La Commission européenne envisage un second projet d’intercepteur d’armes hypersoniques, cette fois confié à MBDA

Chef de file du programme européen [Timely Warning and Interception with Space-based TheatER surveillance] qui, financé par l’Union européenne [UE] au titre de la Coopération structurée permanente [CSP ou PESCO], vise à développer un système de défense contre les missiles hypersoniques, MBDA France avait toutes les cartes en main pour être désigné coordinateur d’un autre projet lié, à savoir l’European Hypersonic Defence Interceptor [EU HYDEF]. D’autant plus que, l’industriel venait de lancer son projet de missile intercepteur, appelé AQUILA

Seulement, en juillet 2022, et à la surprise générale, la Commission européenne annonça que la direction du programme EU HYDEF, doté de 110 millions d’euros, allait être confiée à SENER Aeroespacial, un groupe espagnol sans expérience en matière de défense antimissile et de vol hypersonique … Et que l’Espagne, l’Allemagne [avec Diehl Defence], la Belgique, la Norvège [qui n’est pas membre de l’UE, ndlr], la Pologne, la République tchèque et la Suède y prendraient part.

Ce choix ne fut pas seulement critiqué en France [où la presse parla de « gifle » et de « camouflet »]. Il suscita aussi de l’incompréhension en Italie, où la Rivista Italiana Difesa [RID] dénonça la politique du « juste retour » industriel défendue par la Commission.

« C’est bien de vouloir assurer une base industrielle solide partout en Europe, avec un oeil sur les PME… Mais dans le cas d’un programme d’une telle valeur stratégique, il faut regarder les compétences industrielles, comme celles de MBDA qui, à ce jour, est la seule société en Europe pouvant se prévaloir d’une solide expérience dans la défense antimissile, grâce aux programmes [franco-italiens, ndlr] SAMP/T et SAMP/T NG », fit valoir la revue italienne.

Aussi, il fut prêté à MBDA l’intention de contester la décision de l’exécutif européen. En outre, lors de la présentation de ses résultats 2022, le 15 mars dernier, son Pdg, Éric Béranger, a assuré qu’il n’était nullement question d’abandonner AQUILA.

« Nous avons l’intention de continuer à travailler sur ce projet » car « je pense que nous [en Europe] avons besoin d’une protection contre [les missiles] hypersonique[s] », a-t-il dit, selon des propos rapportés par Aviation Week. Et d’insister : « Nous croyons aux progrès que nous avons fait et nous devons continuer ».

Par ailleurs, M. Béranger a fait valoir que les travaux effectués par MBDA au cours des vingt dernières années ont permis de « bien comprendre comment se défense contre la menace » [hypersonique]. « Nous avous quelque chose que nous pouvons mettre sur la table », a-t-il insisté. Mais à la condition de trouver les financements nécessaires, ce qui passe par le soutien de plusieurs pays…

À moins que la Commission européenne reconsidère sa position… Ce qui semble être le cas, selon Der Spiegel et la revue transalpine RID.

« Les pays de l’UE se disputent depuis des mois pour savoir qui obtiendra le financement pour un système de défense contre les armes hypersoniques. Désormais, il y a aura deux projets », avance l’hebdomadaire allemand, confirmant ainsi une information de RID.

« La Commission européenne a décidé de lancer un deuxième programme au sein du Fonds européen de la défense pour le développement d’un futur intercepteur endo-atmosphérique destiné à contrer les menaces […] hypersoniques dans le cadre du projet TWISTER », avait auparavant écrit la revue italienne. Et d’ajouter : « Ce deuxième programme sera bien évidemment mené par MBDA, notamment MBDA France […] et sera basé sur l’intercepteur actuellement connu sous le nom d’AQUILA ».

Cependant, le montant de l’investissement envisagé pour ce second programme confié à MBDA n’a pas été précisé. Sans doute qu’il dépendra de l’état d’avancement du projet AQUILA.

En tout cas, l’idée de la Commission européenne serait donc de mettre en concurrence deux aproches en matière de défense contre les missiles hypersoniques. Par la suite, et sous réserve que ce programme ne soit pas abandonné en cours de route, il n’y aura que deux issues possibles : soit la meilleure sera retenue, soit elles convergeront.

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