Nouvel incident entre un destroyer américain et la marine chinoise, près du récif philippin de Scarborough

Jusqu’en 2012, le récif de Scarborough, situé en mer de Chine méridionale, appartenait encore aux Philippines. Puis de nombreux bateaux de pêche, protégés par des navires des gardes-côtes chinois croisèrent régulièrement dans ses environs. Et il passa sous le contrôle de Pékin, qui y a depuis entamé des travaux en vue de sa poldérisation à des fins militaires.

Pourtant, Manille avait saisi la Cour permamente d’arbitrage [CPA] de La Haye pour trancher ce litige. Et cette dernière donna raison aux autorités philippines, estimant, dans un avis rendu en juillet 2016, que les prétentions chinoises en mer de Chine méridionale ne reposait sur « aucun fondement juridique. »

Seulement, la décision de la CPA n’eut aucun effet sur l’attitude de Pékin, pour qui la quasi-totalité de mer de Chine méridionale lui appartient. Cette région est en effet stratégique a plus d’un titre : elle est un carrefour des principales routes commerciales maritimes tout en recélant d’importants réserves d’hydrocarbures et de ressources halieutiques.

L’Armée populaire de libération [APL] « protégera de façon inébranlable la souveraineté, la sécurité, les intérêts et les droits maritimes du pays », fit valoir, à l’époque, le ministère chinois de la Défense.

Déjà que les Philippines n’ont pas les moyens d’exercer leur souveraineté sur ses récifs, l’arrivée au pouvoir de Rodriguo Duterte a par ailleurs été une « heureuse surprise » pour Pékin. En effet, ayant amorcé un rapprochement diplomatique [et militaire] avec la Chine, ce dernier a mis en sourdine les différends territoriaux afin de bénéficier d’un soutien économique et financier de la Chine. En septembre dernier, il était même question d’une co-gestion de la zone appelée « Reed Bank », située à 85 milles du littoral philippin.

Seulement, de tels accords sont visiblement insuffisants pour Pékin. Puisqu’après les récifs de Scaborough et de Reed Bank, celui de Pag-asa est désormais dans le collimateur des autorités chinoises. Et avec le même scénario : le mois dernier, il a été rapporté la présence de quelque 200 bateaux chinois dans les environs de cet îlot. Ce qui a obligé le président Duterte à réagir. « Je ne vous l’ordonne pas et je ne vous le demande pas non plus à genoux, je vous dis simplement de ne pas toucher à Pag-asa, car j’y ai des soldats. Si vous y touchez, ce ne sera plus la même chose. Je demanderai aux soldats de ‘préparer une mission-suicide’ », a-t-il dit, le 9 avril.

Cela étant, la marge de manoeuvre est étroite pour les Philippines, dont les capacités militaires ne lui permettent pas de dissuader les intrusions chinoises. « Maintenant, il est trop tard. Ils sont déjà là », a même lâché Delfin Lorenzana, le ministre philippin de la Défense.

D’où l’intérêt des missions de type FONOP [Freedom of navigation operation] menées très régulièrement par la marine américaine. Et cela, même si les relations entre les Philippines et les États-Unis ne sont plus au beau fixe comme par le passé. Cependant, le mois dernier, dans le cadre de l’exercice Balikatan, le navire d’assaut amphibie USS Wasp, avec une dizaine d’avions F-35B à son bord, est allé naviguer du côté de l’îlot de Pag-asa.

En réponse, le ministère chinois des Affaires étrangères a réaffirmé la souveraineté de Pékin sur l’archipel dont fait partie cet îlot et assuré avoir « constamment préconisé le règlement des différends en mer de Chine méridionale par la voie de la négociation avec les pays directement impliqués. » Ce qui n’a pas été le cas pour le récif de Scarborough… Lequel a été le théâtre d’un nouvel incident entre l’US Navy et son homologue chinoise, ce 20 mai.

Le destroyer « USS Preble a navigué à moins de 12 milles du récif de Scarborough afin de contester les revendications maritimes [chinoises] excessives et de préserver l’accès aux voies navigables conformément au droit international », a en indiqué le commandant Clay Doss, le porte-parole de la 7e Flotte de l’US Navy.

À Pékin, le ministère de la Défense a affirmé que des « unités navales et aériennes de l’armée chinoise ont donné l’ordre au destroyer américain Preble de s’éloigner » du récif de « Huangyan » [c’est à dire de Scaroborough]. Et de sortir le couplet désormais habituel : « La provocation du navire de guerre américain a mis en péril la sécurité des navires, des avions et du personnel des deux camps, porté atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la Chine, violé les normes fondamentales régissant les relations internationales et saboté la paix et la stabilité dans la région. »

« La Chine a une souveraineté indiscutable sur les îles de la mer de Chine méridionale et leurs eaux adjacentes, et nous sommes fermement opposés au comportement provocateur du navire de guerre américain », a encore ajouté le porte-parole du ministère chinois de la Défense. Sauf que tel n’est pas l’avis de la Cour permanente d’arbitrage…

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