Une étude plaide pour que les pays de l’Otan dépourvus d’avions de 5e génération se mettent au diapason du F-35

Pour le moment, parmi les 30 pays de l’Otan, ceux qui sont dotés – ou ont l’intention de l’être – de F-35, un avion « furtif » de 5e génération, sont minoritaires. On en compte en effet que huit, dont les États-Unis, la Belgique, le Danemark, l’Italie, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne et le Royaume-Uni. Cette liste pourrait éventuellement être complétée par le Canada si ce type d’appareil est retenu dans le cadre de l’appel d’offres lancé par Ottawa pour moderniser l’Aviation royale canadienne.

Pour les autres alliés, le choix du F-35 n’est absolument pas d’actualité. C’est évidemment le cas de la France, mais aussi ceux de l’Allemagne [qui a opté pour un mélange d’EF-2000 et de F/A-18 Super Hornet] et de l’Espagne [20 Eurofighter supplémentaires seront bientôt commandés par Madrid, ndlr]. Ces trois pays sont par ailleurs engagés dans le programme SCAF [Système de combat aérien du futur], centré autour d’un avion de 6e génération. Pour d’autres, ce sont les finances qui ne peuvent pas suivre [Bulgarie, Croatie, Slovaquie, République tchèque, pays baltes, etc].

Or, pour la Rand Corporation, un centre de réflexion basé à Santa Monica [Californie], cela pourrait éventuellement poser un problème dans le cas d’une confrontation potentielle entre l’Otan et la Russie.

Et l’un des scenarii le plus fréquemment évoqué est celui où Moscou aurait la tentation de « tirer parti d’un déséquilibre régional au niveau des forces terrestres pour occuper une partie du territoire de l’Otan » [comprendre : les pays baltes], avance la Rand Corporation. Une fois passé ce coup de force, la Russie déploierait des capacités de déni et d’interdiction d’accès sur les territoires ainsi conquis. Puis, elle en ferait un « fait accompli similaire à celui observé en Crimée » et chercherait ensuite à entamer l’unité politique de l’Otan en appelant à des négociations.

Dans un tel cas, avancent les analyste du centre de réflexion, les « capacités des chasseurs européens de cinquième génération [comprendre : les F-35] à pénétrer les défenses aériennes russes et à apporter une importante contribution au combat dès le début d’une intervention remettrait très probablement en question la logique de ce scénario, en augmentant, pour la Russie, la prise de risques associés à cette approche. »

Dans sa réflexion, la Rand part du principe que les « dirigeants politiques et militaires russes restent préoccupés par l’avantage relatif de l’Otan dans le domaine aérien, une dynamique qui s’intensifiera probablement au cours des cinq prochaines années à mesure qu’un grand nombre de chasseurs de le cinquième génération entreront dans les inventaires » des alliés. D’où, explique-t-elle, « l’investissement de la Russie dans des systèmes intégrés de défense aérienne », ce qui « souligne sa vision de l’importance de la puissance aérienne. »

Le pré-requis, que l’on peut toujours éventuellement contester, à cette affirmation est que les capacités du F-35 [futivité, fusion de capteurs, etc] ne sauraient être prises en défaut. Seulement, pour le moment, sur les 1.900 avions de combat alignés par les membres européens de l’Otan, « moins de 100 sont de cinquième génération ». Et ce nombre est appelé à doubler d’ici 2025.

Or, si les forces aériennes européennes ont « apporté des contributions substantielles aux précédentes opérations alliées menées en coalition », elles l’ont fait dans des environnement « permissifs ». Ce qui serait beaucoup plus compliqué dans le cas d’une confrontation avec les forces russes. « Au cours des phases d’ouverture d’un conflit avec la Russie, la vulnérabilité aux menaces terrestres avancées limiterait le rôle de la plupart des plates-formes de quatrième génération », insiste la Rand.

Et cela, même si des avions comme le Rafale ou l’Eurofighter peuvent frapper des endroits stratégiques via des missiles de croisière à longue portée ou réaliser des missions de guerre électronique. Ce n’est qu’une fois les défenses aériennes adverses réduites, poursuit-elle, qu’ils pourraient alors jouer un rôle plus large, comme fournir un appui aérien rapproché aux forces terrestres.

Si « l’intégration de chasseurs de cinquième génération aux autres forces aériennes de l’Otan est nécessaire pour maximiser le potentiel de combat », estime la Rand Corporation, il n’en reste pas moins qu’il faudra bien composer avec la prédominance de chasseurs-bombardiers de génération 4/4+ durent les dix à quinze années à venir. Et un point qui semble oublié est que, à cet horizon, les capacités de combat aérien seront très certainement bouleversées avec l’apparition de « systèmes de systèmes », reposant sur l’usage d’effecteurs, l’intelligence artificielle et des réseaux interconnectés.

En attenant, le centre de réflexion recommande de développer une plus grande interopérabilité entre les diverses flottes d’avions de combat.

« Les forces aériennes européennes dépourvues de capacités de cinquième génération pourraient participer au développement de nouveaux concepts opérationnels », avance en effet la Rand Corporation. L’idée étant de tirer le meilleur parti de la combinaison des différents types d’appareils en service.

Et d’estimer également, dans le même registre, qu’il faudrait « donner la priorité aux investissements qui permettent aux avions de quatrième génération et à d’autres plates-formes de compléter les capacités uniques du F-35. » Ainsi, estime la Rand Corportation, « les aéronefs et les systèmes terrestres et maritimes de quatrième génération doivent pouvoir recevoir des informations de ciblage du F-35. Il faut également moderniser les radars des avions et stocker des munitions. »

Évidemment, l’entraînement des équipages [via des exercices « synthétiques »] et la disponibilité des appareils sont deux éléments primordiaux dans la démonstration de la Rand Corporation. En effet, elle recommande des efforts en matière de maintien en condition opérationnel, notamment via des investissements visant à améliorer l’approvisionnement en piéces de rechange et à réduire le temps d’immobilisation des appareils. Et cela vaut aussi bien pour les avions de génération 4/4+ que pour les F-35… dont les problèmes de logistique affectent la disponibilité.

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