Les États-Unis ont décidé de livrer des armes à sous-munitions à l’Ukraine

Alors que la contre-offensive ukrainienne n’est pas encore parvenue à enfoncer les lignes défensives russes malgré quelques avancées dans certains secteurs, les États-Unis ont annoncé une nouvelle aide militaire d’une valeur de 800 millions de dollars au profit de Kiev. Et aucune arme à longue portée, comme les missiles balistiques tactiques MGM-140 ATACMS [Army Tactical Missile System], tirés par le système M142 HIMARS [High Mobility Artillery Rocket System] ne figure dans la liste des équipements qui seront prochainement livrés à l’Ukraine.

En revanche, Washington a l’intention de céder à l’armée ukrainienne environ une centaine de milliers d’obus à sous-munitions de 155 mm de type « DPICM » [dual-purpose improved conventional munition / munition conventionnelle améliorée à double usage]. Des membres du Congrès avaient d’ailleurs plaidé en faveur d’une telle décision.

Les armes à sous-munitions [ASM] sont généralement utilisées pour « saturer » une zone donnée. Dans le cas de l’Ukraine, les DPICM, capables de percer les blindages, permettraient d’économiser les obus de 155 mm, dont les stocks peinent à se reconstituer. En outre, étant donné que les forces russes en utilisent, Kiev estime avoir le droit d’en disposer également. Ce qui est d’ailleurs déjà le cas puisque, selon Foreign Policy, Ankara lui en aurait livré vers la fin de l’année 2022…

Le problème des ASM est que toutes les munitions qu’elles dispersent n’explosent pas forcément toutes à l’impact. Ce qui a pour conséquence de « polluer » la zone visée et faire des victimes parmi les civils une fois les combats terminés. Aussi, la Convention d’Oslo, signée par une centaine de pays depuis 2008, interdit leur usage, leur production, leur stockage et leur exportation.

Parmi les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, seuls la France et le Royaume-Uni ont signé cette convention.

Cela étant, aux États-Unis, une loi adoptée en 2009 interdit l’exportation des ASM si le taux d’échecs des sous-munitions libérées est supérieur à 1%. Or, on en est loin avec les DPICM : en moyenne, quatre obus M864 sur 72 n’explosent pas après avoir été tirés selon les tests de l’US Army. Cependant, comme l’a indiqué Colin Kahl,le sous-secrétaire à la Défense pour la politique, la Maison Blanche a le droit d’y déroger pour des « raisons de sécurité nationale ». Ce que le président Biden a donc fait.

« Cela a été une décision très difficile pour moi » et « cela m’a pris du temps avant d’être convaincu de le faire », a confié celui-ci lors d’un entretien diffusé par CNN, le 7 juillet. Et d’assurer que cette question avait été discutée avec le Congrès et les pays alliés. « Les Ukrainiens sont à court de munitions », a-t-il justifié. En outre, Kiev a pris l’engagement de ne pas utiliser les ASM qui lui seront livrées dans les « zones urbaines peuplées de civils » et de déminer les zones où elles auront été tirées.

Par ailleurs, le conseiller à la sécurité nationale du président américain, Jack Sullivan, a mis l’accent sur le « risque massif encouru par les civils si les troupes et les chars russes déboulent sur les positions ukrainiennes et reprennent plus de territoire parce que l’Ukraine n’a pas assez d’artillerie » pour se défendre.

Cependant, cette décision suscite de l’embarras chez certains membres de l’Otan. En Allemagne, la ministre des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a ainsi fait part de son opposition à l’envoi d’armes à sous munitions à l’Ukraine. Mais cette position a ensuite été amendée par Steffen Hebestreit, le porte-parole du gouvernement allemand, celui-ci s’étant dit « certain que nos amis américains n’ont pas pris à la légère la décision de livrer les munitions en question ». La France est sur la même ligne.

« Nous comprenons l’arbitrage auquel les États-Unis sont parvenus dans leur souhait d’aider l’Ukraine dans l’exercice de sa légitime défense face à l’agression illégale déclenchée par la Russie », a en effet commenté le ministère français des Affaires étrangères.

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