Israël est soupçonné d’être responsable des mystérieuses explosions ayant eu lieu sur des sites sensibles iraniens

Ce 7 juillet, la ville de Bakershahr, située à une trentaine de kilomètres au sud de Téhéran, a été le théâtre d’une explosion survenue à l’usine « Oxijen », dont on ignore l’activité et qui a fait au moins 2 morts et 3 blessés. Officiellement, la cause serait accidentelle, des ouvriers ayant fait preuve de « négligence lors du remplissage de bonbonnes d’oxygène. »

En tout cas, a indiqué Amin Babaï, le préfet de la ville, cité par l’AFP, l’explosion « a été tellement puissante que les murs de l’usine [de pièces détachées pour automobiles] Saipa Bratz à proximité ont également été détruits. » Cela étant, et selon le Mossad [renseignement extérieur israélien], la zone en question est connue pour avoir abrité des installations ayant servi à cacher les « archives nucléaires » du programme iranien.

Quoi qu’il soit, depuis une dizaine de jours, les incidents de ce type se multiplient en Iran. Le 4 juillet, un incendie impressionnant s’est déclaré au niveau d’un transformateur de la centrale électrique d’Ahvaz, provoquant ainsi des coupures de courant dans la région. Le même jour, une fuite de gaz chloré a été signalée au complexe pétrochimique du port de Bandar-e Emam Khomeyni.

Le 30 juin, un autre incendie s’étant propagé à des bonbonnes de gaz stockées dans un sous-sol a provoqué une explosion ayant ravagé la clinique Sina Athar, située dans le nord de Téhéran. Le bilan de ce drame a été 19 tués [dont 15 femmes]. Quatre personnes ont ensuite été interrogées dans le cadre de l’enquête, dont le directeur de l’établissement. Cité par l’agence Irna, le vice-ministre iranien de la Santé, Iraj Harirchi, a démenti la « présence de matière radiaoctive ». Et d’insister : « La clinique Sina Athar n’était pas un centre de médecine nucléaire » mais « un centre dentaire et de radiologie. »

Négligences ou simples accident peuvent expliquer ce que l’on pourrait appeler une « loi des séries ». Cela étant, deux autres explosions ont affecté des sites particuliers dans la mesure où il font partie du programme nucléaire iranien.

Ainsi, dans la nuit du 26 juin, un lueur est apparue dans le ciel de Téhéran. La cause? Une explosion survenue à une trentaine de kilomètres à l’est de la capitale iranienne. Après quelques heures de confusion, le ministère iranien de la Défense a indiqué qu’un « réservoir de gaz industriel » avait explosé.

Or, le secteur en question est aussi celui de la base de Parchin, où des explosions ont déjà eu lieu par le passé. Pour rappel, et selon l’Agence internationale de l’énergie atomique [AIEA], ce site a été utilisé pour des expériences hydrodynamiques, généralement faites poyur mettre au point la détonique d’une arme nucléaire.

Mais l’imagerie satellitaire a permis de déterminer que l’explosion vue depuis Téhéran s’était produite sur la base de Khojir, située non loin de celle de Parchin. Or, il s’agit d’un centre production de propergols liquides et solides destinés aux missiles iraniens. « Il est probable qu’une sorte de réservoir de stockage de gaz ou de liquide ait explosé », a commenté un analyste du Middlebury Institute of International Studies de Monterey [Californie] dans les colonnes du New York Times.

L’hypothèse d’un sabotage a évidemment été avancée, avec des regards tournés vers les services israéliens et/ou américains. Mais, comme à son habitude, les responsables israéliens n’ont pas souhaité faire de commentaire.

Une semaine plus tard, un autre site du programme nucléaire iranien a connu un « incident », à savoir celui de Natanz, lequel abrite plusieurs milliers de centrifugeuses servant à enrichir l’uranium.

Depuis que l’Iran s’affranchit de plus en plus des engagements pris dans le cadre de l’accord de Vienne sur ses activités nucléaires, le « complexe » de Natanz est un élément important de son programme.

Dans un premier temps, les autorités iraniennes ont parlé d’un « incendie » ayant fait peu de dégâts. Puis, l’agence iranienne de l’énergie atomique a fini par admettre que les dommages étaient beaucoup plus importants, au point d’être susceptibles de « ralentir le plan de développement et de production de [centrifugeuses] avancées ». Et, le 3 juillet, le porte-parole du Conseil suprême de la sécurité nationale a confirmé à demi-mots l’hypothèse d’un sabotage, en affirmant que les enquêtes avaient « permis d’établir avec précision les causes de l’accident […] au sein du complexe nucléaire de Natanz » mais que leurs résultats seraient dévoilés plus tard pour « certaines raisons de sécurité ».

La veille, soit le jour de « l’incident », l’agence Irna avait publié une dépêche mettant engarde Israël et les Etats-Unis contre toute atteinte à la « sécurité » et aux « intérêts » de l’Iran.

Histoire de brouiller les pistes, le service en persan de la BBC a indiqué avoir reçu un communiqué qui, signé par les « Guépards de la Patrie », une organisation dissidente inconnue, revendiquait une « attaque contre le centre nucléaire de Natanz » quelques heures avant la diffusion des premières informations relatives à ce qui venait de se passer sur le site nucléaire iranien.

A priori, l’incident de Natanz ne serait pas dû à une cyberattaque, comme cela fut le cas en 2010, avec le virus Stuxnet. Le New York Times avance qu’une bombe puissante aurait été utilisée. Ce qui lui aurait été confirmé par un membre des Gardiens de la révolution iraniens. Et d’ajouter, citant un responsable du renseignement américain spécialiste du Moyen-Orient, qu’Israël en serait à l’origine.

« Tout ce qui se passe en Iran n’est pas forcément lié à Israël », a cependant fait valoir Benny Gantz, le nouveau ministre israélien de la Défense. Mais, dans le même temps, Gabi Ashkenazi, son collègue des Affaires étrangères, a rappelé devant la presse que l’État hébreu a « l’objectif d’empêcher l’Iran de développer une arme nucléaire » et que, pour cela, il menait des « actions qu’il vaut mieux taire. »

En tout cas, et quel qu’en soit l’auteur, ce sabotage est un succès opérationnel majeur dans la mesure où il a fallu réunir des renseignements très précis pour s’infiltrer sur le site nucléaire iranien pour y déposer une bombe à l’endroit susceptible de faire un maximum de dégâts.

Photo : Explosion sur la base de Khojir, vue depuis Téhéran (via Twitter)

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