L’armée de Terre évalue l’embarcation STYX pour renforcer ses capacités de combat fluvial

Depuis la fin de la guerre d’Indochine, les forces françaises ont quelque peu négligé leurs capacités en matière d’opérations fluviales, au point que la Marine nationale, par exemple, a abandonné les siennes. Et cela n’a pas été le cas de leurs homologues américaines qui, après leur intervention au Vietnam, ont pu garder les leurs. Ce qui se révéla payant en Irak, où l’US Marine Corps [USMC] déploya des unités spécialisés [ » Small Craft Companies »] à partir de 2004.

Cela étant, en 2014, l’armée de Terre fit l’acquisition de trois Embarcations fluviales de combat [EFC] auprès du constructeur naval Pirenn au profit du commandement des forces spéciales Terre [COM FST].

Communément appelées « STYX », en référence à leur prototype, ces EFC affichent un déplacement de 2,4 tonnes et une longueur de 9,10 mètres. Grâce à leurs deux moteurs hors-bord développant chacun une puissance de 300 cv, elles peuvent atteindre la vitesse de 50 noeuds. Disposant d’un rayon d’action de 300 nautiques, elles peuvent être armées par quatre mitrailleuses.

Pour l’armée de Terre, il s’agit d’aller plus loin. Les opérations au Sahel, notamment autour du fleuve Niger, ont souligné l’importance de disposer des capacités de combat en milieu fluvial. De même que celles menées en Guyane, dans le cadre de l’opération Harpie. Mais pas seulement.

« On estime qu’environ un quart de la population mondiale vit à proximité d’une zone fluviale, ce qui rend ce mode d’action particulièrement pertinent. L’eau est, par ailleurs, en phase de devenir un enjeu primordial dans les relations géopolitiques du XXIe siècle puisque la survie d’un tiers de la population mondiale dépend de cours d’eau transfrontaliers. La défense de cette richesse passe aussi par la maîtrise des fleuves. Enfin, le réseau fluvial d’une zone en crise est un facteur de stabilisation essentiel qui permet à moyen terme de rétablir un semblant d’activité en l’absence de systèmes de communication viables », soulignait Bertrand Lemonnier, auteur d’un mémoire sur le « renouveau de la doctrine fluviale dans les armées du XXIe siècle », en 2016 [.pdf].

D’où la réflexion lancée par l’armée de Terre, via le Centre de doctrine et d’enseignement du commandement [CDEC] et l’École du Génie. Le 6e Régiment du Génie [RG] ainsi que le 1er Régiment Étranger de Génie [REG] ont été désignés pour mener des expérimentations afin de faire évoluer la doctrine en matière de combat fluvial.

Ainsi, via les réseaux sociaux, le 6e RG a indiqué que sa 23e Compagnie d’Appui Amphibie et de Franchissement [CAAF] effectue actuellement une expérimentation consistant à intégrer une embarcation de type STYX à celles « issue du MLF – Moyen léger de franchissement ».

« La puissance et la maniabilité de cette vedette, mais également sa puissance de feux, grâce à 2 MAG 58 et 1 MIT 50, apparaissent comme des caractéristiques clefs de toutes les phases d’appui feux. Le STYX vient ainsi compléter très efficacement les capacités des embarcations légères », explique le 6e RG.

De son côté, le 1er RG accomplit le même travail, mais avec une « vedette Littoral ».

« L’utilisation de ces nouvelles embarcations servira aux nombreuses missions imparties à la doctrine du combat fluvial. Le contrôle et la reconnaissance de zone, la sécurisation d’un point de franchissement, la mise en place de plongeurs de combat du génie, le transport de personnel et de logistique et l’évacuation de ressortissants ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres », explique le 6e RG.

À noter que, comme l’a récemment rappelé l’armée de Terre à l’occasion d’une coopération avec les forces surinamaises, le combat fluvial est « l’une des capacités entretenue et développée » par le 9e Régiment d’Infanterie de Marine [RIMa], basé à Cayenne [Guyane].

« Les fleuves, les lagunes et les lacs constituent des obstacles mais également des voies de communication complémentaires aux axes terrestres, utiles pour se déplacer, s’infiltrer ou encore contrôler des flux. La Guyane comme le Suriname sont recouverts à plus de 90% par la forêt équatoriale. C’est pourquoi leurs axes fluviaux sont indispensables pour pénétrer l’intérieur des terres. La maîtrise de ce milieu est essentielle afin de pouvoir intervenir dans toute la région », avait-elle souligné.

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