Sahel : Le Burkina Faso et la Russie parlent de renforcer leur coopération militaire

Quel sera désormais le rôle du groupe paramilitaire russe Wagner en Centrafrique, au Mali et en Libye, maintenant que ses trois principaux dirigeants, à savoir Evguéni Prigojine, Dmitri Outkine et Valeri Chekakov, ne sont plus de ce monde, après la chute de l’avion dans lequel ils se trouvaient, le 23 août?

Exactement deux mois plus tôt, et alors que l’avenir de Wagner semblait incertain après sa mutinerie contre les responsables du ministère russe de la Défense, Fidèle Gouandjika, ministre conseiller spécial du président centrafricain Faustin Archange Touadéra, avait assuré que la coopération militaire entre Bangui et Moscou ne serait nullement remise en cause

« La République centrafricaine [RCA] a signé [en 2018] un accord de défense avec la Fédération de Russie et non avec Wagner. la Russie a sous-traité avec Wagner, si la Russie n’est plus d’accord avec Wagner alors elle nous enverra un nouveau contingent », avait en effet rappelé M. Gouandjika, dans un entretien à l’AFP. « L’affaire entre Evguéni Prigojine et [le président] Vladimir Poutine ne nous regarde pas, c’est une affaire interne à la Russie », avait-il continué. Et d’ajouter : En Centrafrique comme ailleurs, Wagner va peut-être changer de chef mais ses combattants continueront d’opérer pour le compte de la Russie ».

À la même époque, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, avait assuré que Wagner poursuivrait ses activités en Afrique. « La RCA et le Mali ont demandé à la société Wagner d’assurer la sécurité de leurs dirigeants. […] En plus de ces relations avec l’organisation Wagner, [leurs] gouvernements ont des contacts officiels avec le nôtre. À leur demande, plusieurs centaines de militaires travaillent, par exemple en RCA, en qualité d’instructeurs », avait-il expliqué.

En attendant, la succession d’Evguéni Prigogine semble se préciser… Deux jours après sa mort, le chef du Kremlin a signé un décret visant à obliger toutes les organisations paramilitaires – dont évidemment Wagner – à prêter serment à la Russie ainsi qu’à « suivre strictement les ordres des commandants et des supérieurs »… comme le font les soldats des troupes régulières.

Et le général Andreï Averianov, connu pour avoir supervisé des opérations de déstabilisation et de subversion en Europe quand il était le chef de l’unité 29155 du GRU [renseignement militaire] serait pressenti pour prendre la direction de Wagner. D’ailleurs, selon les États-Unis, il ne serait pas étranger à la disparition de Prigojine… En outre, il a été repéré lors du sommet Russie-Afrique, organisé en juillet à Saint-Pétersbourg.

Justement, lors de cet évènement, le capitaine Ibrahim Traoré, le chef de la junte au pouvoir au Burkina Faso après un nouveau putsch fomenté en septembre 2022, a discuté d’une éventuelle coopération militaire avec M. Poutine. Et cela alors que Ouagadougou avait exigé – et obtenu – le départ des forces spéciales françaises en janvier dernier, et que, à plusieurs reprises, des rumeurs ont fait état de l’arrivée de Wagner dans le pays, qui, par ailleurs, est considéré comme le « maillon faible » de la lutte contre les groupes terroristes présents au Sahel.

Cela étant, les contours de cette coopération militaire entre le Burkina Faso et la Russie se précisent peu à peu. En effet, le 31 août, une délégation emmenée par Iounous-bek Evkourov, le vice-ministre russe de la Défense, a été reçu par le capitaine Traoré à Ouagadougou.

Les échanges ont porté sur « les domaines de coopération qui concernent en premier lieu le secteur militaire, dont la formation de soldats et d’officiers de tous niveaux, notamment des pilotes en Russie », a fait savoir la présidence Burkinabè, via un communiqué. Celle-ci n’a cependant pas précisé si des éléments des forces russes seraient déployés au Burkina Faso.

Mais puisqu’il est question de former des « pilotes », on peut s’attendre à ce que la Russie livre aux forces du Burkina des aéronefs [hélicoptères, avions d’attaque L-39 « Albatros », etc] comme elle l’a déjà fait avec le Mali, l’an passé.

À noter que le vice-ministre russe de la Défense avait été reçu par le maréchal Khalifa Haftar, « l’homme fort » de l’est libyen, le 22 août. Les discussions ont porté sur la « coopération » et la « coordination » en matière de « formation » et de « maintenance des armes et équipements russes que possède le commandement général », avait résumé le colonel Ahmad al-Mesmari, le porte-parole de l’Armée nationale libyenne.

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