Covid-19 ou pas, les forces chinoises continuent de montrer leurs muscles

Officiellement, la Chine a réussi à juguler l’épidémie de Covid-19, dont la province d’Hubei était encore récemment l’épicentre. Selon les données qu’elle fournit quotidiennement, elle compterait 82.000 malades pour un peu plus de 3.000 décès. Et les quelques nouveaux cas dont elle fait désormais état seraient « importés », ce qui a motivé sa décision de fermer ses frontières aux étrangers.

Le conditionnel est de mise car certains observateurs remettent en cause les chiffres communiqués par Pékin. Après avoir dissimulé l’existence du Covid-19, maladie apparue sans doute en novembre 2019 [voire avant], et cherché à en jeter la responsabilité sur les États-Unis avec des « fausses informations », les autorités chinoises est en effet accusée de minorer le bilan de l’épidémie sur son sol [avoir le nombre de lignes téléphoniques résiliées à Wuhan pourrait donner une idée de la situation…].

Quoi qu’il en soit, depuis février, la Chine cherche à tirer les marrons du feu de la crise sanitaire qui fait rage en Europe et aux États-Unis. Et cela passe par une aide apportée aux pays européens les plus touchés, en particulier l’Italie, qu’elle chercherait à mettre à profit. Aide consistant à l’envoi de combinaisons de protection, de masques et même d’experts médicaux.

Et, le 29 mars, lors de l’émission « Questions politiques », sur les ondes de France Inter, Amélie de Montchalin, secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, a déclaré qu’il est « parfois plus simple de faire de la propagande, des belles images et parfois d’instrumentaliser ce qui se passe », en citant notamment la Chine et la Russie, qui « mettent en scène des choses ».

Mais pendant que le monde est préoccupé par la propagation du SARS Cov-2, le virus responsable de l’épidémie de Covid-19, l’Armée populaire de libération [APL] continue ses activités habituelles dans ses « zones d’intérêt ».

Ainsi, la semaine passée, Taïwan a confirmé qu’un patrouilleur de sa garde-côtière avait été endommagé, deux jours après son entrée en service, par un bateau de pêche chinois… Bateau de pêche qui n’en a que le nom puisque ces navires impliqués dans ce genre d’incident appartiennent en général à une milice maritime chinoise et peuvent donc être utilisés à des fins politiques.

L’incident s’est produit le 16 mars dernier, au large de l’île Kinmen, qui, en 1958, avait été au centre de la seconde crise du détroit de Taïwan.

Par ailleurs, l’aviation militaire chinoises a continué ses démonstrations de force à proximité de l’espace aérien taïwanais. Le 17 mars, Taipeh a indiqué avoir fait décoller, la veille, vers 19 heures, des avions de chasse pour intercepter des chasseurs J-11 et au moins un appareil d’alerte avancée KJ-500.

« Nous avons détecté qu’un groupe d’avions de combat communistes chinois, y compris des avions d’alerte rapide KJ-500 et des chasseurs à réaction J-11, effectuaient un exercice de nuit au-dessus de la mer, au sud-ouest de Taiwan », a en effet expliqué le ministère taïwanais de la Défense.

C’est un « message pour faire savoir que les opérations de l’APL se déroulent comme d’habitude, malgré l’épidémie de coronavirus en Chine continentale », a commenté Alexander, Huang Chieh-cheng, professeur de relations internationales et d’études stratégiques à l’Université Tamkang, dans les colonnes du South China Morning Post.

Cela étant, durant le mois de mars, l’APL a mené d’autres actions, comme un exercice de lutte anti-sous-marine en mer de Chine méridionale, revendiqué dans sa quasi-totalité par Pékin. Selon les médias chinois, il s’agissait a priori d’une « réponse aux patrouilles » de navires américains dans cette région, comme celle effectuée par le destroyer USS McCampbell le 10 de ce mois.

Les forces chinoises ont par ailleurs maintenu un exercice militaire avec leurs homologues cambodgiennes, malgré l’épidémie de Covid-19. De quoi préoccuper le Vietnam, qui a des différents territoriaux avec la Chine. Pour les analystes locaux, ces manoeuvres sino-cambodgiennes « visent à fracturer l’ASEAN [ssociation des nations de l’Asie du Sud-Est] ».

C’est en tout cas le point de vue de Stephen Nagy, professeur en relations internationales à l’Université chrétienne internationale de Tokyo, auprès de VOA News. « En s’incrustant au Cambodge via des missions ou des exercices conjoints, la Chine a trouvé un moyen très efficace d’empêcher les pays membres de l’ASEAN de travailler ensemble, comme ils sont censés le faire », a-t-il dit.

Pour Alan Chong, professeur à la S. Rajaratnam School of International Studies de Singapour, maintenir ces exercices étaient une « façon pour la Chine de dire que les choses reviennent à la normale » et que « le Covid-19 est derrière elle ». Et d’ajouter : « Il lui faut renforcer la légitimité du régime dès que possible. »

Commentant un exercice que venait de mener le porte-avions CNS Liaoning, le 25 mars, le quotidien Global Times, qui suit la ligne éditoriale imposée par le Parti communiste chinois, a affirmé que « l’entraînement et la préparations à la guerre ne seront pas interrompus, même au milieu de l’épidémie de Covid-19.

« La Chine est susceptible d’augmenter son activité militaire au-delà des niveaux normaux », a estimé Oh Ei Sun, chercheur au Singapore Institute of International Affairs, cité par VOA News.

Quoi qu’il en soit, Pékin n’a rien dit sur d’éventuels cas de Covid-19 dans les rangs de ses forces armées. Au contraire des Occidentaux… Les États-Unis, par exemple, n’ayant pas caché que l’épidémie venait de toucher l’équipage du porte-avions USS Theodore Roosevelt.

Mais, l’US Navy a depuis changé son fusil d’épaule, étant donné qu’il n’est désormais plus question de préciser l’unité d’appartenance de ses marins tombés malades [c’est pour cela qu’elle ne souhaite pas confirmer les informations relatives à des cas à bord du porte-avions USS Ronald Reagan, actuellement à quai, au Japon].

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