La Russie hausse le ton à l’égard de l’Ukraine et de l’Otan

Le 30 novembre, pendant que les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l’Otan se réunissaient à Riga [Lettonie] pour évoquer les importants mouvements de troupes russes aux abords de l’Ukraine observés depuis plusieurs semaines, le chef du Kremlin, Vladimir Poutine, a haussé le ton à l’égard de Kiev, en rappelant les « lignes rouges » de la Russie.

Sans surprise, l’éventuelle adhésion de l’Ukraine à l’Alliance altantique serait un « casus belli » pour la Russie, qui serait alors contrainte de répondre si l’Otan venait à déployer sur le sol de son voisin des systèmes d’armes avancés. « Si de quelconques systèmes de tirs apparaissent sur le territoire de l’Ukraine, le temps de vol jusqu’à Moscou sera de 7 à 10 minutes, ou cinq minutes dans le cas du déploiement d’une arme hypersonique. Imaginez… », a fait valoir M. Poutine, lors d’un forum d’investisseurs organisé par VTB Capital.

En outre, celui-ci a de nouveau dénoncé les manoeuvres militaires organisées par l’Otan près du territoire russe. « La Fédération de Russie éprouve certaines inquiétudes quant au fait que des exercices à grande échelle sont menés près de ses frontières, y compris des exercices non planifiés, comme ce fut le cas tout récemment en mer Noire, lorsque des bombardiers stratégiques ont volé à 20 km de notre frontière. Il peuvent transporter des armes nucléaires. Tout cela constitue une menace pour nous », a-t-il fait valoir.

Quant à la question de savoir si les forces russes se préparaient actuellement à intervenir en Ukraine, M. Poutine a assuré qu’il ne s’agissait « pas de mener ou non des combats » mais de « racommoder les liens » avec Kiev. « Si nous nous efforçons sincèrement d’y parvenir, alors personne ne se sentira menacé », a-t-il ajouté.

Cela étant, le président russe a évoqué la situation dans le Donbass, région située dans le sud-est de l’Ukraine, en proie à des combats entre des séparatistes pro-russes et les forces ukrainiennes depuis maintenant plus de sept ans. « Pour les personnes vivant dans les républiques [autoproclamées et non reconnues, ndlr] de Louhansk et de Donetsk, il y a des menaces constantes, créées quand des unités militaires se déplacent à proximité de leur territoire », a-t-il dit.

Dans le même temps, le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, est allé encore plus loin en affirmant que l’Ukraine représentait une « menace directe ». Ainsi, a-t-il expliqué, « nous ne pouvons pas exclure que le régime de Kiev puisse se lancer dans une aventure militaire ». Et de prévenir : « Si l’Occident [comprendre : l’Otan] n’est pas capable de dissuader l’Ukraine, mais s’il essaye au contraire de l’encourager, alors nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour assurer notre sécurité ».

À Riga, et alors que les États-Unis et le Royaume-Uni venaient à nouveau d’adresser une nouvelle mise en garde à Moscou, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a réaffirmé le soutien « politique » et « pratique » des Alliés à l’Ukraine, qu’il a félicitée « pour sa réponse mesurée aux provocations continues de la Russie ».

« Il n’y a aucune certitude sur les intentions de la Russie. On assiste à une concentration de forces importante et inhabituelle, injustifiée et inexpliquée, accompagné d’un discours agressif et d’une désinformation accrue. Et nous savons que la Russie a déjà utilisé la force contre l’Ukraine et d’autres de ses voisins », a commencé par rappeler M. Stoltenberg, à l’issue de la réunion des ministres des Affaires étrangères.

« Nous restons unis dans notre objectif de dissuader la Russie de toute nouvelle action agressive. Nous appelons la Russie à être transparente, à désamorcer et à réduire les tensions », a-t-il continué, avant de prévenir : « Toute future agression russe contre l’Ukraine aurait un prix élevé et avoir de graves conséquences politiques et économiques pour la Russie ».

Cela étant, ces avertissements répétés n’ont pas l’air d’émouvoir les responsables russes. Ainsi, ce 1er décembre, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a accusé l’Ukraine de renforcer sa présence militaire dans le Donbass.

« L’armée ukrainienne renforce ses capacités militaires, en faisant venir des équipements lourds et du personnel » et « selon certaines informations, le nombre de soldats dans la zone de conflit a déjà atteint 125’000 personnes, « ce qui représente la moitié de ses effectifs », a-t-elle affirmé.

De son côté, M. Lavrov a accusé l’Otan de vouloir « dicter comment les forces armées russes doivent se comporter sur leur propre territoire ». Et d’avertir : Moscou « continuera de répondre à toute démarche inamicale ».

Pour le moment, le gouvernement ukrainien n’a pas réagi aux affirmations de la diplomatie russe. En revanche, ce 1er décembre, il a demandé à l’Otan un « paquet de dissuasion » contre la Russe.

« Nous sommes confiants qu’en conjuguant nos efforts, en agissant de manière coordonnée, nous pourrons dissuader le président Poutine et l’inciter à ne pas choisir le pire des scénarios que représenterait une opération militaire », a déclaré Dmytro Kuleba, le ministre ukrainien des Affaires étrangères.

Dans le même temps, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a lancé un appel au dialogue afin de désamorcer les tensions. « Nous ne pourrons pas arrêter la guerre sans négociations directes avec la Russie », a-t-il en effet déclaré, dans une adresse à la Rada, le Parlement ukrainien.

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