Un influent élu du Congrès « descend » l’avion de combat F-35

Pour déterminer les capacités et le nombre d’avions de combat dont elle aura besoin pour les mettre en oeuvre dans les années 2030, l’US Air Force conduit actuellement une étude appelée « TacAir ». Et, à en croire les propos de son chef d’état-major, le général Charles Q. Brown, ainsi que ceux du patron de l’Air Combat Command [ACC], le général Mark Kelly, le scenario qui se dessine prévoit une baisse des commandes d’avions de 5e génération F-35A Lighgtning II, alors que cet appareil devait remplacer les F-16, les A-10 Warthog ainsi qu’une partie des F-15.

Ainsi, le 18 février, le général Brown a déclaré qu’il souhaiterait remplacer les F-16 par des chasseurs-bombardier de génération 4,5. « En fait, je veux être en mesure de construire quelque chose de nouveau et de différent qui ne soit pas le F-16 mais qui possède certaines de ses capacités », avait-il alors expliqué.

De son côté, le général Brown a plaidé pour accélérer la mise en service de l’avion de combat de 6e génération, issu du programme NGAD [Next Generation Air Dominance], dont un démonstrateur a déjà volé dans la plus grande confidentialité, en 2020, après avoir mis au point selon l’approche dite « Digital Century Series initiative », laquelle s’appuie sur les dernières avancées en matière d’ingénierie numérique.

Aussi, tout laisse à penser que l’US Air Force va remiser son plan visant à se procurer 1.763 F-35A [un nombre arrêté en 1997, a souligné le général Brow] pour se contenter de 1.050 exemplaires. En tout, tel est le chiffre qui circule actuellement, à en croire Aviation Week.

« Les coûts exorbitants du cycle de vie du F-35 signifient que l’US Air Force ne peut pas se permettre d’acheter autant d’avions dont elle a besoin pour combattre et gagner une guerre aujourd’hui, ce qui rend d’autant plus important le programme NGAD », avait d’ailleurs fait valoir Will Roper, désormais ancien secréaire à l’Air Force pour la technologie et les acquisitions, en janvier dernier.

Visiblement, cette idée fait son chemin. Président du comité des services armés à la Chambre des représentants, le démocrate Adam Smith n’y est pas allé de main morte, le 5 mars, lors d’une conférence de la Brookings Institution. En effet, il a estimé qu’il était temps « d’arrête de jeter de l’argent dans ce puits sans fond » [« rathole »] qu’est, selon lui, le programme F-35.

« Que nous apporte le F-35? Y a-t-il un moyen de réduire nos pertes? Y a-t-il un moyen de ne pas continuer à dépenser autant d’argent pour une capacité aussi faible ? Parce que les coûts de soutien sont énormes », a déclaré M. Smith.

D’autant plus que le programme F-35 connaît des difficultés récurrentes. Le dernier rapport du Directeur des tests opérationnels et de l’évaluation [DOT&E] du Pentagone a encore relevé 871 lacunes, dont dix de catégorie n°1, c’est à dire qu’elles sont susceptibles de « causer la mort ou des blessures graves, des pertes ou des dommages importants » et qu’elles sont donc de nature à restreindre de « manière critique les capacités de préparation au combat. » En outre, l’US Air Force a récemment été contrainte de prendre des mesures pour éviter une pénurie de moteurs F-135, ces derniers ayant tendance à s’user beaucoup trop vite en raison de « défauts non signalés dans les revêtements » de leur aubes.

Selon les chiffres officiels, le coût d’une heure de vol à bord d’un F-35 s’élève à 36.000 dollars. Lockheed-Martin a assuré que ce montant serait réduit à 25.000 dollars, ce dont le général Kelly a dit douter. Qui plus est, le taux de disponibilité de l’appareil serait de 69%, ce qui est bien en deçà des 80% exigés par le Pentagone, d’après Defense News.

Pour autant, M. Smith a reconnu que le Congrès ne pouvait pas abandonner le programme F-35. Cependant, il a dit souhaiter que le Pentagone réduise sa dépendance à son égard. « Ce que je vais essayer de faire, c’est de trouver comment nous pouvons obtenir un mélange d’avions de combat qui soit le plus rentable », a-t-il dit. Reste à voir s’il sera suivi par ses collègues…

Avant lui, d’autres parlementaires s’y sont essayés, comme le très influent sénateur John McCain. « Le programme F-35 est un scandale et une tragédie en termes de coût, de calendrier et de performances », s’était-il indigné, en 2016. Et le président Trump [qui ne cachait pas son inimitié pour M. McCain] avait parlé d’un programme « hors de contrôle ».

Quoi qu’il en soit, et plus généralement, Adam Smith a dit vouloir en finir avec les programmes coûteux du Pentagone. « Nous avons gaspillé une somme spectaculaire d’argent sur des systèmes d’armes qui n’ont pas fonctionné ou qui n’ont pas tenu leur promesse », a-t-il affirmé. « L’échec que nous finissons par tolérer devient un échec à une échelle énorme. Pensez au F-35 », a-t-il conclu.

 

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