Un proche de M. Trump évoque le retrait des forces américaines de Grande-Bretagne à cause de Huawei

Quand le Royaume-Uni rétrocéda Hong-Kong à la Chine, il fut convenu que, durant 50 ans, l’ancienne colonie britannique disposerait d’une certaine autonomie à l’égard de Pékin ainsi que de garanties sur la liberté d’expression et une justice indépendante, en vertu du principe « un pays, deux systèmes ».

Seulement, en voulant appliquer une loi dite de « sécurité nationale » à Hong Kong, le gouvernement chinois a pris le parti de rompre avec les promesses faites il y a 23 ans. D’où la vive réaction du Royaume-Uni. « Il est encore temps pour la Chine de réfléchir, de s’éloigner du précipice et de respecter l’autonomie de Hongkong et ses propres obligations ainsi que ses obligations internationales », a ainsi déclaré Dominic Raab, le chef de la diplomatie britannique.

Dans le même temps, le locataire du 10 Downing Street, Boris Johnson, a indiqué qu’il proposerait des passeports ainsi que l’accès à la citoyenneté britanniques aux millions de Hongkongais qui en feraient la demande.

« Si la Chine impose sa loi sur la sécurité nationale, le gouvernement britannique modifiera sa législation sur l’immigration et permettra à tout détenteur de ces passeports résidant à Hongkong de venir au Royaume-Uni pour une période renouvelable de 12 mois et d’obtenir d’autres droits, y compris le droit de travailler, ce qui les mettrait sur la voie de la citoyenneté. […] La Grande-Bretagne n’aurait alors pas d’autre choix que de maintenir ses profonds liens d’histoire et d’amitié avec le peuple de Hongkong », a fait valoir M. Johnson.

Ces déclarations ont fait bondir les autorités chinoises. « Nous conseillons à la partie britannique […] de cesser immédiatement toute ingérence dans les affaires hongkongaises et les affaires intérieures de la Chine », a rétorqué Zhao Lijian, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. « Sinon, a-t-il continué, elle ne fera rien d’autre que se tirer une balle dans le pied. »

Et M. Zhao d’insister : « Nous conseillons à la partie britannique […] d’abandonner sa mentalité de Guerre Froide, son état d’esprit colonial, de reconnaître et de respecter le fait que Hongkong a été rendu. »

Un autre dossier risque de mettre un peu plus d’huile sur le feu. En janvier, malgré les avertissements de l’Otan et des États-Unis, le gouvernement de M. Johnson a autorité l’opérateur chinois Huawei à participer à la mise en place des réseaux de télécommunications 5G au Royaume-Uni. Certes, avec des restrictions, étant donné la suspicion qui entoure le groupe de Shenzhen, accusé de collusion avec le gouvernement et les services de renseignement chinois.

Qualifié de « fournisseur à risque », Huawei sera exclu des « coeurs de réseaux » et des zones sensibles pour la sécurité nationale britannique [bases militaires, stations d’écoutes, etc]. Cependant, ces restrictions ont été jugées insuffisantes par plusieurs responsables américains.

En mai, la presse britannique a fait état d’un « examen » mené outre-Atlantique afin d’évaluer les conséquences de la décision de M. Johnson sur la présence militaire américaine en Grande-Bretagne, en particulier dans le domaine du renseignement. Le déploiement de F-35 était également menacé. En clair, Huawei risquait de porter un coup à la « relation spéciale » liant Londres et Washington.

Si certains ont pu penser qu’il s’agissait de menaces en l’air, ils en seront pour leur frais. Proche du président Trump, et sénateur de l’Arkansas, Tom Cotton, qui ne passe pas pour faire dans le demi-mesure, a clairement brandi la menace d’un retrait d’une partie des forces américaines du Royaume-Uni dans le cas où Londres persisterait à autoriser Huawei à participer au déploiement de la 5G outre-Manche.

« Les dirigeants américains réalisent que nos troupes seront confrontées à un risque sécuritaire opérationnel au Royaume-Uni, qu’elles n’auraient pas dans le Pacifique », a fait valoir M. Cotton devant le comité de la défense, à la Chambre des communes. Ainsi, a-t-il continué, le déploiement d’avions F-35 au Royaume-Uni « pourraient être compromis ». Et, a-t-il prévenu, « ce serait une erreur pour les députés britanniques de prendre ce redéploiement potentiel des forces américaines pour du bluff ou un simple effort de communication. »

Selon M. Cotton, les experts américains estiment que Huawei « pourrait aider la Chine » à obtenir des informations sur la façon dont les pilotes [de F-35] se battent ainsi que des données personnelles sur ce derniers.

Quoi qu’il en soit, cette perspective d’un retrait américain a déjà fait évoluer M. Johnson sur ce dossier. D’après le quotidien The Times, Londres chercherait à mettre en place une alliance de dix pays « démocratiques » [les pays du G7, l’Australie, l’Inde et la Corée du Sud] pour trouver des solutions alternatives à la technologie développée par Huawei pour la 5G. Or, elles existent déjà, avec les Européens Nokia et Ericsson. Mais pas au même tarif…

« Nous avons besoin de nouveaux entrants sur le marché. C’est la raison pour laquelle nous avons dû accepter Huawei à l’époque », a expliqué une source gouvernementale britannique au Times.

Qui plus est, il est prêté à M. Johnson l’intention de « sortir » Huawei du réseau britannique d’ici 2023. Selon son porte-parole, cité par l’AFP, « Londres étudie actuellement les conséquences en matière de sécurité des nouvelles sanctions imposées par Washington, qui visent à entraver la capacité de l’opérateur chinois à mettre au point des semi-conducteurs à l’étranger grâce à de la technologie américaine. »

En attendant, l’évolution de la position britannique à l’égard de Huaweï ne va pas améliorer les relations entre Londres et Pékin… alors que le Royaume-Uni est en quête de partenariats commerciaux après sa sortie de l’Union européenne.

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