Le Niger accuse le Bénin de planifier une « agression » avec la France et met un terme à sa coopération militaire

Il y a encore quelques semaines, le Niger et le Bénin entretenaient de bonnes relations, notamment au niveau économique, grâce à un projet d’oléoduc devant relier les puits pétroliers nigériens d’Agadem au port béninois en eau profonde de Sèmè-Kpodji afin de permettre à Niamey d’exporter jusqu’à 35 millions de barils par an [et de multiplier par cinq sa capacité d’exportation].

Lancé en septembre 2019 et réalisé par la West African Oil Pipeline Company-Bénin [WAPCO-Bénin], filiale du groupe chinois China National Petroleum Company [CNPC], dans le cadre d’un investissement de 4,5 milliards d’euros, ce chantier aurait dû être finalisé en juillet dernier. Mais le coup d’État survenu au Niger a changé la donne.

En effet, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest [CÉDÉAO] ayant pris des sanctions contre la junte nigérienne, le Bénin a fermé sa frontière terrestre avec le Niger… et les échanges commerciaux sont depuis à l’arrêt. Mais cette dégradation des relations entre les deux pays a aussi des conséquences sur le plan militaire.

En 2022, et après avoir subi plusieurs attaques jihadistes, le Bénin renforça sa coopération militaire avec le Niger, avec la signature d’un accord portant notamment sur l’échange de renseignements, la planification d’opérations conjointes entre les forces béninoise et nigérienne et l’assistance aérienne pour surveiller les mouvements des groupes terroristes.

Seulement, et même si, au sein de la CÉDÉAO, qui a évoqué, à plusieurs reprises, une éventuelle intervention militaire, il a dit privilégier la voie diplomatique pour sortir de la crise provoquée par le coup d’État à Niamey, le Bénin est dans le collimateur de la junte nigérienne. Le 12 septembre, celle-ci a annoncé sa décision de dénoncer les accords de coopération militaire conclus avec Porto-Novo après avoir accusé les autorités béninoises « d’envisager une agression » contre le Niger.

« La République du Bénin a autorisé le stationnement des militaires mercenaires et matériels de guerre dans la perspective d’une agression voulue par la France en collaboration avec certains pays » de la CÉDÉAO, a affirmé la junte, via un communiqué lu à la télévision nationale. Et d’assurer qu’elle avait appelé, « à plusieurs reprises », le gouvernement béninois « au respect des obligations » prévues par l’accord signé en 2022.

Plus tôt, les putschistes nigériens avaient accusé la France de déployer des troupes dans « plusieurs pays de la CÉDÉAO dans le cadre de préparatifs d’une agression contre le Niger, qu’elle envisage en collaboration avec cette organisation communautaire ».

Pour étayer ses accusations, la junte a avancé que « deux aéronefs de transport militaire type A400M et un Dornier 328 [un appareil qui n’est pas en service au sein des forces françaises, ndlr] » avaient été « déployés en renfort en Côte d’Ivoire » et que « deux hélicoptères multirôles type Super Puma » ainsi qu’une « quarantaine de véhicules blindés » l’avaient été « à Kandi et Malanville au Bénin ». Et d’ajouter que, « le 7 septembre 2023, un navire militaire français a accosté à Cotonou [Bénin] avec à son bord, du personnel et des moyens militaires ».

Le navire en question est le porte-hélicoptères amphibie [PHA] Mistral qui, après une escale au Sénégal, est effectivement arrivé au Bénin la semaine passée, avec une trentaine d’officiers de marine africains à son bord, dans le cadre de la mission Corymbe.

« Cette année la présence du Mistral à Cotonou revêt une importance toute particulière car il s’agit de marquer son appui au programme SIREN [Stage d’Instruction Régional Embarqué et Numérique] dans le cadre de notre partenariat dans les secteurs de l’action de l’Etat en mer et de l’économie bleue dont le Bénin est un acteur important », a ainsi expliqué la diplomatie française.

Quant aux blindés observés à Kandi et à Malanville, il peut tout simplement s’agir de ceux que la France a donnés aux forces béninoises. En janvier, celles-ci ont reçu un premier lot de 8 véhicules de l’avant blindé [VAB]. Et, en juin, selon RFI, elles ont pris possession de trois hélicoptères Puma.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]