Le président Hollande veut accélérer le déploiement de casques bleus en Centrafrique

La situation en Centrafrique devient très compliquée en raison du cycle de représailles auxquelles se livrent les milices anti-balaka et les combattants de l’ex-Séléka et dont les populations civiles sont les seules victimes. Pour plusieurs ONG, l’expression « épuration éthnique » n’est plus taboue. Et pour les Nations unies, le risque est d’assister à une partition du pays, voire à un génocide.

Quant aux militaires français engagés dans l’opération Sangaris, lancée en Centrafrique le 5 décembre dernier, leur mission est d’autant plus difficile qu’ils se retrouvent interposés entre deux camps qui se haïssent au point de commettre des exactions horribles, comme l’a souligné Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef).

« Ces dernières semaines ont été marquées par des niveaux de violence sans précédent contre les enfants lors d’attaques sectaires et de représailles menées par les milice anti-balaka et d’ex-combattants Séléka », a expliqué l’Unicef.

« Au moins 133 enfants ont été tués et mutilés, certains d’une manière particulièrement horrible, alors que la violence ethno-religieuse ne cesse de s’intensifier depuis deux mois. L’Unicef a ainsi vérifié les cas d’enfants décapités et mutilés intentionnellement et sait que des enfants blessés lors de fusillades ont dû se faire amputer parce que l’insécurité les a empêchés de se rendre à l’hôpital à temps pour un traitement », a affirmé Manuel Fontaine, son directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest et centrale.

La question des effectifs des forces internationales présentes dans le pays, que ce soit dans le cadre de l’opération Sangaris (1.600 militaires) et celui de la Mission internationale de soutien à Centrafrique (près de 6.000 hommes), a récemment été posée par Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies.

S’agissant des forces françaises, leur format en RCA a déjà fait l’objet de débats. Pour certains, il est insuffisant pour arriver à pacifier un pays grand comme la France. « Il n’y en aura pas davantage, cela suffira », avait affirmé le président Hollande, au sujet des effectifs de l’opération Sangaris lors d’un entretien accordé à France 24, le 8 décembre.

Quoi qu’il en soit, Ban Ki-moon a déclaré, le 11 février, avoir demandé « à la France d’envisager le déploiement de troupes supplémentaires » afin de faire face à la situation en Centrafrique. Ce à quoi le ministère français des Affaires étrangères a répondu qu’une mission des Nations unies « devrait prendre le relais des françaises, africaines et européennes avant la fin du premier semestre » afin de permettre « les ajustements nécessaires en termes d’effectifs ».

Depuis, la position française n’a pas bougé d’un iota. Selon un communiqué publié par l’Elysée à l’issue d’un entretien téléphonique entre le président Hollande et le secrétaire général de l’ONU, Paris a une nouvelle fois demandé « d’accélérer l’envoi de Casques bleus en Centrafrique ».

« Le Conseil de Sécurité a fixé un mandat clair, qui doit être mis en oeuvre rapidement et fortement. Il s’agit notamment d’accélérer la préparation d’une opération de maintien de la paix, en partenariat étroit avec l’Union africaine », affirme le texte. « Il s’agit aussi de restaurer l’autorité de l’Etat, sous la présidence de Mme Samba Panza et d’aider le gouvernement centrafricain à préparer les élections », a ajouté l’Elysée (ce qui ne sera pas une mince affaire…) en appelant la commission d’enquête internationale  » à « entamer ses travaux sans délai, pour rendre compte des exactions et lutter contre l’impunité ».

Seulement, dans un précédent rapport, Ban Ki-moon avait estimé qu’il faudrait au moins 10.000 casques bleus pour rétablir la sécurité en Centrafrique. En l’état actuel des choses, si la Misca passait sous un mandat de l’ONU, le compte n’y serait pas. Ce qui pose la question des contributions. Et là, ce n’est pas gagné… Il suffit de voir ce qu’il se passe pour la mission européenne EUFOR RCA/Bangui, où la Géorgie a été appelée à la rescousse alors qu’elle ne fait pas partie de l’UE.

Les propos de diplomates et de politiques en poste à Bruxelles rapportés par Le Figaro de ce 14 février sont éloquents. Ils « avancent en privé une série de maladresses commises à Paris », écrit le quotidien, dont celui d’avoir pensé « régler l’affaire aussi vite qu’au Mali », avec « une opération lancée en solo qui débouche sur un appel à l’aide juste avant Noël et, pour finir, de grands alliés qui détournent le regard sur ce qui s’impose chaque jour comme un bourbier humanitaire ». Et de citer un responsable dont l’interrogation résume tout : « Qui, aujourd’hui, a vraiment envie d’aller en Centrafrique? »

A noter que les premières relèves des unités françaises engagées en Centrafrique ont commencé. Selon l’Etat-major des armées (EMA), la 2e compagnie du 126e Régiment d’Infanterie de Brive, partie en Côte d’Ivoire dans le cadre des forces prépositionnées et déployée en RCA à la fin du mois de décembre 2013, a ainsi été remplacée le 10 février par une autre unité qui n’a pas été précisée.

Photo : (c) ECPAD

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