L’armée de l’Air & de l’Espace va renoncer à une partie de ses avions légers de surveillance et de renseignement

À chaque projet de Loi de programmation militaire [LPM] est associé un rapport dans lequel sont précisés les formats des forces armées, leurs contrats opérationnels ainsi que les « cibles » des principaux programmes d’armement.

En règle générale, un tel document est assez complet et précis. Ce qui n’est pas le cas de celui mis en annexe du projet de LPM 2024-30… Ainsi, au sujet des capacités spatiales, le rapport a visiblement oublié que, depuis novembre 2021, la France dispose de satellites dédiés au renseignement électromagnétique, en l’occurrence les trois engins de la constellation CERES [pour CapacitÉ de Renseignement Électromagnétique Spatiale]… En revanche, le programme CELESTE [pour Capacité ELEctromagnétique SpaTiaLE], qui doit prendre le relais en 2030, a été mentionné.

Le rapport est par ailleurs confus au sujet des navires de surface dits de premier rang… Ou, plus précisément, on ne sait plus s’il faut ranger les frégates de type La Fayette rénovées parmi ceux-ci ou… avec les patrouilleurs… Puisque, en 2030, trois d’entre-elles viendront compenser les patrouilleurs océaniques [ou hauturiers] dont la commande sera décalée, après avoir été comptées avec les huit frégates multimissions [FREMM] et les deux frégates de type Horizon.

D’autres programmes ne sont pas cités, comme ceux relatifs au Véhicule blindé d’aide à l’engagement [VBAE] ou encore au renouvellement des camions tactiques et logistiques de l’armée de terre. Et c’est aussi le cas des hélicoptères d’attaque Gazelle, dont 87 exemplaires étaient en service au 1er juillet 2021 [*].

L’Aviation légère de l’armée de Terre [ALAT] doit les remplacer par 80 Guépard, issus du programme « hélicoptère interarmées léger » [HIL], lequel est évoqué au titre des « capacités interarmées » pour préciser que 20 appareils devront avoir été livrés en 2030 [et 70 en 2035]. Par ailleurs, le rapport fait état des 67 Tigre, sans donner de détail sur leur passage au standard Mk3.

En outre, l’ALAT devrait perdre une quinzaine d’hélicopères de manoeuvre entre 2023 et 2030. À cette échéance, sa flotte se composera de 63 NH-90 TTH, de 24 Cougar et de 18 NH-90 TTH en version « forces spéciales » [soit 8 de plus qu’initialement prévu]. Ce qui suggère que ses 8 Caracal seront transférés à l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE].

S’agissant de cette dernière, le rapport confirme qu’elle devra se contenter de 137 chasseurs bombardiers Rafale en 2030… alors que l’ambition opérationnelle 2030 affichée par l’actuelle LPM en prévoyait 185 à cette échéance. Aussi, le « tout Rafale », pourtant annoncé par le président Macron en janvier dernier, ne sera pas effectif d’ici 2035… Le nombre de Mirage 2000D revalorisés a également été revu à la baisse, passant de 55 à 48 appareils.

Par ailleurs, sur les 50 avions de transport A400M « Atlas » attendus, l’armée de l’Air devra se contenter « d’au moins » 35 exemplaires à l’horizon 2035. Et cela, même si, comme l’a souligné Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, cet appareil est « absolument formidable ». Et d’ajouter, devant les députés, ce 5 avril : « Quand on voit ses capacités d’élongation et d’emport, c’est un énorme changement » qui permet de réduire les forces prépositionnées en Afrique.

« On ne remet pas en cause la cible à 50. La proposition que je vous fais, c’est au moins 35. J’ai des discussions avec Airbus et avec [nos] partenaires […] sur l’exportation. […] Dans l’amicale pression que je mets aux industriels, je reste persuadé qu’il faut mettre le paquet sur l’export de l’A400M. C’est un moyen aussi de finir le programme. […] Mais si on un retournement des facteurs [une inflantion moindre que prévu, ndlr], alors on pourrait peut-être aller un peu plus que 35, parce que les usages de l’A400M sont là, ils existent et sont évidemment importants », a ensuite développé le ministre.

Enfin, l’AAE devra faire une croix sur la poursuite de son programme d’avion léger de surveillance et de renseignement [ALSR, encore appelé VADOR, pour « Vecteur aéroporté de désignation, d’observation et de reconnaissance »]. Elle en dispose actuellement de deux exemplaires, sur les huit prévus initialement. Pour rappel, un troisième a été confirmé à la faveur du plan de soutien à la filière aéronautique, dévoilé en juin 2020. Et selon le rapport annexé, qui ne livre aucune explication, il n’est pas question d’aller plus loin.

Confié à Thales et à Sabena Technics en 2016, le programme ALSR, qui consisté à intégrer des des capteurs pour collecter du renseignement d’origine électromagnétique [ROEM] et du renseignement d’origine image [ROIM] à bord d’un Beechcraft King Air 350, a connu quelques difficultés, le choix de la boule optronique Star Saphire s’étant révélé peu judicieux.

En revanche, le programme Archange, qui vise à remplacer les Transall C-160G « Gabriel » dédiés à la guerre électronique par trois Falcon 8X a été confirmé. Quant aux drones MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance], susceptible d’emporter une nacelle de renseignement électro-magnétique, le rapport entérine le retrait des MQ-9 Reaper à l’horizon 2035, au profit de six systèmes EuroMale, soit deux de plus que prévu au départ.

[*] Dernier chiffre disponible, l’édition 2022 des « Chiffres clés de la Défense » n’ayant pas été publiée l’an passé.

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