Le chef militaire autoproclamé des anti-balaka défie la présidente centrafricaine de transition

La présidente centrafricaine de transition, Catherine Samba Panza, qui a succédé à Michel Djotodia, porté au pouvoir par la coalition rebelle de la Séléka, a tenu des propos très durs, le 12 février, aux côtés de Jean-Yves Le Drian, le ministre français de la Défense, au sujet des milices anti-balakas, lesquelles se livrent à de nombreux exactions visant en particulier les populations musulmanes du pays.

« Les anti-balaka, on va aller en guerre contre eux. (Ils) pensent que parce que je suis une femme je suis faible. Mais maintenant les anti-balaka qui voudront tuer seront traqués », a-t-elle ainsi affirmé. La veille, M. Le Drian avait évoqué la nécessité de faire respecter les résolutions des Nations unies, « au besoin par la force ». Et le chef de l’opération Sangaris, le général Soriano, n’avait pas mâché ses mots, quelques heures plus tôt, en qualifitant les miliciens de « hors-la-loi et de bandits », devenus « les principaux ennemis de la paix en Centrafrique ».

Ces propos n’ont pas manqué de faire réagir les chefs autoproclamés des milices anti-balaka, dont on ignore exactement l’organisation mais dont on suppose qu’elles sont infiltrées par d’anciens partisans de l’ex-président Bozizé (renversé en mars 2013 par la Séléka, ndlr). Rassemblés, le 13 février, dans leur fief du quartier de Boy-Rabe, au nord de Bangui, ils ont défié la présidente Samba Panza.

« Déclarer la guerre aux anti-balaka, c’est déclarer la guerre à la population centrafricaine », a ainsi lancé Richard Bejouane, qui prétend être leur chef auto-proclamé, devant une centaine de miliciens.

Ce dernier a également indiqué que les miliciens anti-balaka seraient au moins 52.000, dont 12.000 rien qu’à Bangui. Ce chiffre paraît fantaisiste dans la mesure où le coordonnateur politique, également auto-proclamé, de ces milices, Patrice Edouard Ngaissona, avait avancé, en début de semaine, le nombre de 70.000.

« Nous sommes prêts à être cantonnés », a poursuivi Richard Bejouane. Comme l’ont été les combattants de l’ex-Séléka, du moins une partie, à Bangui. Le cantonnement est la première étape du programme DDR (Démobilisation, Désarmement, Réinsertion), qui prévoit une prise en charge financière.

Un autre responsable anti-balaka, Emotion Brice Namsio, un ancien douanier se présentant comme étant le porte-parole de ce « mouvement », a donné les raisons pour lesquelles les miliciens demandent à être cantonnés. « Ces braves ont fait 500 ou 800 km pour chasser Djotodia et ses mercenaires et on ne reconnaît pas leurs efforts! Les Séléka, eux, sont cantonnés, on leur a laissé leurs armes (ndlr, une chacun) et on leur donne à manger! Et nous, on voudrait qu’on rende nos armes et qu’on rentre chez nous sans rien! », a-t-il lancé.

« La présidente doit avoir la sagesse de nous réunir tous dans un processus de paix, ajoute-t-il, assurant ne pas croire à sa déclaration de guerre. Notre ‘maman’ va se ressaisir », a-t-il aussi affirmé avant d’anoncer que les « vrais » miliciens anti-balaka seront bientôt munis d’une « carte d’identification » pour les différencier des pillards.

Car pour le commandant 12 puissances (ne riez pas…), habituellement affublé de grigris et d’épingles à nourrice, les anti-balakas « ne sont pas des voyous, pas des bandits ». Ce sont, a-t-il expliqué, des « des combattants de la paix » et des « engagés volontaires » pour la Centrafrique. « Et aujourd’hui, on veut nous traiter de salauds ce n’est pas normal! », s’est-il indigné.

Reste que ce plaidoyer risque de ne pas convaincre le général Soriano. « Les cantonner, ce serait leur donner une légitimité qu’ils n’ont pas, ce serait leur donner la possibilité de devenir une force qu’ils ne sont pas au service d’un sombre dessein », a-t-il affirmé en début de semaine, au sujet des anti-balaka.

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