Renseignement : Le français Preligens dévoile une nouvelle solution d’IA pour l’imagerie satellitaire radar

Fondée en 2016 sous le nom de « Earthcube », la société Preligens propose des solutions permettant d’identifier automatiquement des matériels militaires et/ou de repérer tout mouvement inhabituel sur des sites d’intérêts grâce à des photographies prises par satellite soumises à des algorithmes d’intelligence artificielle [IA]. Ayant très vite suscité l’intérêt de la Direction du renseignement militaire [DRM], elle a été soutenue par le ministère des Armées, via notamment son fonds Definvest, géré par Bpifrance, alors qu’elle était convoitée par In-Q-tel, le fonds d’investissement de la CIA.

En 2022, la Direction générale de l’armement [DGA] notifia à Preligens un contrat-cadre d’une valeur maximale de 240 millions d’euros sur sept ans, au titre du programme TORNADE [Traitement Optique et Radar par Neurones Artificiels via Détecteur], mené au profit de la DRM ainsi qu’à celui d’autres unités « tournées vers les opérations », comme le Commandement des opérations spéciales [COS] et le Commandement de la cyberdéfense [COMCYBER].

On aurait pu penser que l’avenir financier de l’entreprise allait être assuré. Seulement, selon le quotidien Les Échos [édition du 18 mars], le ministère des Armées n’a pas reconduit deux « contrats clés » dans l’imagerie radar et optique, « faute de moyens ou d’intérêt d’emploi ». Or, ils représentaient près de la moitié du chiffre d’affaires de Preligens. Afin de disposer des moyens nécessaires à son développement [et à sa pérennité], cette « pépite technologique » s’est mise en quête d’un repreneur, qui pourrait être Safran [Thales s’est mis en retrait et il est exclu de recourir à un investisseur non européen].

En attendant, Preligens continue à élargir sa gamme de solutions afin de trouver de nouveaux clients. Ainsi, ce 7 mai, l’entreprise a annoncé le lancement de « nouveaux détecteurs d’intelligence artificielle optimisés pour détecter et classer tout objet d’intérêt militaire sur imagerie satellite SAR [Synthetic Aperture Radar] ».

Et d’ajouter : « Ces détecteurs innovants combinent le savoir-faire de pointe de Preligens en matière d’analyse d’images optiques à de nouvelles capacités d’analyse SAR. Est ainsi redéfini l’état de l’art du traitement multispectral par IA pour la communauté de la défense et du renseignement ».

Combinée aux satellites de reconnaissance optique, comme ceux de la constellation française CSO, cette capacité permettra d’assurer une couverture permanente des sites intéressant le renseignement militaire, les engins en orbite dotés d’un radar à synthèse d’ouverture [RSO] collectant des données quelles que soient les conditions météorologiques.

« Nos clients, qui apprécient déjà les performances de nos détecteurs en opération, ont exprimé le besoin de capacités complémentaires de surveillance par toutes conditions météorologiques 24h sur 24, qu’offre l’imagerie SAR. Nous savons que les images optiques sont plus intuitives, elles sont aussi utilisées comme référence par les analystes, nous avons donc décidé d’aborder l’analyse SAR en combinant, de manière innovante, les informations contenues dans les images optiques et de SAR », a expliqué Jean-Yves Courtois, le PDG de Preligens.

« Cette annonce souligne notre volonté de repousser les limites de l’innovation dans le domaine de l’intelligence artificielle géospatiale et notre engagement à offrir à nos clients les solutions les plus performantes qui correspondent à leurs besoins », a-t-il ajouté.

Pour mettre au point cette nouvelle solution, Preligens a noué un partenariat avec la société Capella, ce qui lui a permis d’accéder à un important volume d’images SAR de haute qualité. Cela lui ainsi permis de développer un « détecteur d’aéronefs » ayant « déjà démontré d’excellentes performances », a-t-elle indiqué. « D’ici la fin de l’année, sera également engagé le développement d’un détecteur de navires », a-t-elle précisé.

Justement, dans le domaine naval, plus précisément dans celui de la guerre sous-marine, Preligens a d’autres projets en cours, comme celui consistant à analyser les signaux acoustiques grâce à l’IA.

Au moment de la création de l’Agence ministérielle de l’intelligence artificielle de Défense [AMIAD], le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait évoqué des « premiers essais en matière d’IA appliquée à l’acoustique sous-marine […] bouleversants ».

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18 contributions

  1. Gaulois78 dit :

    Très belle pépite, attention à bien la soutenir Mr Lecornu, HEXAGON AB et TELESPAZIO veulent acheter Preligens.Elle possède une filiale aux States, de mémoire il me semble qu’un des fondateurs (Guérin ?) est installé là bas.

    https://frenchmorning.com/preligens-une-pepite-de-la-french-tech-pour-aider-le-pentagone/

  2. Thierry le plus ancien dit :

    L’analyse informatique d’imagerie satellite existe depuis bien avant l’intelligence artificielle et je ne suis pas sûr qu’on puisse qualifier cela d’intelligence artificielle, il s’agit plutôt d’un automatisme informatique de recherche selon des formes prédéterminés. Un peu comme un moteur de recherche du genre Google qui cherche des mots similaire.

    Je pense même qu’en la matière ça n’égalera jamais l’intelligence humaine qui pourra détecter des filets de camouflage (et donc la présence d’une cible intéressante) quand la recherche informatique passera sans rien voir car elle ne comprend pas la forme du filet de camouflage qui est à chaque fois différente selon ce qu’il peut y avoir dessous, et de taille très varié.

    Bref pas la peine de payer une fortune pour remplacer un analyste qui fait mieux pour moins cher…

    • ji_louis dit :

      L’automatisme a l’avantage d’abattre un volume de travail impossible à atteindre par un humain, d’où l’intérêt d’améliorer la qualité d’analyse des automatismes.

    • Chimou dit :

      Comment dire qu’on y connait rien sans dire qu’on y connait rien. Au mieux, vous avez 15 ans de retard. Bravo l’artiste

  3. Carin dit :

    L’IA est en train de tout bousculer….
    Aujourd’hui ses centres sont basés au sol, et les résultats des actuels satellites sont traités à posteriori… demain ces puces seront présentes sur l’ensemble des très futures constellations satellitaires, ainsi que l’ensemble des matériels de guerre…. Même un mulot au fin fond d’un champ, ne sera pas sûr que quelqu’un ne le regarde pas chasser en pleine nuit, même sans lune, et sous orage.

    • 30 millions de bébés phoques dit :

      Ah non, déjà que vrai_chasseur voulait bombarder les lapins l’année dernière et que Stoltenberg voulait faire manger des hamsters aux Russes au début de cette année, vous n’allez pas vous mettre à embêter les mulots !

      • St-Denis dit :

        Vous tenez un registre des commentaires sur les petites bêtes..!.?
        Faut allez aider à la SPA… et pas suivre les infos sur la guerre…

        • alexandre dit :

          @St Denis. Mon Dieu , vous méritez la palme du commentateur avec le moins d’humour de ce blog.

          • 30 millions de bébés phoques dit :

            Ah, mais la protection des mulots est chose très sérieuse.
            L’éminente Stéphanie de Monaco n’a-elle-pas dit, fort sérieusement, que « les animaux sont des êtres humains comme les autres » ?
            Allez, reprenez avec moi :
            « Halte aux photos chez les mulots ! »
            « Même les muridés ont une vie privée ! »
            « Pas de voyeurs pour les rongeurs ! »

  4. sepecat dit :

    Si j’ai bien compris le contexte, les outils fournis permettent une surveillance H24, quel que soit le temps, permettant d’identifier tout type d’appareil en mouvement. Question intéressante : un F35 réputé furtif pourrait-il être tracé dès son décollage par cette technologie ? Si c’est le cas, et comme je le pressens pour les années à venir, les investissements en matière de furtivité risquent fort de devenir caducs très rapidement face aux avancées apportées par l’IA.

  5. polux14 dit :

    Mouai, vue la com, on entend bien le son du pipo 😀
    On en reparle dans 10 ans?

  6. Roland Desparte dit :

    Il semble que certains, et c’est normal, ne maîtrise pas vraiment le sujet. Comme j’ai eu le loisir de travailler sur le sujet, je vais donc essayer d’apporter quelques explications…
    Tout d’abord, une onde c’est en quelque sorte ce qui caractérise une vibration (La pierre qui tombe dans l’eau produira à la surface de l’eau un effet d’onde en chaîne). Une onde peut être visible ou invisible ; il est des forces que l’on peut toucher ou percevoir directement, il en est d’autres difficiles à appréhender car résultant de l’observation scientifique.
    Pour faire simple et pas trop long (que les physiciens me pardonnent…), il y a deux types d’ondes. Les ondes mécaniques, généralement visibles, qui ont besoin d’un support pour se propager (L’air, l’eau, le cuivre, etc…) et qui ne peuvent donc pas se propager dans le vide (défaut de support), et les ondes électromagnétiques, généralement invisibles, qui elles ne requièrent aucun support et peuvent donc se propager partout y compris dans le vide.
    Concernant les ondes mécaniques, hormis la pierre qui tombe dans l’eau, l’exemple imagé le plus parlant est la voix. Ceci est confirmé par l’exemple de l’astronaute hors de sa navette spatiale, dans le vide et sans son casque… Il peut parler ou hurler mais aucun son ne sort de sa bouche (Car dans le vide il n’y a d’air pour porter les vibrations de sa voix).
    Concernant les ondes électromagnétiques, l’exemple imagé le plus flagrant est celui de la foudre [qui est une manifestation visible (éclair) et/ou audible (tonnerre) de l’invisible électricité atmosphérique]. A savoir que sur terre et son atmosphère, tout est un jeu de forces (qui sont au repos ou en mouvement), et tout est chargé de particules électriques qui sont soient immobiles (ex : l’électricité statique), soient dans une dynamique de mouvement (exemples : Le courant tellurique qui circule dans la croûte terrestre, le courant généré par les collisions entre les particules d’un nuage, le courant d’une installation domestique, etc…). Dans la nature, deux flux d’électricité dynamique contenus dans des supports différents (par exemple un nuage et le sol), peuvent à distance -“par rayonnement de leurs ondes“- se confronter entre elles. Les ondes existantes dans l’espace séparant ces supports électriques sont par définition appelées ondes électromagnétiques (imagée par l’éclair entre les nuages et le sol).
    La recherche a déterminé que ces ondes électromagnétiques se caractérisent en particulier par la grandeur de leurs oscillations (comme une onde dans l’eau) et le temps existant entre deux oscillations, qu’on appellera longueur d’onde (Soit la distance séparant les deux crêtes successives d’une oscillation). Or, la recherche a également mis en évidence que tous les matériaux terrestres ont des densités différentes et des longueurs d’onde différentes, ces différences matérialisant ce qu’on a appelé “le spectre électromagnétique“ du matériau.
    La technique radar SAR (Synthetic Aperture Radar) consiste à réaliser avec un radar spécial (disposé dans un avion ou un satellite) des images dites “hyperspectrales“ de par l’intensité lumineuse émise par tous les matériaux observés, de par leurs spectres électromagnétiques. Selon leurs longueurs d’onde et leurs densités, la technique SAR permet de produire un “cube“ de spectres électromagnétiques qui (après traitement informatique) permettra de produire des images précises du terrain.
    L’imagerie hyperspectrale SAR a été développée par l’ONERA (Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales) pour la Défense, pour cartographier jour/nuit et par tous temps, pour classifier des objets et des milieux, pour réaliser des modèles numériques de terrain, détecter des objets enterrés ou sous couvert, alerter du déplacement d’une potentielle cible…
    A noter que l’ONERA a développé avec la DGA le projet “Sysiphe“, qui est un moyen innovant hyperspectral unique en Europe, et qui offre une image du sol avec une résolution de 50 cm dans plus de 500 bandes de couleurs, du visible à l’infrarouge lointain, exploitable par exemple pour la détection de cibles même camouflées, la caractérisation d’effluents, la détection de mines, de souterrains… (Source : ONERA ).
    Cependant, cette technique est gourmande en moyens de traitement, ce qui explique la nécessité d’un recours pointu à l’IA, car à partir de deux images radar (deux cubes de données) l’IA effectue un calcul dit “interférométrique“ qui va analyser la différence de phase entre chaque pixel, signaler les modifications, effectuer des rapprochements avec un catalogue de données.

  7. Montag dit :

    intéressant merci