Otan : L’Allemagne se dit prête à maintenir une brigade de 4000 soldats en Lituanie

Ainsi, la chevauchée des Walkyries que promettait Evguéni Prigojine, le chef du groupe paramilitaire Wagner, s’est révélée être une équipée sauvage et la « mutinerie armée » contre le commandement militaire russe s’est arrêtée à Voronej à la suite d’une médiation d’Alexandre Loukachenko, le président biélorusse. S’il se dit beaucoup de choses au sujet de cette rébellion, il est cependant encore trop tôt pour en mesurer les conséquences.

Ce que l’on sait, et d’après ce qu’ont déclaré les protagonistes de cette affaire, c’est que M. Prigojine, surnommé le « cuisinier de Poutine », ira en exil en Biélorussie en échange de l’abandon des poursuites judiciaires engagées contre lui pour avoir défié le chef du Kremlin… Et que les mutins du groupe Wagner – dont on ignore le nombre exact – ne seront pas inquiétés, en reconnaissance des « services » qu’ils ont rendus. Quant aux autres, ils seront contraints de se ranger sous la bannière de l’état-major russe.

La colère de M. Prigojine prenant ses racines dans l’animosité qu’il voue à son endroit, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, n’a pas été démis de ses fonctions. Et, ce 26 juin, il est même apparu à la télévision publique… comme s’il ne s’était rien passé. Cependant, la rumeur dit que le général Alexeï Dioumine tiendrait la corde pour le remplacer prochainement.

Cela étant, cette affaire pose plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Ainsi, on ignore ce que deviendra le groupe Wagner, par ailleurs engagé en Afrique, avec le soutien manifeste du pouvoir russe [puisqu’il y sert ses intérêts]. Les mercenaires qui ont pris part à la mutinerie vont-ils rejoindre M. Prigojine dans son exil biélorusse? Et si tel est le cas, quelles seront ses intentions?

Afin de parer toute éventualité, le ministre polonais de la Défense, Mariusz Blaszczak, annoncé des mesures spécifiques. « Nous avons renforcé les frontières avec la Biélorussie et la région de Kaliningrad. […] Nous sommes conscients de ces menaces et nous y répondons en anticipant les attaques. Après tout, cela fait deux ans que nous faisons face à une attaque hybride à la frontière polonaise. Nos soldats de l’armée polonaise y servent, renforçant ainsi la sécurité de notre patrie », a-t-il dit.

La Lituanie a témoigné du même état d’esprit. « Les événements du week-end dernier ont montré l’instabilité du régime russe. Des bouleversements de la même ampleur, voire plus importants peuvent nous attendre à l’avenir », a relevé Gitanas Nauseda, son président, après avoir recontré Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l’Otan, ce 26 juin.

La veille, et alors que le prochain sommet de l’Otan se tiendra à Vilnius, soit à une trentaine de kilomètres du territoire biélorusse, Nauseda s’était inquiété des intentions du chef du groupe Wagner.

« Si Prigojine se retrouve en Biélorussie avec une partie de ses hommes, avec des plans et des intentions peu clairs, alors nous devrons encore renforcer la sécurité de nos frontière orientales », a en effet déclaré le président lituanien. « Je ne parle pas seulement de la Lituanie mais aussi de l’ensemble de l’Otan », a-t-il ajouté.

Si elle a augmenté significativement ses dépenses militaires depuis 2014, la Lituanie compte sur l’Otan pour assurer sa défense, et notamment sur un bataillon multinational dont l’Allemagne est la nation cadre. Et celle-ci y a d’ailleurs renforcé sa participation après le début de la guerre en Ukraine, tandis que l’une de ses brigades se tient prête à intervenir rapidement en cas de besoin. « Nous défendrons chaque centimètre du territoire de l’Otan », avait d’ailleurs assuré Olaf Scholz, le chancelier allemand, lors d’un déplacement à Vilnius, en juin 2022.

Pour autant, cet apport de l’Alliance reste insuffisant aux yeux des dirigeants lituaniens… qui demandent la présence permanente d’une brigade allemande dans leur pays. D’autant plus que celui-ci occupe une place stratégique pour défendre le passage de Suwalki qui, coincé entre l’enclave russe [par ailleurs fortement militarisée] de Kaliningrad et la Biélorussie, est le seul accès terrestre des pays baltes au reste de l’Union européenne et de l’Otan.

A priori, les responsables lituaniens seraient sur le point d’obtenir satisfaction. En effet, ce 26 juin, à l’occasion d’une visite à Vilnius, le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a fait savoir que « l’Allemagne est prête à déployer durablement une brigade robuste en Lituanie »… mais à la condition que les infrastructures le permettent et que cela soit compatible avec les plans de l’Otan.

« Cela implique des efforts considérables », a souligné M. Pistorius. « Nous sommes d’accord sur le fait que l’installation de la brigade suivra pas à pas, à mesure que l’infrastructure se développera », a ensuite expliqué le ministre allemand, avant de prévenir que le déploiement de 4000 soldats ne pourrait « pas être achevé en quelques mois ».

« L’Allemagne s’engage, en tant que membre de l’Otan et la plus grande économie d’Europe, à protéger le flanc oriental », a encore insisté M. Pistorius, avant de superviser, en compagnie de M. Stoltenberg, un exercice visant à tester la tranformation rapide du bataillon multinational sous commandement allemand en brigade en cas de tensions accrues aux abords de la Lituanie.

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