Covid-19 : Le ministère des Armées a financé un projet appelé « Chloroquine injectable »

En mars, l’Agence de l’innovation de Défense [AID] a lancé un appel à projets afin d’identifier des solutions innovantes pouvant être utiles pour faire face à l’épidémie de Covid-19. Ce qui a permis de financer plusieurs initiatives, comme celle du collectif « Maker for Life » concernant un respirateur à la fois simple et peu coûteux, spécialement dédié au traitement des patients contaminés par le SARS Cov-2.

Par ailleurs, des entreprises du secteurs des biotechnologies ont aussi reçu des financements pour mettre au point des tests sérologiques [comme NG Biotech. pour son NG-Test® IgG-IgM COVID-19] ou des systèmes de détection du SARS Cov-2 [à l’instar de BforCure, pour une projet d’automate mobile].

Des solutions développées au sein du ministère des Armées ont également été retenus, comme l’outil WaKED-Co, une plateforme reposant sur l’intelligence artificielle pour améliorer le temps de traitement des documents scientifiques et des essais cliniques. Ce projet a été porté par le Secrétariat général pour l’administration [SGA], le Service de santé des armées [SSA], le Centre de conduite informatique de l’armée de Terre [CCIAT] et l’Institut de recherche biomédicale des armées [IRBA], avec l’appui de la société Elastic.

Au total, l’AID a reçu plus de 2.800 projets dans le cadre de son appel. Selon les explications données par le ministère des Armées à l’AFP, quarantaine personnes, issues de la Direction générale de l’armement [DGA] et du SSA ont été réparties en quatre équipes [alpha, bravo, charlie, delta] afin d’évaluer la pertinence des projets soumis. « 80 % des dossiers ont été rejetés par la team alpha » à la première étape, a-t-il précisé.

Cette semaine, une liste de 34 projets retenus a été diffusée par le ministère des Armées. Répartis selon 6 catégories, certains ont été imaginés par des militaires, notamment dans le domaine de la protection contre le coronavirus.

En première ligne, le SSA a également soumis des solutions, comme celle appelée COVIDIAGMS, qui vise à développer un test rapide de dépistage du Covid-19 dans la salive ou encore comme le projet COVICE, pour surveiller l’évolution des patients laissés à domicile pour réagir vite en cas de dégradation rapide de leur état.

Le SSA est également à l’origine du programme PLASCOSSA, dont l’objet est de « montrer que la transfusion de plasma de convalescent aux malades COVID à risque permet de maitriser et d’éviter la dégradation rapide de leur état de santé ». Un autre projet du SSA, appelé PREVCHLOROCO, se propose de protéger le personnel de soin. À-t-il un rapport avec la chloroquine? Le document du ministère des Armées ne le précise pas…

En revanche, le projet « Choloroquine injectable » ne laisse aucun doute sur le sujet. Selon la description succinte qui en est faite, il s’agit de « disposer d’une forme injectable de chloroquine pour les patients COVID-19 sévères ».

Pour rappel, la chloroquine et l’hydroxychloroquine sont deux molécules différentes : l’une est prescrite contre le paludisme [Nivaquine] quand l’autre sert à traiter le lupus et la polyarthrite. Cependant, depuis quelques semaines, il est d’usage ne plus faire de distinction…

Quoi qu’il en soit, la chloroquine/hydroxycloroquine est une molécule ancienne qui a beaucoup fait parler ces derniers temps étant donné qu’elle fait partie du traitement – décrié – préconisé par le professeur Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses tropicales émergentes et directeur de l’Institut hospitalo-universitaire en maladies infectieuses de Marseille [IHU].

Le traitement en question, qui associe 600 mg d’hydroxychloroquine [plaquenil] à de l’azithromycine [un antibiotique] fait l’objet de vives controverses, notamment sur son efficacité réelle ou supposée contre le Covid-19 ainsi que sur ses effets secondaires.

Pour autant, le 24 avril dernier, le ministère des Armées a reconnu avoir acheté « dans un contexte de fortes tensions des approvisionnements de matières premières à usage pharmaceutique », des barils de de phosphate de chloroquine dans le cas où la chloroquine se révélait validée par les autorités de santé comme étant utile pour lutter contre le Covid-19. »

Et de préciser : « Il s’agit de sels de chloroquine, ce n’est pas de l’hydroxychloroquine telle quelle mais ils permettent de fabriquer une solution injectable d’hydroxychloroquine. » Cela expliquerait-il le fait que le projet « Choloroquine injectable » ait été retenu par l’AID?

« Le décret du 25 mars 2020 du ministre de la santé et des solidarités a autorisé l’utilisation de l’hydroxychloroquine en milieu hospitalier pour les patients atteints par le Covid-19. La pharmacie centrale des armées a donc procédé, après le 25 mars, à des achats de précaution de ce produit pharmaceutique dont on ne savait pas s’il allait donner des résultats. Il n’y a rien de plus à en dire », a cependant répondu Florence Parly, la ministre des Armées, alors qu’elle était interrogée sur cet achat lors d’une audition au Sénat, le 12 mai.

Seulement, le ministère des Solidarités et de la Santé, sur avis du Haut Conseil à la Santé Publique, a publié un nouveau décret stipulant que l’hydroxychloroquine ne devait plus « prescrite pour les patients atteints de Covid-19 ». Cette décision a notamment été prise après la publication par la revue « The Lancet » d’une étude remettant en cause les propriétés de cette molécule et insistant sur ses effets secondaires. Et, danq ces conditions, que va devenir le projet « Chloroquine injectable »? Le « visuel » de ce produit est annoncé pour début juin… On verra donc ce qu’il en sera effectivement.

Cependant, et au-delà du débat sur l’efficacité de la molécule [qui sera définitivement tranché quand auront été publiées des études randomisées], les travaux publiés par The Lancet font l’objet de vives critiques de la part de la communauté scientifique. Une centaine de chercheurs ont co-signé une lettre ouverte dans laquelle ils font part de leurs « liées à la méthodologie et à l’intégrité des données » utilisées par leurs deux auteurs.

Cela étant, l’entreprise de biotechnologie MedinCell, implantée près de Montpellier, a peut être trouvé un traitement préventif contre la Covid-19, avec l’ivermectine, une molécule connue de longue date, prescrite contre les maladies parasitaires [comme le paludisme]. Une australienne a montré qu’elle était efficace, in vitro, contre le SARS Cov-2. « Un projet de recherche pour une formulation injectable à action prolongée d’Ivermectine » est en cours, a précisé la société, dont on ignore si elle a réponde à l’appel de l’AID.

Photo : Ministère des Armées

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