La marine indienne va vérifier la capacité du Rafale M à décoller grâce à un tremplin

En mars, la marine indienne fit savoir qu’elle entendait donner la priorité aux projets P-75I et P-75 Alpha afin de renforcer sa flotte de sous-marins d’attaque, avec 12 unités supplémentaires, dont six à propulsion nucléaire. Et, pour trouver des marges de manoeuvre financières, elle indiqua qu’elle était prête à réduire ses capacités aéronavales par rapport à ses plans initiaux.

Ces derniers prévoyaient l’exploitation de trois porte-avions, dont l’INS Vikramaditya, remis en état, à prix d’or, après avoir été acquis auprès de la Russie, l’INS Vikrant, qui, de conception locale, vient d’entamer ses essais en mer, et l’INS Vishal, qui reste à construire selon une configuration CATOBAR [catapultes et brins d’arrêt] différentes des deux autres [dits STOBAR, car dotés chacun d’un tremplin].

Un mois plus tard, le quotidien The Hindustan Times rapporta que la décision de retirer du service l’INS Vikramaditya au profit de l’INS Vhisal, une fois la construction de celui-ci terminée, tenait la corde. Aussi, cela signifie que l’Indian Navy aura toujours besoin d’avions embarqués pouvant opérer depuis des porte-avions en configuration STOBAR et CATOBAR. Et que, par conséquent, le programme MRCBF [Multi Role Carrier Borne Fighters], qui doit lui permettre d’acquérir 57 appareils ayant une telle capacité, est donc toujours d’actualité.

Mais au-delà des configurations des porte-avions, l’aéronavale indienne souhaite remplacer les MiG-29K qu’elle utilise actuellement, ces avions embarqués, de facture russe, ne lui donnant pas pleinement satisfaction. Entre 2017 et 2020, 9% des 45 appareils livrés furent perdus accidentellement et leur disponibilité insuffisante est régulièrement pointée du doigt.

Le programme MRCBF a donné lieu, en 2017, à une demande d’informations émise auprès de plusieurs industriels, dont, notamment, Boeing [pour le F/A-18 Super Hornet] et Dassault Aviation [Rafale Marine]. Le suédois Saab a par ailleurs fait savoir qu’il entendait proposer une version navale du JAS-39 Gripen E/F… qui n’existe, pour le moment, que sur le papier.

Dans le détail, l’Indian Navy cherche un avion pouvant décoller aussi bien d’un porte-avions STOBAR ou CATOBAR, assurer des missions de défense aérienne, de reconnaissance, de frappe et de guerre électronique, ce qui suppose une capacité d’emport assez conséquente et des capteurs performants, comme, par exemple, un radar AESA [Active Electronically Scanned Array].

En 2020, Boeing démontra que le F/A-18 Super Hornet était bien en mesure de décoller avec un tremplin, lors d’une campagne d’essais organisée à la Naval Air Station Patuxent River.

« Le premier décollage réussi et sûr du F/A-18 Super Hornet à partir d’un tremplin commence le processus de validation pour qu’ils puissent opérer efficacement à partir des porte-avions de la marine indienne », avait alors commenté Ankur Kanaglekar, le responsable des ventes de Boeing en Inde.

Cela étant, selon les images diffusées à l’époque, le F/A-18 Super Hornet avait effectivement décollé avec l’aide d’un tremplin… mais dans une configuration assez légère, avec seulement deux missiles air-air Sidewinder et, apparemment, deux bombes inertes.

Quant au Rafale Marine, une étude citée par Mer&Marine en 2012 avait assuré qu’il serait en mesure d’opérer à bord d’un porte-avions en configuration STOBAR. Mais encore faut-il le vérifier… Ce qui sera fait en 2022, selon le quotidien The Print, qui cite des responsables de la défense indienne.

Ainsi, Dassault Aviation serait prêt à envoyer un Rafale Marine en Inde pour une démontration au début de l’année 2022.

« Le Rafale M ne décollera pas d’un porte-avions mais depuis l’installation terrestre d’essais [SBTF] de la base navale INS Hansa, à Goa. Dassault Aviation est confiant et souhaite montrer les capacités [de l’avion] en Inde même », a confié l’une de ces sources. Les dates n’ont pas encore été arrêtées mais l’industriel français « a proposé de faire venir le Rafale M dès janvier si nécessaire », rapporte The Print.

Cependant, il faudra également vérifier si les dimensions du Rafale M seront compatibles avec les ascenseurs du porte-avions INS Vikrant. Cela vaut aussi pour le F/A-18 Super Hornet, même si celui-ci peut replier ses ailes. « Ils pourront accueillir tous les avions » a assuré une source de The Print. « Le simple fait que les deux compagnies [Dassault Aviation et Boeing] soient désireuses de proposer leur avion signifie qu’elles ont pris en compte diverses mesures », a-t-elle ajouté, sans vouloir entrer dans les détails.

Quoi qu’il en soit, l’an passé le chef d’état-major de l’Indian Navy, l’amiral Karambir Singh, avait émis l’idée que l’acquisition du futur avion embarqué pourrait se faire conjointement avec l’Indian Air Force, qui cherche à se doter de 114 avions de combat multi-rôles dans le cadre du programme MRFA [Multi Role Fighter Aircraft ou MMRCA 2.0]…

Si Dassault Aviation verrait cela d’un bon oeil [le Rafale B/C étant donné favori ndlr], ce ne serait pas le cas de Boeing, à en croire les sources sollicitées par The Print.

Enfin, il n’est pas encore certain que le nombre 57 chasseurs embarqués à acquérir via le programme MRCBF soit définitivement arrêté, dans la mesure où Hindustan Aeronautics Limited [HAL] travaille sur le projet TEDBF [Twin Engine Deck Based Fighter], qui vise à développer un avion de combat multi-rôles pour la marine indienne. Le premier vol d’un prototype est attendu pour 2026.

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