Dassault Aviation s’étonne d’être écarté de MAWS, le projet franco-allemand d’avion de patrouille maritime

En avril 2018, la France et l’Allemagne signèrent une déclaration d’intention concernant le développement en commun d’un programme appelé MAWS [Maritime Airborne Warfare System], c’est dire à devant aboutir à un nouvel avion de patrouille maritime dans les années 2030.

Et d’affirmer, à l’époque, que l’objectif était « d’étudier les conditions d’un développement d’une solution européenne permettant de disposer d’une capacité de patrouille maritime autonome et performante en Europe. »

L’idée du programme MAWS est donc de mettre au point un « système de systèmes » reposant sur un avion de patrouille maritime placé au centre d’un réseau de capteurs [sémaphore, capacités de lutte anti-sous-marine, satellites, drones, etc]. Outre le volet aérien, ce projet suppose des radars, capacités de guerre électronique, de bouées acoustiques et, évidemment, des armements dédiés à la lutte anti-navire et anti-sous-marin [missiles, torpilles].

Initialement, le MAWS devait permettre à la Marineflieger [l’aviation navale allemande, ndlr] de remplacer ses huit avions de patrouille maritime P3C Orion. Seulement, l’an passé, Berlin a fait connaître son intention de renouveler ses capacités en la matière sans attendre, c’est à dire d’ici 2025 au plus tard, alors que Paris a lancé un programme de modernisation des Atlantique 2 de la Marine nationale pour prolonger leur vie opérationnelle jusqu’en 2030. Pour autant, la décision allemande n’a pas remis en cause le projet… qui a pourtant pris du retard.

Cela étant, la coopération entre la France et l’Allemagne risque d’être compliquée, mais pas forcément pour les mêmes raisons qui expliquent les difficultés que connaît actuellement le Système de combat aérien du futur [SCAF]. En tout cas, tel est l’avis exprimé par Éric Trappier, le Pdg de Dassault Aviation, lors d’une conférence de presse donnée le 5 mars à l’occasion de la présentation des résultats annuels de l’avionneur.

« La grande différence dans le programme franco-allemand de patrouille maritime, c’est qu’on a mis le seul qui sait de quoi il parle dehors », a lancé M. Trappier en parlant de Dassault Aviation. « Qui a l’expérience depuis 1958 de l’avion de patrouille maritime? Qui d’autre? », a-t-il ensuite demandé.

« On a fait l’Atlantic [Bréguet a été repris par Dassault en 1971, ndlr], on a fait l’Atlantique 2. On a fait la modernisation de l’Atlantique 2. On fait OCEAN [Optimisation continue de l’entretien de l’Atlantique 2], le contrat verticalisé des avions de patrouille maritime et on fait des avions de surveillance maritime [programme Falcon Albatros, ndlr]. Notre compétence est là et nous ne sommes pas au tour de table du MAWS », a enchaîné M. Trappier.

Pour rappel, l’aviation de patrouille maritime est l’une capacités essentielles pour la dissuasion nucléaire française, dans la mesure où elle permet d’assurer la sortie, en toute sécurité, des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de leur base de l’Île-Longue, en s’assurant qu’ils ne seront pas pistés par des sous-marins étrangers. En outre, les Atlantique 2 de la Marine nationale sont sollicités pour d’autres missions, notamment dans le domaine du renseignement.

En octobre dernier, le Délégué général pour l’armement [DGA], Joël Barre, avait indiqué que le programme MAWS allait entrer dans une nouvelle phase avec l’attribution annoncée d’une étude de faisabilité et d’architecture système à un groupement formé par Thales et trois entreprises allemandes, dont Hensoldt, ESG [Elektroniksystem] et Diehl. Et il avait ensuite expliqué que Dassault Aviation et Airbus d’interviendraient que lors de la seconde étape du projet, c’est à dire quand viendra le moment de mettre au point une « nouvelle plateforme aérienne. »

En attendant, la décision de Berlin de remplacer sans attendre les P-3C Orion de la Deutsche Marine complique la donne. Parmi les appareils officieusement cités, on trouve le RAS 72 « Sea Eagle » de Rheinland Air Service, le C-295 MPA d’Airbus et le P8A Poeseidon de Boeing.

Photo :  Marine nationale

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