulsion MHD.
            ^^

        • Les murs ont des oreilles dit :

          Si l’information à ce sujet n’est pas publique, c’est probablement que vous n’avez pas à la connaître.

          • Howk dit :

            Si toutes les sous-marinades du monde n’ont pas accès au bea-ba de la lutte ASM, elles peuvent aussi chasser les curieux qui réfléchissent en OSINT.

            « Réfléchir, c’est commencer à désobéir » disent quelques cons à leurs subalternes. Si l’information n’est pas publique, poser la question n’est pas interdit. Je serais surpris que les bases de la lutte ASM soient un secret inviolable en 2024.

    • Pldem806 dit :

      On ne détruit pas un champs de mines s’étendant sur plusieurs Nq² avec des torpilles.

      • FNSEA dit :

        Les agriculteurs le savent bien : le mot champ s’écrit sans s au singulier.
        Un champ de mines, un champ de betteraves, un champ de manœuvre, un champ de colza, un champ de courses, un champ de lavande, le Champ-de-Mars, le champ de blé, le champ des possibles, le champ de luzerne, un champ magnétique, un champ de poireaux, le champ d’honneur, le champ de bleuets.

  6. mich dit :

    Toujours aussi pratique pour certains le  » des Français  » !

  7. Louis-Marie de Belleville dit :

    Tout le monde sait que les Français vivaient mieux quand ils étaient envahis… Merci de votre commentaire, qui montre qu’on on peut être à la fois idiot et lâche

  8. Lyonpuce dit :

    Oh, le frustré de service !!!
    trop drôle et insignifiant …

  9. ZoSo dit :

    Tant qu’on ai pas obligé de manger votre horrible bortsch ça me va très bien mon cher petit propagandiste.

  10. dolgan dit :

    oui oui. Et les russes mangent des cailloux.

  11. Eric dit :

    Passer des petits sous-marins vieux de quarante ans de classe Rubis et des torpilles F17 aux Barracudas/Suffren deux fois plus gros et armés de F21, c’est un énorme bond en avant, il faut bien le dire. La crédibilité de notre (petite) flotte de SNA est très nettement renforcée aussi bien auprès de nos alliés que de nos « compétiteurs »… Evidemment, ce serait quand même mieux d’avoir deux bâtiments de plus que les six prévus.

  12. LeGaulois dit :

    Le prix d’une torpille?

    • Wagdoox dit :

      2,5 m, c’est justement la munition la plus chere de notre arsenal. Avec moins de 100 produite, la r&d pese enorment dans la facture finale.

      • Aymard de Ledonner dit :

        Le MdCN est donné à presque 3 millions. Mais vous avez raison : des performances très élevées après un développement long et couteux pour un petit nombre produit….

    • basstemp dit :

      Très probablement : Les yeux dla tête ça coute … Mais est ce de toute façon, une info qui aurait vocation a être rendu publique ? Je ne pense pas … Et de toute façon : D’un, on parle d’une munition a faible vocation de consommation, apparemment elles sont rarement tirées en essais & entrainement et quand bien mm, il parait probable que l’entrainement de toute façon soit une simulation (potentiellement embarquée a bord) , de 2 : Et la ça rejoint un peu le sujet des polémiques sans fin autour du cout des missiles Aster 15 (1,5 million d’€ le missile) et la faible valeur des cibles récentes (les drones iraniens mis en oeuvre par les Houthis en mer Rouge) ou en gros : Il ne faut pas confondre le fait certes que la cible ait en effet une faible valeur de comparaison avec la munition tirée pour la sulfater et la très haute valeur qui est protégée et donc garantie par l’emploi d’une telle munition : La frégate qui a été protégée par la destruction de la cible et qui était selon les récentes confirmations, belle & bien visée même si apparemment le drone n’était pas l’engin « munition » réel (qui aurait été plutot un missile de croisière mais qu’ils n’ont apparemment pas eu le temps de tirer, le drone servant en gros d’engin pour mener le missile vers sa cible de haute valeur, comme en gros une logique d’illumination laser de pod guidant des bombes qui vont précisément vers la ou le laser dicte d’aller : Enfin c’est peut etre une autre méthode, peu importe mais la logique d’emploi en tout cas est bien celle la : Le drone apparemment nécessaire pour que le missile puisse atteindre sa cible) , ce qui est donc important : C’est la haute valeur qui a été protégé , pas la faible valeur de ce qui a été détruit … Et dans ce cas alors, la valeur de nos missiles Aster en comparaison du cout de ce qu’on aurait potentiellement pu perdre : Rend l’emploi du missile clairement validé et sans regret !

      C’est pareil pour nos torpilles F21 : Peut importe leur valeur unitaire en millions d’€ , leur emploi effectif et détruisant une menace directe qu’elle soit couteuse ou peu couteuse (l’engin menaçant notre soum’ ou un navire a haute valeur protégé par le soum, ex : Le CDG …) est de toute façon automatiquement validé par la très haute valeur de l’engin protégé et garanti par l’emploi d’une telle munition ! C’est cette valeur la que nous devons prendre en compte, pas la valeur du consommable qui mm onéreux a hauteur de 2-3 voir 4 millions d’€ : Reste largement préférable que de perdre un batiment majeur comme une frégate, un PA ou un soum !!! De la en fait, le débat n’a même lieu d’être ! Le problème de fond est ce manque d’intuitivité a préférer considérer plutot la valeur de ce qui est protégé et donc garanti que la valeur du consommable qui certes a son cout mais qui remis dans le contexte de la perte d’un batiment majeur : Est finalement très relatif et donc pas si onéreux …

      • Avekoucenzeh dit :

        Pour exprimer « et même », l’adverbe « voire » (dont c’est le sens) convient parfaitement, mais aucunement le verbe « voir ».

        À hauteur de 2-3, voire 4 millions d’euros.

    • Niko dit :

      Contrairement à Shahed vs Aster, cette fois c’est toujours rentable!

  13. Gallard dit :

    A l’époque (dans les années 1970) ce n’était pas la DCN mais la DCAN. D’autre part, et de toute façon, l’établissement qui conçu et fabriqué ladite torpille F17 c’était l’ECAN de St-Tropez.