Berlin envisage de passer une importante de commande de chars Leopard 2A8 auprès de Krauss-Maffei Wegmann

Devant les députés de la commission de la Défense, la semaine passée, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a fait part de son inquiétude au sujet du retard pris par le programme franco-allemand MGCS [Main Ground Combat System / Système principal de combat terrreste], dans le cadre duquel un nouveau char de combat doit être développé afin de remplacer les Leclerc et les Leopard 2.

Pour rappel, ce projet sous direction allemande est bloqué à la phase d’architecture dite SADS Part 1, lancée en 2020. Et cela en raison de désaccords sur les choix technologiques et le partage des tâches entre les industriels concernés. En outre, l’arrivée du groupe Rheinmetall dans ce programme, imposée par la partie allemande, a bousculé les équilibres dans la mesure où la co-entreprise KDNS, formée par Nexter et Krauss-Maffei Wegmann, devait initialement tenir un rôle prépondérant.

En tout cas, M. Lecornu a raison d’être inquiet… Selon l’édition allemande du magazine Capital, un rapport confidentiel remis à la commission du Budget du Bundestag [chambre basse du Parlement allemand, nldr], estimerait que l’objectif de voir se concrétiser le MGCS d’ici 2035 « n’est plus réalisable ». Et d’avancer que les « questions précédemment controversées » ne pouvaient « toujours pas être réglées », notamment dans quatre des huits « domaines technologiques » cruciaux, à commencer par celui de l’armement du futur char.

Quoi qu’il en soit, ce rapport fait écho aux propos qu’ont pu récemment tenir des sources industrielles allemandes et dont l’hebdomadaire économique « Wirtschaft Woche » s’est fait l’écho. Ainsi, pour celles-ci, le développement d’un nouveau char n’est pas une priorité dans la mesure où, actuellement, le Leopard 2A7+ engrange les commandes et qu’il a du potentiel pour évoluer.

« Le Leopard 2 restera probablement un produit de choix pendant un certain temps », a même estimé Susanne Wiegand, la Pdg du groupe Renk, qui produits certains composants du char allemand. Pour autant, cela n’empêcherait pas la poursuite du programme MGCS, le char de combat ne devant être qu’un « système » parmi d’autres [robots, drones, capteurs, etc].

Un autre signe peu encourageant pour l’avenir de ce char franco-allemand du « futur » est la commande qu’envisage de notifier Berlin à Krauss-Maffei Wegmann.

Ainsi, d’après des informations d’Europäische Sicherheit & Technik [ESUT], les 18 Leopard 2A6 cédés par la Bundeswehr à l’armée ukrainienne devraient être remplacés par autant de Leopard 2A8 [et non des Leopard 2A7+ comme précédemment avancé], via un accord-cadre contenant des « options pour la livraison d’un nombre à trois chiffres de chars de combat du même type ».

« Pour la première fois depuis 1992, […] la Bundeswehr recevra des chars de combat entièrement nouveaux à partir du milieu des années 2020 », avance ESUT.

Doté d’une nouvelle motorisation et de systèmes de protection active, ce Leopard 2A8 sera développé à partir du Leopard 2A7HU, commandé à 44 exemplaires par la Hongrie en 2018. Il devrait servir de marche-pied version plus évoluée.

Évidemment, et si cette orientation se confirme, le projet de char franco-allemand n’aura d’intérêt que pour Paris… qui devra alors trouver une autre solution pour le remplacement de ses Leclerc, dont 160 [sur 200 initialement prévus] seront revalorisés d’ici 2030. Par ailleurs, Rheinmetall en sera aussi pour ses frais avec son KF-51 « Panther », dévoilé l’an passé, lors du salon EuroSatory. De même que le démonstrateur E-MBT, développé conjointement par Nexter et Krauss-Maffei Wegmann.

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