Programme Scorpion : Nexter, Thales et Safran auraient une longueur d’avance
Le ministre de la Défense, Hervé Morin, a officiellement lancé, le 22 février dernier, le programme « Synergie du contact par la polyvalence et l’infovalorisation », encore appelé, pour faire simple, « Scorpion ».
Ce projet d’armement terrestre, qualifié de plus important depuis celui du char Leclerc par Hervé Morin, intègre trois contraintes : la protection maximale pour les troupes dites de contact, ce qui suppose des solutions technologiques innovantes, la souplesse d’action, c’est à dire la mobilité tactique et, enfin, la notion de « justes effets » ou encore de « force maîtrisée » qui conditionne l’usage de la force en fonction du contexte.
L’objectif du programme Scorpion est de permettre, à terme, aux 8 brigades interarmes de l’armée de Terre de maintenir une supériorité face à un adversaire potentiel, que ce soit par la force ou par la dissuasion, en mettant en réseau tous les systèmes d’information et de combat.
Pour l’instant, ce projet, qui a fait l’objet de premières études en 2004, en est au « stade d’élaboration ». La prochaine étape concernera le choix de l’industriel qui en sera l’architecte. L’annonce du lauréat devrait être faite à l’occasion du prochain salon de l’armement terrestre de Satory, qui se tiendra du 14 au 18 juin 2010.
Ce contrat initial de 70 millions d’euros a une importance capitale pour l’industriel qui l’obtiendra car il lui permettra d’influencer les choix ultérieurs qui porteront sur les systèmes d’armes et les matériels du programme Scorpion, et ce, pour 5 milliards d’euros, du moins pendant la première phase (2010-2020).
En fait, trois consortiums se disputent les faveurs de la Direction générale de l’armement (DGA) pour définir l’architecture générale du programme Scorpion : EADS, allié à la société américaine SAIC, l’ex-Compagnie des Signaux, aujourd’hui C&S avec Ineo, la filiale de GDF-Suez et enfin, Nexter associé pour la circonstance avec Thales et Safran.
Or, un bruit court selon lequel ce serait le dernier trio qui aurait les faveurs de la DGA. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce choix. En premier lieu, cela pourrait pousser Thales et Safran à se mettre d’accord sur leurs échanges d’actifs afin de rationaliser leurs activités de défense alors que les négociations entre ces deux entités sont actuellement dans l’impasse.
Autre motivation : le rapprochement entre Thales et Nexter, afin de consolider le secteur de l’armement terrestre. Cela fait un moment qu’il est question de cette perspective mais en décembre dernier, le patron du groupe français d’électronique de défense, Luc Vigneron, avait estimé que cette opération n’était pas d’actualité.
Enfin, le choix de Nexter a une certaine cohérence. L’ex-Giat Industries est un fournisseur traditionnel de l’armée de Terre et c’est surtout le fabriquant du char Leclerc, lequel devra être modernisé au cours de l’exécution du programme Scorpion.
Ce dernier prévoit d’ailleurs le remplacement des Véhicules de l’avant-blindé (VAB) par des Véhicules blindés multi-rôles (VBMR) ainsi que des AMX-10 RC et des Sagaie par des Engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC).
A cette fin, Panhard, le constructeur du Sagaie, du PVP et du VBL, a présenté, le 4 mai dernier, une version du EBRC avec le SPHINX (Secret Project for High Intensity and New Conflicts), qui est un engin sur roues de 17 tonnes, aérotransportable, doté d’un canon de 40mm et dont la conception permettrait de mieux résister aux effets des engins explosifs improvisés (IED). Le groupe Sagem (filiale de Safran) aurait été désigné pour lui fournir ses équipements optroniques.
Pour commercialiser son SPHINX, Panhard chercherait un partenaire… Lequel pourrait bien être Nexter. En effet, Christian Mons, son pdg, avait annoncé, en décembre 2009, son intention de devenir majoritaire au capital de l’ancien Giat. « Nos deux entreprises sont en ordre de bataille mais peuvent être encore plus fortes ensemble. Si nous finalisons la reprise, qui doit passer par une loi de dénationalisation de Nexter, il n’y aura pas de restructuration. Nous nous appuierons sur les équipes actuelles pour viser plus haut » avait-il déclaré à l’époque.