MBDA France prend les rênes d’un projet européen de défense contre les menaces hypersoniques

En novembre 2019, la Commission européenne désigna MBDA pour coordonner le projet TWISTER [Timely Warning and Interception with Space-based TheatER surveillance] qui, retenu au titre de la Coopération structurée permanente [CSP ou PESCO] devait poser les bases d’un système de défense contre les menaces hypersoniques, reposant sur un intercepteur multi-rôle endo-atmosphérique.

Puis, deux ans plus tard, le groupe allemand OHB fut à son tour retenu par la Commission européenne pour diriger les travaux du projet ODIN’S EYE [multinatiOnal Development INitiative for a Space-based missilE earlY-warning architecturE] afin de mettre au point une composante spatiale d’alerte avancée.

Seulement, en juillet 2022, l’Union européenne [UE] lança le projet EU HYDEF [pour European Hypersonic Defence Interceptor] afin de poursuivre les travaux réalisés dans le cadre de TWISTER. Et, à la surprise générale, la coordination de ce programme, doté de 100 millions d’euros, fut confiée au groupe espagnol SENER Aeroespacial, dont les compétences en matière de défense aérienne en général et dans le domaine de l’hypersonique en particulier étaient loin d’être évidentes…

Mieux encore : seul pays européen à développer des armes hypersoniques [missile ASN4G et planeur V-MAX] et à disposer d’une longue expérience en matière de missiles balistiques, la France avait été écartée du projet HYDEF, auquel devaient alors participer l’Espagne, l’Allemagne [avec Diehl Defence], la Belgique, la Norvège [non membre de l’UE, ndlr], la Pologne, la République tchèque et la Suède. L’Italie, qui avait quelques compétences à faire valoir avec le système franco-italien SAMP/T [Sol Air Moyenne Portée / Terrestre] en fut aussi pour ses frais.

Pour autant, il n’était pas question d’en rester là pour MBDA, qui avait proposé à la Commission européenne le programme HYDIS [HYpersonic Defense Interceptor]. Et l’affaire fut portée devant la Cour de justice de l’Union européenne [CJUE].

Dans une document publié en janvier 2023 par le journal officiel de l’UE, MBDA a fait valoir que « la Commission a commis plusieurs erreurs manifestes d’appréciation dans l’évaluation de la proposition HYDIS ». Et de souligner notamment que l’exécutif européen avait « méconnu la notion de ‘phase de conception’ et rejeté la proposition HYDIS « en se fondant sur des éléments manifestement dénués de pertinence au cours de cette phase ».

« La Commission a rejeté la proposition HYDIS en grande partie au motif qu’elle a estimé que certains aspects étaient insuffisamment détaillés. Cependant, en vertu du principe de bonne administration, la Commission avait l’obligation de rassembler tous les faits pertinents, y compris, le cas échéant, en demandant des clarifications à la partie requérante, en particulier dès lors que la future sécurité des États membres et citoyens de l’Union est en jeu. La partie requérante aurait pu aisément fournir de telles clarifications. Au lieu de cela, l’attitude passive de la Commission et l’absence de collecte des informations factuelles pertinentes ont entraîné une violation du principe de bonne administration », lit-on encore dans ce document.

Ces arguments ont visiblement porté puisque MBDA s’est remis en selle puisque celui-ci va coordonner un second projet européen, appelé HYDIS. Et, à l’occasion du Salon international de l’aéronautique et de l’espace du Bourget, le groupe a donné quelques détails. Ainsi, bénéficiant d’un financement européen de 80 millions d’euros, celui-ci repose sur l’expérience acquise avec les travaux relatifs à l’intercepteur Aquila. Mais, surtout, il fédère quatre États [France, Italie, Pays-Bas et… l’Allemagne, qui garde ainsi un pied dans chaque programme…] ainsi que 19 partenaires et plus de « 30 sous-traitants » originaires de 14 pays européens.

« Les membres du consortium sont des groupes de défense, des institutions, des PME, des ETI et des universités. Tous disposent d’une expertise forte et reconnue dans les technologies et les domaines clés nécessaires à l’étude d’un tel nouvel intercepteur », fait valoir MBDA.

Quoi qu’il en soit, deux projets européens en matière de défense contre les missiles hypersoniques sont désormais en cours… Et il ne devrait y avoir que deux issues possibles : soit ils finiront par converger à un moment ou à un autre [mais ce n’est pas le plus probable…], soit le meilleur sera retenu.

MàJ – Précisions sur le recours de MBDA et la CJUE

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