La Biélorussie accuse l’Ukraine de « violations répétées » de son espace aérien

En juillet 2020, 33 employés d’une société militaire privée russe, proche du Kremlin, furent interpellés à Minsk sous l’oeil des caméras par le groupe Alpha du Comité de la sécurité biélorusse [KGB]. Et il fut expliqué par la suite qu’ils préparaient des actions visant à déstabiliser la Biélorussie, à l’heure où le président de ce pays, Alexandre Loukachenko, s’apprêtait à se faire réélire, en dépit d’un fort mouvement d’opposition.

À ce moment-là, les relations entre Minsk et Moscou étaient plutôt fraîches. Aussi, la thèse présentée par les autorités biélorusses pouvaient sembler crédible… En apparence seulement étant donné que les effets de ces employés de Wagner suggéraient plutôt qu’ils avaient l’intention de se rendre dans un pays chaud et qu’ils étaient en transit en Biélorussie. Autre détail troublant : certaines identités alors révélées par l’agence officielle Belta correspondaient à des noms figurant dans la base de données ukrainiennes « Peacemaker », laquelle dresse la liste des mercenaires russes ayant combattu dans le Donbass.

Puis, quelques jours plus tard, et malgré la gravité des faits qui leur étaient reprochés, ces mercenaires furent remis à Moscou, alors que Kiev venait de demander à Minsk leur extradition, justement en raison de leur participation aux combats dans le Donbass. Ce n’est que très récemment que l’on a eu le fin mot de cette histoire.

Ainsi, selon la presse ukrainienne, ces ressortissants russes avaient été piégés par le GUR [renseignement militaire ukrainien] dans le cadre d’une opération très audacieuse. Celle-ci avait consisté à voler l’identité d’une vraie société militaire privée russe afin de proposer des emplois très particuliers [tireurs d’élite, artilleurs] à des mercenaires qui, établis en Russie, avaient autrefois combattus dans le Donbass. Et il leur fut précisé qu’ils seraient envoyés au Venezuela, via la Turquie, pour y assurer la protection des installations du groupe pétrolier russe Rosneft.

Selon le plan du GUR, ces mercenaires ainsi recrutés devaient rejoindre Minsk, avant de s’envoler vers la Turquie. Mais au moment de survoler le territoire ukrainien, leur avion aurait été contraint de se poser à Kiev, grâce à une fausse alerte à la bombe. Seulement, le président ukrainien, Volydymyr Zelenski, décida de reporter l’opération… ce qui provoqua son échec.

Évidemment, une telle affaire ne pouvait que compliquer davantage les relations entre Minsk et Kiev… D’autant plus que les relations entre la Biélorussie et la Russie se sont depuis réchauffées. Après les manoeuvres Zapad 21 [suivies par d’autres manoeuvres] menées conjointement par leurs forces armées respectives, le président Loukachenko a fini par reconnaître la Crimée comme russe, ce qu’il n’avait jamais fait depuis l’annexion de ce territoire ukrainien, en 2014.

Alors que l’Union européenne et l’Otan lui reprochent d’instrumentaliser une crise des migrants à ses frontières avec la Pologne et la Lituanie, la Biélorussie a accusé l’Ukraine de « violations répétées » de son territoire.

C’est en effet ce qu’ont prétendu les autorités biélorusses, après avoir convoqué l’attaché militaire ukrainien en poste à Minsk pour lui remettre une note de protestation officielle. Peu avant, elles avaient expliqué qu’un hélicoptère militaire ukrainien Mi-8, volant à 100 mètres d’altitude, avait violé la frontière sur un kilomètre de distance. Ce que leurs homologues ukrainiennes ont démenti.

« Dans le cadre du renforcement de la protection de la frontière avec la Biélorussie, l’aviation est utilisée pour des missions de surveillance. Mais il n’y a eu aucune violation de la frontière », a assuré Andriy Demchenko, le porte-parole des gardes-frontières ukrainiens. « Peut-être que quelqu’un a fait une erreur et répand des accusations à des fins manipulatrices », a encore fait valoir Kiev.

Même si depuis le début de la crise migratoire que la Biélorussie est accusée d’avoir provoquée, aucune tentative de passage de migrants vers l’Ukraine n’a été signalée, Kiev a décidé de renforcer la surveillance de la frontière, avec le déploiement de 8’500 soldats et policiers.

Quoi qu’il en soit, ces accusations portées par Minsk surviennent à un moment où la Russie est soupçonnée par les États-Unis de se préparer à lancer une offensive contre l’Ukraine, afin de couper court à sa volonté de rejoindre l’Otan. Et si ces soupçons viennent à se confirmer, la Biélorussie pourrait tenir un rôle important, Kiev n’étant située qu’à une centaine de kilomètres de son territoire.

Photo : Mil Mi 8 ukrainien

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