Consensus politique pour augmenter significativement le budget de la Défense

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La confidence faite par un officier au quotidien Les Échos est édifiante. « Au Mali, a-t-il dit, on identifie des katibas jihadistes mais on les laisse filer parce que l’hélicoptère est en réparation, le blindé pas disponible ou parce qu’il n’y toujours que trois drones à disposition au Sahel. » Et d’ajouter : « C’est comme d’avoir un vêtement usé dont vous craignez à tout moment qu’il ne se déchire. »

Aussi, pour le chef d’état-major des armées (CEMA), le général Pierre de Villiers, il est impératif de porter, au plus vite, le budget de la Défense à 2% du PIB, comme la France s’y est engagée il y a deux ans lors du sommet de l’Otan à Newport. Actuellement, les dépenses militaires françaises représentent, pensions comprises, 1,78% du PIB

« Le modèle d’armée d’aujourd’hui est le bon mais il s’use », a souligné le CEMA, lors de l’Université d’été de la Défense, le 6 septembre. « L’analyse de la menace durable et l’ennemi que nous avons devant nous me fait dire que ça va être durable et que cela ne va pas diminuer », a-t-il ajouté. Cette hausse du budget de la Défense qu’il demande est le « prix de la paix », a-t-il plaidé. « C’est l’effort de guerre et nous n’avons pas le choix, nous sommes en guerre », a-t-il continué.

Cet effort budgétaire est d’autant plus nécessaire que le contrat opérationnel des forces armées tel qu’il a été défini par le dernier Livre blanc sur la Défense et la sécurité nationale (LBDSN) est dépassé, que des programmes majeurs d’équipements, comme Scorpion, sont en cours et qu’il faut financer le maintien des effectifs décidé par le président Hollande et combler les « trous capacitaires ». Et c’est sans compter sur la modernisation de la dissuasion nucléaire, qui sera un chantier majeur des deux prochains quinquenats.

Quoi qu’il en soit, pour le Premier ministre, Manuel Valls, « dans les dix ans qui viennent, le niveau d’engagement financier et humain ira croissant pour les ministères de l’Intérieur et de la Défense », au point même que l’objectif des 2% du PIB est, a-t-il jugé, « atteignable ».

« C’est vrai que la dépense publique dans notre pays est particulièrement élevée mais (…) la menace est là et durable et il nous faut investir beaucoup en matière de sécurité, de protection des Français, comme il nous faut investir beaucoup dans la lutte contre la radicalisation », a continué le chef du gouvernement, lors de l’Université d’été de la Défense. Mais, a-t-il continué, « nous n’avons pas le choix. »

Un constat partagé (mais le contraire aurait été étonnant) par Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense. « Quelles que soient les circonstances et les difficultés économiques rencontrées, la France ne doit pas renoncer à disposer de l’éventail complet des moyens militaires nécessaires à sa sécurité, à son indépendance politique, à son autonomie stratégique », a-t-il affirmé.

Pour la députée (PS) Patricia Adam, qui préside la commission de la Défense nationale à l’Assemblée nationale, « l’horizon de la prochaine Loi de programmation militaire » serait « raisonnable » pour atteindre cet objectif des 2% du PIB. « Avec une augmentation progressive de 500 millions d’euros par an, cet effort supplémentaire ne paraît pas inatteignable », a-t-elle insisté.

Son homologue au Sénat, l’ancien Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, se veut plus prudent. « Augmenter les crédits de budget défense, je suis lucide, cela représente un effort colossal pour des finances publiques exsangues », a-t-il dit. « Nous savons que ce sera évidemment complexe, qu’il y aura des oppositions, qu’il faudra une volonté politique et un grand courage, cela nécessitera des choix extrêmement ambitieux », a-t-il ajouté.

Cela étant, l’objectif d’un effort de défense porté à 2% du PIB figure dans le programme du parti « Les Républicains », dévoilé début juillet. Et il n’a pas été remis en cause par les principaux candidats à la primaire de la droite et du centre, y compris par Alain Juppé, que soutient M. Raffarin.

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