La Moldavie a reçu un radar de surveillance aérienne GM 200, fourni par le français Thales

À peine indépendante à l’égard d’une Union soviétique en voie d’implosion, en 1991, la Moldavie dut faire face à la sécession de la Transnistrie, majoritairement russophone. Ce qui donna lieu à un conflit qui prit fin un an plus tard, avec l’intervention de la XIVe armée russe et la signature d’un accord aux termes duquel Chisinau acceptait d’accorder une large autonomie à la région séparatiste et renonçait à tout rapprochement avec la Roumanie, en échange de la « neutralité » de la Russie.

Seulement, devenue la « république moldave du Dniestr », la Transnistrie proclama son indépendance tout en revendiquant sa proximité avec la Russie, qui y maintint une présence militaire. Puis, malgré un fort courant pro-russe au sein de sa population, la Moldavie amorça un rapprochement avec l’Otan et l’Union européenne [UE], au grand dam du Kremlin, accusé de chercher à la déstabiliser via des opérations d’influence. Cette pression russe sur Chisinau s’est surtout accentuée depuis le début de la guerre en Ukraine.

Quoi qu’il en soit, malgré ce conflit « gelé » concernant la Transnistrie, que Moscou n’a nullement l’intention de lâcher, l’UE a décidé, le 14 décembre, d’ouvrir des négociations d’adhésion avec la Moldavie et l’Ukraine ainsi que d’accorder le statut de candidat à la Géorgie.

Même si le processus s’annonce [très] long, cette décision est « une victoire pour nous. […] Il y a deux ans, personne n’aurait imaginé un tel scénario », a alors réagi Maia Sandu, la présidente de la Moldavie.

Mais la Russie a sans doute un autre scénario en tête… Cette adhésion de l’Ukraine et de la Moldavie « va déstabiliser l’Union européenne » car ces pays « n’en remplissent pas les critères », a commenté Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin. Et d’ajouter que cette ouverture des négociations avec Kiev et Chisinau ainsi que l’octroi du statut de candidat à Tbilissi n’avaient pour seul « but que de nuire à la Russie ».

Deux semaines plus tôt, lors d’un discours prononcé devant le conseil de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe [OSCE], le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, s’était montré plus « menaçant », après avoir évoqué un plan proposé par la Russie en 2003 afin de régler le conflit entre la république de Dniestr et la Moldavie [le « mémorandum Kozak »].

« Le mémorandum Kozak, qui aurait pu résoudre de manière durable la situation en Moldavie il y a 20 ans, est l’une des tentatives avortées de résoudre des problèmes urgents sur notre continent sur la base des principes de l’OSCE. […] Le document a été torpillé par l’OTAN et l’UE à l’époque », avait en effet accusé M. Lavrov. Et d’ajouter : Après l’Ukraine, la « Moldavie est désormais destinée à devenir la prochaine victime de la guerre hybride déclenchée par l’Occident contre la Russie ».

Cela étant, Chisinau n’a pas les moyens de faire face à de telles menaces. Déjà, en mai 2022, le président du Conseil européen, Charles Michel, avait estimé que la Moldavie « devait être soutenue militairement » pour contrer « d’éventuelles actions de déstabilisation, voire une menace contre son intégrité territoriale ».

Certains États membres de l’UE ont depuis pris l’engagement de renforcer les modestes forces armées moldaves. Récemment, celles-ci ont par exemple reçu des véhicules blindés de transport de troupes Piranha III acquis par l’Allemagne auprès du Danemark. Quant à la France, elle n’est pas en reste, un avion de transport A400M de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] ayant récemment acheminé à Chisinau un « premier lot d’aide militaire », comprenant des équipements individuels, des « armes d’infanterie » et des munitions.

Pour rappel, en septembre, la France et la Moldavie ont signé une lettre d’intention afin de renforcer leur coopération militaire. C’est d’ailleurs dans le cadre de celle-ci que Chisinau a confirmé l’achat d’un radar de surveillance aérienne Ground Master 200 auprès du groupe français Thales.

« Au-delà, nous allons conduire un audit des moyens de défense aérienne pour aider à renforcer la sécurité du ciel moldave », avait expliqué Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, assurant que la France allait continuer « de se tenir aux côtés des Moldaves face à toute tentative de déstabilisation ».

Cet audit de la défense aérienne moldave a-t-il été mené? En tout cas, le radar GM 200 a déjà été livré. C’est en effet ce qu’a annoncé le ministère moldave de la Défense, le 20 décembre.

« L’Armée nationale a reçu un système de surveillance aérienne. Il est récemment arrivé à Chisinau par avion. Ce radar a été financé par le budget de la défense nationale et commandé à la société française Thales, qui a fourni un soutien informationnel et logistique », a-t-il ainsi indiqué.

« Dans le contexte sécuritaire actuel, la sécurité de nos citoyens est une priorité. Les dernières violations de l’espace aérien de notre pays ont rappelé aux autorités la nécessité urgente de renforcer nos capacités de défense. Ce système […] permettra d’assurer la surveillance de l’ensemble de l’espace aérien du pays », a fait valoir Anatolie Nosatîi, le ministre moldave de la Défense.

Pour rappel, le GM 200 a la capacité de détecter et de suivre simultanément des objectifs évoluant à basse et à très haute altitude, dans tous les types d’environnements. Comme l’explique Thales, « basé sur l’architecture éprouvée du GM400α, il assure la coordination des systèmes de défense aérienne, allant des systèmes VSHORAD à très courte portée, jusqu’aux systèmes SHORAD à courte portée ».

Quoi qu’il en soit, si elles auront très prochainement la capacité de détecter les violations de l’espace aérienne qu’elles sont chargées de protéger, les forces armées moldaves n’ont plus aucun moyen d’intervention, notamment depuis que les avions de combat MiG-29 qu’elles possédaient dans les années 1990 ont tous été revendus, faute de pouvoir les entretenir. Désormais, leurs moyens aériens reposent sur une poignée d’hélicoptères Mil Mi-8.