Des moteurs d’A400M immobilisés faute d’une documentation technique à jour

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Souvenez-vous, en octobre dernier, l’on s’étonnait du recours à un avion de transport Antonov AN-70 pour effectuer une « tournée logistique » au profit des forces armées françaises alors que ces derniers auraient pu tout aussi bien faire appel à l’un de ses sept A400M Atlas.

Et l’étonnement pouvait être encore plus grand quand, justement, l’AN-70 se pose en concurrent direct de l’A400M à l’exportation. Pourquoi, dans ces conditions, lui avoir offert l’opportunité de démontrer ses capacités à l’occasion de cette « tournée logistique »?

La réponse se trouve sans doute dans le rapport [pdf] remis la semaine dernière par les députés Alain Marty (LR) et Marie Recalde (PS) sur « les conséquences du rythme des opérations extérieures sur le maintien en condition opérationnelle des matériels »…

Ainsi, l’on apprend, à la lecture de ce document, que « des blocages ont (…) été constatés sur les moteurs TP-400 équipant les A400M ».

Et le rapport de préciser : « Suite à des pannes survenues au mois d’octobre 2014, les moteurs étaient entrés dans le cycle SIAé [ndlr, Service industriel de l’aéronautique] au mois de novembre. En théorie, ces éléments auraient pu être réparés dans un délai de 90 jours. Or, la documentation fournie par l’industriel n’étant pas à jour, l’AIA [Atelier industriel de l’aéronautique de Bordeaux] ne disposait pas des pièces adéquates pour effectuer les opérations nécessaires ».

« De fait, au mois de juillet 2015, les moteurs se trouvaient toujours en atelier, leur immobilisation excédant donc de six mois le délai théorique de réparation », ont écrit les deux rapporteurs.

En clair, le constructeur de l’A400M, en l’occurrence Airbus Military, n’a pas fourni la bonne documentation à son client. C’est un peu comme si Microsoft donnait le mode d’emploi de Windows Vista pour Windows 10.

Ce détail n’a pas échappé au député François Cornut-Gentille, qui a vivement réagi à cette information. « Ainsi, apprend-on, avec stupeur et surtout colère, qu’Airbus a transmis une documentation périmée aux armées relativement aux moteurs des A400M, entraînant des retards de plusieurs mois pour leur maintenance. Or ces retards ont un coût. Désormais se pose la question de la responsabilité d’Airbus et de l’armée de l’Air dans cette défaillance majeure », a-t-il écrit sur son site Internet.

Par ailleurs, le rapport de Mme Recalde et de M. Marty soulève une autre question, à savoir celle de l’avenir du transport stratégique, déplorant au passage le manque de capacités « en propre » dans ce domaine.

« Si nos forces étaient dotées d’avions A400M capables de se poser sur des terrains sommaires, l’efficacité de la boucle logistique serait grandement améliorée », ont-ils estimé.

« La possession de cette capacité permettrait en outre de réduire notre dépendance à l’égard de capacités extérieures caractérisées, notamment par le recours à la flotte d’Antonov, dont le coût à l’heure de vol oscille entre 40 000 et 50 000 euros. Or cette flotte ne compte que 22 appareils au monde, sachant que lors du déclenchement de l’opération Serval, l’armée avait loué dix appareils par jour », ont fait valoir les deux députés.

Qui plus est, ont-ils ajouté,  « les Antonov sont vieillissants et arriveront en fin de vie à l’horizon d’une quinzaine d’années, ce qui placera alors l’armée française dans une situation de dépendance vis-à-vis de nos partenaires, anglo-saxons notamment. »

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