Les États-Unis veulent se doter de milliers de drones à bas coûts pour contrer la « masse » des forces chinoises

Pour espérer l’emporter sur un adversaire ayant l’avantage du nombre – tant en hommes qu’en matériel – dans un contexte dit de « haute intensité », une force armée doit non seulement faire preuve d’agilité mais aussi et, surtout, disposer de troupes bien entraînées et dotées d’équipements d’une qualité supérieure et technologiquement plus avancés.

Seulement, et comme l’avait souligné le général Philippe Lavigne quand il était encore chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace [CEMAAE], ce « différentiel de qualité » au niveau des armements tend peu à peu à s’estomper. En Chine, l’évolution de l’Armée populaire de libération [APL] le montre : en plus d’avoir de la « masse », celle-ci dispose d’équipements de plus en plus performants, comme par exemple le chasseur-bombardier Chengdu J-20, dont la cadence de production a, semble-t-il, augmenté au cours de ces derniers mois.

Dans un entretien accordé à DSI en 2019, le général Lavigne ne voyait qu’un seul levier possible pour augmenter la « masse » avec des budgets contraints : l’innovation, en misant sur les drones, l’intelligence artificielle et une connectivité accrue entre les plateformes.

« Cela ouvre la voie au déploiement prochain de nouvelles plates-formes non pilotées [remote carriers, loyal wingman] qui, tout en fournissant de la masse facilitant la pénétration, permettront de multiplier les senseurs et les effecteurs » ainsi que de « réduire les risques encourus par les équipages dans certaines phases de vol particulièrement exposées », avait alors soutenu l’ancien CEMAAE.

Et c’est exactement la voie que va prendre le Pentagone, via la « Replicator Initiative », dont les grandes lignes ont été dévoilées par Kathleen Hicks, la secrétaire américaine adjointe à la Défense, lors de la conférence de la National Defense Industrial Association à Washington, le 28 août. Et celle-ci l’a dit sans ambage : ce projet vise à « contrer le renforcement militaire de la Chine ».

Selon les estimations, la Chine disposerait actuellement de la force navale la plus importante du monde, d’environ 2000 avions de combat et d’un peu plus de 2,3 millions de militaires [auxquels il faut ajouter les milices].

« Replicator est destiné à nous aider à surmonter le plus grand avantage de la Chine, qui est la masse. […] Nous allons contrer la masse de l’APL avec notre propre masse. Mais la nôtre sera plus insaisissable et plus difficile à battre », a assuré Mme Hicks. Toutefois, un tel avantage pourrait être remis en cause par un programme chinois analogue…

Pour cela, il est question de doter les forces armées de plusieurs milliers de drones [aériens, terrestres et navals] dans un délai de 18 à 24 mois, l’objectif étant de produire des systèmes autonomes « petits, intelligents, bon marché et nombreux ». Et donc « consommables ».

« Avec des personnes intelligentes, des concepts intelligents et une technologie intelligente, nos forces armées seront plus agiles », a fait valoir la numéro deux du Pentagone, qui a promis qu’elle donnerait plus de détails sur Replicator dans les jours à venir.

L’un des défis de ce programme sera de trouver des solutions pour produire de tels drones à une si grande échelle dans des délais aussi contraints « Il s’agit d’un changement culturel autant que technologique », a admis Mme Hicks. Cependant, de tels travaux seront utiles en cas de conflit : selon le Royal United Services Institute [RUSI], les forces ukraniennes ont pu perdre jusqu’à 10’000 drones aériens par mois dans les combats contre leurs homologues russes.

À noter que « Replicator » sera distinct de projets déjà lancés, comme le CCA [pour Collaborative Combat Aircraft], qui vise à développer et à acquérir un millier de drones de type loyal wingman [« ailier fidèle »], comme le XQ-58A Valkyrie, dans le cadre du programme NGAD [Next-Generation Air Dominance]. Une enveloppe de 5,8 milliards de dollars a été demandée à cette fin.

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