Selon la DGA, l’industrie française de l’armement présente au moins trois « faiblesses »

Durant la crise économique due à la pandémie de covid-19, la Direction générale de l’armement [DGA] a mis en place une unité [ou « task force »] chargée d’assurer le suivi de près d’un millier d’entreprises de Base industrielle et technologie et de défense [BITD]. Beaucoup d’entre-elles, notamment celles ayant une activité dite duale [c’est à dire civile et militaire] ont durement été affectées en 2020. En outre, les exportations d’équipements militaires ont, dans le même temps, chuté de 30 à 50% selon les domaines.

Cependant, la BITD a moins souffert que d’autres secteurs industriels, en particulier grâce aux commandes du ministère des Armées et aux plans de soutien gouvernementaux, en particulier dans le domaine de l’aéronautique.

« L’une des missions de la DGA est d’assurer l’équipement des forces au travers des contrats que nous passons à l’industrie. Pendant la crise, notre Task Force a mobilisé plus de 100 agents pour aller à la rencontre des entrepreneurs. Il fallait éviter des ruptures dans l’approvisionnement des armées, qui auraient pu survenir en raison de la défaillance de certaines entreprises. Nous avons aussi renforcé nos échanges avec les grands groupes qui ont partagé plus en profondeur la connaissance de leurs sous-traitants. Les relations ont évolué entre les trois acteurs de la BITD : les grands maîtres d’œuvre, les PME-ETI », explique ainsi l’ingénieur général de l’armement [IGA] François Mestre, chef du service des affaires industrielles et de l’intelligence économique à la DGA, dans le dernier numéro du magazine « Esprit Défense« , édité par le ministère des Armées.

Cette connaissance plus fine des entreprises du secteur de la défense a également permis de déterminer que celles-ci présentent au moins trois fragilités. La première, selon l’IGA Mestre, est l’accès à certaines matières premières critiques. N’étant pas exploitées en France, il faut bien les importer… et cela dans un contexte où la concurrence est de plus en plus exacerbée.

« Très largement importées », ces matières premières « gagneraient à être ensuite recyclées », a estimé François Mestre. Ainsi en est-il du titane, largement utilisé par l’industrie aéronautique. « Il est entièrement importé. Mais 80 % de la matière n’est pas réutilisée. Si ces 80 % étaient recyclés en France, nous pourrions diminuer nos importations et donc augmenter notre souveraineté », a-t-il fait valoir.

La seconde faiblesse, qui n’est pas propre à l’industrie de l’armement, porte sur l’approvisionnement en composants électroniques, lequel expose à un risque de pénurie. Pour ces derniers, « nous devoins nous orienter vers une ‘dépendance choisie' », a dit l’IGA Mestre. Selon lui, il ne serait nullement besoin « d’investir », le sujet étant plutôt d’assurer un « savoir-faire pour la conception de ces composants ».

Enfin, la dernière fragilité concerne la machine-outil. Et pour François Mestre, elle doit faire l’obbjet d’une « attention particulière ».

En effet, a-t-il continué, cette « compétence a presque quitté le territoire. Or, avec l’arrivée de l’industrie 4.0, la maîtrise de nos outils de production, largement numérisée, garantira la maîtrise de notre production ». Et d’ajouter : « Pour rester souverains, nous devrons bien connaître les procédés de fabrication, et donc
les machines dans les secteurs les plus stratégiques ».

Cela étant, signe qu’elle est de qualité et qu’elle ne manque pas d’atouts, la BITD française est particulièrement convoitée par les investisseurs étrangers…

Et un chiffre l’illustre : entre 2017 et 2020, le nombre de dossiers d’investissement étrangers traités par la DGA a été multiplié par trois. L’an passé, a avancé l’IGA Mestre, « nous avons passé le cap des 100 dossiers ».

« Que des acteurs étrangers soient attirés par notre BITD est plutôt positif : cela prouve que nos entreprises sont compétentes et qu’elles ont du potentiel ! », s’est-il félicité. Cependant, a-t-il rappelé, « chaque investissement étranger reste conditionné à sa cohérence avec nos objectifs de souveraineté. […] Nous disposons des outils réglementaires pour trouver les solutions pertinentes. Mais l’idéal consiste à traiter le problème en amont. Cela permet d’anticiper les difficultés et d’accompagner le processus tout en respectant le secret des affaires ».

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