L’armée américaine remet le dirigeable au goût du jour

En 1906, la France innovait en mettant en service le Lebaudy-4, le premier dirigeable militaire. Mais ce fut l’armée allemande qui allait, par la suite, généraliser l’usage de ce matériel au cours de la Première Guerre Mondiale, en commandant, auprès de la compagnie Zeppelin, une centaine d’exemplaires afin de mener des missions de reconnaissance et de bombardement. D’une grande vulnérabilité face à l’aviation de chasse naissante, près de 60% d’entre eux furent perdus mais, ils accomplirent, néanmoins, une cinquantaine de raids, notamment sur l’Angleterre.

Après la guerre, ces engins continuèrent de susciter l’intérêt des militaires. Aux Etats-Unis, des dirigeables porte-avions furent même testés par l’US Navy au cours des années 1930, avec les USS Los Angeles, USS Akron et USS Macon. Mais les deux derniers s’écrasèrent en mer.

Le manque de fiabilité des dirigeables causèrent leur perte, notamment après le drame du Hindenburg, le 6 mai 1937, qui, gonflé par 200.000 m3 d’hydrogène, brûla à New York. Cela marqua la fin des vols commerciaux transatlantiques avec ce type d’appareil. Et ils devinrent inutile sur un plan militaire avec les progrès accomplis par l’aviation.

Pourtant, les dirigeables ont un atout de taille : leur autonomie. Et dans un conflit où la supériorité aérienne est acquise, ou même pour des missions de sécurité intérieure, l’on pourrait imaginer en faire voler quelques uns, dotés de caméras et de capteurs, pour faire de la surveillance et du renseignement, d’autant plus qu’ils n’auraient pas de problèmes avec la rotation de la terre, comme les satellites.

D’où l’idée du Pentagone de confier à Lockheed-Martin, en 2003, le soin de développer un prototype de dirigeable de 150 mètres de long pour 49 mètres de d’envergure, capable de voler à plus de 17.000 mètres d’altitude et doté de capteurs et de panneaux solaires pour son alimentation électrique.

Auparavant, l’armée américaine avait déployé, en Afghanistan et en Irak, d’énormes ballons captifs fixés à un mât, conçus par Raytheon dans le cadre du programme Rapid Aerostat Initial Development (RAID), afin d’assurer une surveillance permanente de ses bases opérationnelles.

Depuis, le Pentagone travaille actuellement, selon des informations diffusées par Danger Room, sur deux projets de dirigeables. Le premier, appelé Blue Devil (diable bleu), serait « l’un des plus imposants conçus depuis la Seconde Guerre Mondiale ». D’un volume de 40.000 m3, il mesurera une centaine de mètres, ce qui devrait être lui permettre d’embarquer assez d’hélium et de carburant pour tenir en l’air pendant une semaine à 6.000 mètres d’altitude.

Le second devrait être encore plus performant. Développé par Northrop-Grumman pour 517 millions de dollars, le « Long Endurance Multi-Intelligence Vehicle » (LEMV) pourrait quant à lui rester en l’air pendant 3 semaines.

Ces dirigeables, pilotés à distance, seront équipés d’une mutitude de caméras et de capteurs WAAS, lesquels produiront 274 téraoctets d’informations par heure, stockés sur 1.870 disques durs.

Les analystes du renseignement américain ont déjà du mal à traiter les informations recueillies par les drones équipés de capteurs WAAS et il en faut 2.000 pour analyser les images fournies par un seul engin. Depuis le 11 septembre 2001, la quantité de données obtenues grâce aux différents moyens de surveillance a augmenté de 1.600% aux Etats-Unis. De quoi donc donner le tournis aux militaires chargés de les exploiter, qui suivent simultanément une dizaine d’écrans et une trentaine de conversation avec des correspondants sur le terrain.

Aussi, les dirigeables, à commencer par le Blue Devil, embarqueront un supercalculateur pouvant traiter 300 téraoctets par heure et qui sera chargé de faire le tri et de fournir les informations demandées en moins de quinze secondes à, par exemple, une unité d’infanterie engagée dans une opération. En clair, il s’agit de transmettre uniquement ce qui a de l’intérêt, donc ce que l’on recherche plus particulièrement.

Le premier vol du Blue Devil, dont le développement coûte 211 millions de dollars, devrait avoir lieu le 15 octobre prochain. Quant au LEMV, l’objectif est de le faire voler en décembre 2011.

Photo : Le LEMV de Northrop-Grumman

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