La Royal Navy confirme son intention de doter ses deux porte-avions de catapultes et de brins d’arrêt

En 2010, alors que le développement du F-35B, c’est à dire la version STOVL [Short Take Off Vertical Landing – décollage court et atterrissage vertical] du chasseur-bombardier de cinquième génération produit par Lockheed-Martin était incertain, le Royaume-Uni décida de doter ses deux futurs porte-avions – les HMS Queen Elizabeth et HMS Prince of Wales – de catapultes et de brins d’arrêt pour leur permettre d’exploiter des F-35C [version navale du F-35, ndlr].

En effet, ces deux porte-avions devaient être dotés d’un tremplin… Et il était alors exclu de les équiper de brins d’arrêt, le F-35B n’en ayant pas besoin. Aussi, une telle configuration ne pouvait pas être dite « STOBAR » [Short Take-Off But Arrested Recovery] à proprement parler.

Quoi qu’il en soit, la décision de les doter de catapultes et de brins d’arrêt [configuration dite CATOBAR, pour Catapult Assisted Take-Off But Arrested Recovery] ne manquait pas d’arguments. Outre le fait qu’elle allait permettre de pallier les vicissitudes du F-35B, elle ouvrait la voie à une plus grande proximité opérationnelle avec l’US Navy et la Marine nationale.

Seulement, le ministère britannique de la Défense [MoD] n’alla pas au bout de cette logique. Le programme F-35B ayant été remis sur les rails, il décida de revenir aux plans initiaux, notamment en raison d’impératifs budgétaires et techniques. L’installation de catapultes électromagnétiques [EMALS], d’origine américaine, aurait sans doute pris trop de temps… alors que cette technologie n’était pas encore mûre. En outre, elle aurait été beaucoup trop coûteuse, alors que la facture pour les deux porte-avions venait à nouveau de s’envoler.

Depuis, les HMS Queen Elizabeth et le HMS Prince of Wales ont été déclarés bons pour le service [avec des fortunes diverses…]. Mais la Royal Air Force et la Fleet Air Arm de la Royal Navy n’ont pas suffisamment de F-35B à mettre dessus… [48 avions devant être livrés d’ici 2025, un achat de 26 appareils supplémentaires étant en cours de négociation, ndlr]. Par ailleurs, la configuration de ces deux porte-avions limite les opérations aériennes, le guet aérien étant assuré par des hélicoptères Merlin « Crowsnest » à l’autonomie limitée, et peut être un frein à l’usage de drones embarqués.

Sur ce point, le colonel Phil Kelly, officier des Royal Marines et responsable de l’aviation navale britannique, a précisé que la Royal Navy évaluerait le drone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] Mojave, du constructeur américain General Atomics, depuis l’un des deux porte-avions, au large de la côte Est des États-Unis, en novembre prochain.

Mais, s’exprimant lors du « Combined Naval Event 2023 » [ses propos ont été rapportés par Naval News], le colonel Kelly est allé plus loin en évoquant le projet « Ark Royal », du nom du dernier porte-avions « CATOBAR » de la Royal Navy, lequel entre dans le cadre du concept de « Future Maritime Aviation Force » [FMAF].

Ainsi, il est question pour la Royal Navy de transformer progressivement les HMS Queen Elizabeth et HMS Prince of Wales en porte-avions dits « CATOBAR », ce qui leur permettra de renforcer leurs capacités à mener des opérations impliquant potentiellement des F-35C, des F.A-18 Super Hornet et… des Rafale Marine.

« Nous envisageons d’abord passer de la configuration STOVL à celle dite STOL [décollage et atterrissage courts], puis aux configurations STOBAR et CATOBAR. Cela se ferait progressivement, afin d’étaler les coûts financiers », a dit le colonel Kelly.

Outre l’amélioration des capacités car elle permet de mettre en oeuvre des avions embarqués ayant un plus long rayon d’action tout en emportant une charge utile plus importante, la configuration CATOBAR faciliterait l’emploi des futurs drones aériens Vixen de la Royal Navy [et dont le sort n’était plus évoqué depuis la décision de la RAF d’arrêter son programme Mosquito, qui était lié]… et celui, a priori, de drones ravitailleurs américains MQ-25 Stingray si l’on en croit le document produit par le colonel Kelly.

Cela étant, ces annonces ne sont pas surprenantes : en 2021, le MoD avait demandé à l’industrie des « idées sur les futurs systèmes de lancement et de récupération » d’aéronefs pouvant être « installés au cours des cinq prochaines années » à bord des porte-avions de la Royal Navy.

Dans sa requête, le MoD précisait qu’il entendait « évaluer la disponbilité des catapultes électromagnétiques et des brins d’arrêt ». Et ces systèmes devaient être « suffisamment matures sur le plan technique pour être installées sur un navire approprié [un porte-avions, ndlr] à partir de 2023 ».

Les catapultes EMALS de General Atomics, associées au dispositif AAG [Advanced Arresting Gear], ne sont sans doute pas la seule solution possible… En février, GE Power Conversion [nouveau nom de l’entreprise française Converteam après son rachat par General Electric, en 2011] a indiqué avoir achevé les essais d’une nouvelle « machine à induction linéaire avancée » sur laquelle reposeraient les catapultes dites EMCAT [Electro Magnetic CATapult] et EMKIT. Les premières devraient être « capables de lancer des avions aussi grands que le F35-C à partir d’un porte-avions » tandis que les secondes pourraient être utilisées pour lancer des drones aériens.

Reste que la transformation envisagée des deux porte-avions de la Royal Navy sera compliquée, même si, d’après The Telegraph, il avait été prévu de réserver des espaces à leur bord pour les doter éventuellement de catapultes et de brins d’arrêt. Mais il faudra réserver d’autres compartiments pour installer les équipements nécessaires à la mise en oeuvre de drones embarqués.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]