Cuba a l’intention de renforcer ses relations militaires avec la Chine et la Russie

Début juin, le Wall Street Journal a lancé un pavé dans la mare en avançant que Pékin et La Havane était en train de négocier l’installation d’une station d’écoutes électroniques à Cuba [soit à seulement 160 km de la Floride, ndlr] en échange d’une aide économique de plusieurs milliards de dollars.

Sans surprise, les autorités cubaines ont démenti l’existence d’un tel projet. C’est une « information totalement mensongère et infondée », a immédiatement réagi Carlos Fernandez de Cossio, le vice-ministre cubain des Affaires étrangères. Cuba « rejette toute présence militaire étrangère » en Amérique latine, « y compris les nombreuses bases militaires et troupes américaines », a-t-il ajouté. Et de soutenir que « des calomnies de ce type sont fréquemment fabriquées par des fonctionnaires des États-Unis ».

En revanche, l’administration Biden a également démenti les informations du Wall Street Journal. « J’ai vu l’article de presse. Ce n’est pas exact », a en effet déclaré John Kirby, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche. « Ce que je peux vous dire, c’est que notre administration s’est inquiétée dès le premier jour des activités d’influence menées par la Chine à travers le monde, et particulièrement dans cet hémisphère et dans cette région », a-t-il ensuite ajouté.

De son côté, le porte-parole du Pentagone, le général Pat Ryder, a réfuté le papier du journal économique. « Nous n’avons pas connaissance de l’installation, par la Chine et Cuba, d’un quelconque type de base d’espionnage », a-t-il dit. Vraiment?

Seulement, quelques jours plus tard, un haut responsable américain a reconnu que l’information du Wall Street Journal était partiellement exacte… car cette station chinoise d’écoutes serait, selon lui, opérationnelle depuis au moins 2019.

« Lorsque cette administration a pris ses fonctions, en janvier 2021, nous avons été informés d’un certain nombre d’efforts déployés par la Chine à travers le monde pour développer sa logistique, ses bases et ses infrastructures de collecte de renseignements à l’étranger, afin de permettre à ses forces armées de projeter leur puissance militaire à plus grande distance », a dit ce haut responsable. « Ces efforts comprennent des installations de collecte de renseignements à Cuba, qui ont été modernisées en 2019 », a-t-il ajouté.

Pourquoi cette volte face de l’administration Biden? Relevant que les « premières déclarations trompeuses » de celle-ci ont « suscité une certaine méfiance au sein des médias et des parlementaires », le site Politico a avancé que la Maison Blanche ne voulait pas jeter une ombre sur le déplacement que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, devait faire à Pékin. Déplacement qui avait été reporté une première fois après l’affaire du ballon stratosphérique chinois qui avait survolé le territoire des États-Unis en février dernier…

Mais, visiblement, Pékin a d’autres projets à Cuba… Comme celui d’y installer un centre d’entraînement militaire. Cette information, encore une fois révélée par le Wall Street Journal, n’a pas été démentie par les autorités américaines.

« J’ai dit très clairement que nous avons de profondes inquiétudes au sujet des activités militaires de la République populaire de Chine à Cuba », a en effet assuré M. Blinken, à son retour de Pékin. « C’est quelque chose que nous allons surveiller de très, très près et nous avons été très clairs à ce sujet. Et nous protégerons notre patrie, nous protégerons nos intérêts », a-t-il ajouté.

Mais la plus grande île des Antilles n’intéresse pas seulement la Chine… mais aussi la Russie. En janvier 2022, Moscou avait dit ne pas exclure l’envoi de troupes en Amérique du Sud si l’Otan ne « limitait pas ses activités » dans son proche environnement. Et, évidemment, compte tenu du poids de l’histoire [avec la crise des missiles de 1962], Cuba ne pouvait qu’être dans tous les esprits… D’autant plus que, six ans plus tôt, les autorités russes avaient déjà envisagé d’y rétablir une présence militaire.

Un tel projet va-t-il se concrétiser? À Moscou, le 27 juin, soit quelques jours après la mutinerie du groupe paramilitaire Wagner, le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, a reçu le général Alvaro Lopez, son homologue cubain.

De quoi ont-ils parlé? Le compte-rendu qu’en a fait le ministère russe de la Défense est assez sybillin… Et il a seulement évoqué des discussions sur un « large éventail de questions dans les domaines militaire et militaro-technique », tout en soulignant les très bonnes relations russo-cubaines.

« Sans aucun doute, Cuba a été et continue d’être l’allié le plus important de la Russie dans la région. Nos amis cubains ont confirmé leur attitude envers notre pays, démontrant même leur pleine compréhension des raisons du lancement d’une ‘opération militaire spéciale’ [sic] en Ukraine », a déclaré M. Choïgou.

D’après l’agence de presse cubaine Prensa Latina, cette rencontre aurait permis d »évoquer « une série de projets militaro-techniques » ainsi qu’une coopération militaire plus étroite.

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