Arménie : Le Sénat des États-Unis a voté la fin de l’aide militaire accordée à l’Azerbaïdjan… qui s’en prend à la France

À la suite des attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis suspendirent l’application de la section 907 du « Freedom Support Act » [Loi sur le soutien à la liberté] afin de « récompenser », en quelque sorte, l’Azerbaïdjan pour avoir autorisé les forces aériennes américaines à survoler son territoire au moment de l’opération menée contre al-Qaïda et les talibans en Afghanistan. Cette mesure permit ainsi à Washington de fournir un appui technique et militaire à Bakou.

Plus tard, l’Azerbaïdjan fut l’un des rares pays musulmans à soutenir l’opération Iraqi Freedom, lancée par les États-Unis en mars 2003. Et cela point d’envoyer, en août de cette année-là, des troupes pour protéger le barrage de Haditha. Dans le même temps, dans la foulée d’une visite officielle de Donald Rumsfeld, alors chef du Pentagone, à Bakou, les États-Unis supervisèrent la modernisation de la base aérienne de Lenkora et fournirent aux forces azerbaïdjanaises des équipements pour surveiller la frontière avec l’Iran.

Depuis, cette dérogation à la section 907 de cette Loi sur le soutien à la liberté a été reconduite d’année en année. Même après l’offensive lancée par l’Azerbaïdjan contre le Haut-Karabakh [ou République d’Artsakh] en octobre 2020. Désormais, ce territoire, qui faisait l’objet d’un différend avec l’Arménie car essentiellement peuplé d’Arméniens depuis des siècles, est passé totalement sous le contrôle de Bakou, à l’issue d’une opération militaire éclair.

Seulement, après ce coup de force, qui a convaincu Erevan de revoir ses alliances et de se détourner de Moscou, rien ne dit que l’Azerbaïdjan n’ira pas plus loin en profitant de sa supériorité militaire pour s’emparer du corridor de Zanguezour afin de se ménager un accès vers sa province du Nakhitchevan, via la région arménienne de Syunik.

En octobre, avait rapporté le site Politico, le chef de la diplomatie américaine, Anthony Blinken, aurait confié à quelques parlementaires que ses services craignaient de voir l’Azerbaïdjan envahir l’Arménie dans un « avenir proche ». Et la même source indiqua qu’il envisageait de ne pas renouveler la dérogation au Freedom Support Act.

Si cette information a été plus ou moins démentie par la suite, il n’en reste pas moins que le Sénat est allé dans ce sens, dans le cadre de l’examen de Loi d’autorisation de la Défense nationale [NDAA – National Defense Authorization Act] pour l’exercice fiscal 2024.

Ainsi, relate Defense News, les sénateurs ont adopté à l’unanimité [et sans grande publicité] un projet de loi visant à interdire au président américain d’accorder la dérogation nécessaire pour fournir une aide militaire à l’Azerbaïdjan pour les exercices 2024 et 2025.

« Nous devons envoyer un message fort et montrer à nos partenaires du monde entier que les États-Unis appliqueront les conditions que nous mettons à l’aide militaire », a fait valoir le sénateur démocrate Gary Peters, le promoteur de ce texte. « Si nous n’agissons pas quand des pays ignorent délibérément les termes de nos accords avec eux, alors ceux-ci deviendront effectivement dénués de sens et inefficaces », a-t-il ajouté.

Il y a donc tout lieu de penser que les États-Unis vont durcir leur position à l’égard de l’Azerbaïdjan, ce qui pourrait compliquer ses achats d’équipements militaires auprès d’Israël si jamais ceux-ci contiennent des technologies et des composants américains.

En attendant, et afin de renforcer ses capacités militaires, l’Arménie peut compter sur l’appui de l’Inde [pour des systèmes d’artillerie] et de la France. D’ailleurs, l’aide promise par Paris [qui s’est déjà concrétisée par la livraison de blindés Bastion aux forces arméniennes], irrite Ilham Aliev, le président azerbaïdjanais.

La France « déstabilise […] notre région, le Caucase du Sud, en soutenant les tendances séparatistes », a-t-il déclaré, ce 21 novembre. En « armant » l’Arménie, elle « encourage les forces revanchardes » dans le pays et « prépare le terrain pour de nouvelles guerres dans notre région », a-t-il asséné. Pour rappel, l’aide proposée par Paris à Erevan concerne surtout la défense aérienne et la formation au combat d’infanterie.

Seulement, et alors que le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a dit espérer trouver un accord de paix avec son voisin, le président Aliev snobe la plupart des tentatives de négociations. Ainsi, la semaine passée, l’Azerbaïdjan a refusé de participer à celles devant se tenir aux États-Unis, en pointant la position « partiale » de Washington.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]