Washington accuse Damas de préparer une nouvelle attaque chimique

Le régime syrien est-il sur le point de lancer une nouvelle attaque chimiques, notamment après celles qui lui ont été attribuées à la Goutha (août 2013) et à Khan Cheikhoun (avril 2017), cette dernière ayant conduit au tir de 59 missiles de croisière Tomahawk américains contre la base aérienne d’Al-Shayrat? En tout cas, Washington le pense.

« Les Etats-Unis ont identifié de potentiels préparatifs d’une autre attaque chimique par le régime syrien d’Assad qui pourrait provoquer le massacre de civils, y compris des enfants innocents », a en effet indiqué Sean Spicer, le porte-parole de la Maison Blanche, via un communiqué diffusé dans la soirée du 26 juin.

Ces activités « sont similaires aux préparatifs du régime avant son attaque à l’arme chimique du 4 avril », a précisé M. Spicer, sans donner plus de détails. Et de prévenir, après rappelé que l’objectif des États-Unis est d’éliminer Daesh en Syrie : si le président syrien, Bachar el-Assad, lançait une nouvelle attaque chimique, alors « lui et son armée paieraient le prix fort ».

Cette accusation sur des préparatifs d’une attaque chimique et cet avertissement lancé par Washington font suite à une montée des tensions observées ces dernières semaines, notamment dans le secteur d’At-Tanf, où des avions américains ont détruit deux drones de fabrication iranienne et frappé les forces pro-régime parce que jugées menaçantes pour les forces spéciales de la coalition présentes aux côtés d’une faction de l’Armée syrienne libre (ASL) engagée contre l’État islamique (EI ou Daesh). En outre, le 18 juin, un F/A-18E Super Hornet de l’US Navy a abattu un Su-22 syrien qui venait d’attaquer les Forces démocratiques syriennes au sud de Tabqa.

Ces incidents ont été vivement dénoncés et condamnés par l’Iran et la Russie, soutiens indéfectibles du président syrien.

« Toute nouvelle attaque lancée à l’encontre de la population syrienne sera attribuée à Assad, mais également à la Russie et à l’Iran qui l’ont aidé à tuer son propre peuple » a ainsi prévenu, de son côté, Nikki Haley, la représentante américaine auprès des Nations unies.

Cela étant, de l’avis des observateurs de la vie politique américaine, cités par le site Politico, ce message de la Maison Blanche est « très inhabituel » et reflète « à la fois la confiance dans les informations du renseignement suggérent qu’une nouvelle attaque serait imminente et une volonté de prendre des mesures militaires » si le régime syrien passait outre cet avertissement « public », lequel vise à envoyer le message que les représailles américaines après l’attaque chimique de Khan Cheikhoun n’étaient « pas un événement ponctuel ».

Spécialiste du contrôle des armements et de la non-prolifération et ancien membre du Conseil de la sécurité nationale de la Maison Blanche durant le second mandat de Barack Obama, Jon Wolfsthal estime que l’administration Trump a gros à perdre sur la plan de la crédibilité.

« Il peut y avoir de graves conséquences. Nous disons que nous vous surveillons […] alors ne le faites pas [lancer une attaque chimique, ndlr] » et si Damas passe outre, alors « les États-Unis devraient répondre. Sinon, cela soulèvera de sérieux problèmes de crédibilité », a-t-il dit. Qui plus est, cette déclaration pose aussi la question de savoir si les services de renseignement américains sont sûrs de leurs informations concernant les activités syriennes. « Et si on se trompe? », a demandé M. Wolfsthal. « Pour que la Maison Blanche émette un message comme celui-ci, c’est que les enjeux sont assez élevé », a-t-il ajouté.

L’éventualité d’une nouvelle attaque chimique en Syrie concerne également Paris. La semaine passée, dans un entretien donné à 8 journaux européens, le président Macron avait affirmé qu’il s’agissait pour lui d’une « ligne rouge » dont le franchissement donnerait lieu à « des répliques, y compris de la France seule. » Et d’ajouter : « S’il est avéré que des armes chimiques sont utilisées sur le terrain et que nous savons en retracer la provenance, alors la France procédera à des frappes pour détruire les stocks d’armes chimiques identifiés. »

Quoi qu’il en soit, si jamais le régime syrien lance une nouvelle attaque au gaz neurotoxique, les États-Unis devront « taper fort » puisqu’ils ont assuré qu’ils le feraient le cas échéant.

Et cela risque donc d’accroître les tensions avec la Russie et l’Iran, ce qui compliquerait davantage le combat contre les groupes jihadistes et l’EI en particulier. Pour rappel, après l’affaire du Su-22 syrien abattu par un F/A-18E, l’état-major russe a prévenu que tout avion de la coalition évoluant au-dessus de la Syrie pourrait être considéré comme une cible…

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]