Vers le déploiement d’une force de maintien de la paix en Ukraine?

En février 2015, alors que les accords de Minsk 2 étaient en train d’être négociés entre l’Ukraine, la Russie, la France et l’Allemagne (format dit de « Normandie ») en vue d’instaurer un cessez-le-feu dans le Donbass, le président ukrainien, Petro Porochenko avait affirmé que le déploiement, dans la zone de conflit, d’une « mission policière de l’Union européenne » sous mandat des Nations unies était « la meilleure option (…) pour garantir la sécurité ». Seulement, une telle idée n’avait alors pas les faveurs de Moscou.

Plus de deux ans plus tard, le président russe, Vladimir Poutine, a apparemment changé d’avis sur cette question. « Je trouve tout à fait appropriée la présence de forces de maintien de la paix, ou plutôt de personnes assurant la sécurité de la mission de l’OSCE [Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe , ndlr], et je n’y vois rien de mauvais », a-t-il en effet déclaré, le 5 septembre, lors d’une conférence de presse à Xiamen [Chine], à l’issue du sommet des Brics. « Au contraire, je pense que cela serait bénéfique au règlement du problème dans le sud-est de l’Ukraine », a-t-il ajouté.

Mieux encore, le chef du Kremlin a dit avoir demandé au ministère russe des Affaires étrangères de préparer une résolution allant dans ce sens pour le Conseil de sécurité des Nations unies. Toutefois, a-t-il précisé, cette « force de maintien de la paix » aurait la seule mission « d’assurer la sécurité » des observateurs de la mission de l’OSCE présents dans le Donbass et ne serait déployée que « sur la ligne de contact » entre les séparatistes pro-russes et les forces gouvernementales ukrainiennes.

La mission spéciale d’observation (SMM, Special Monitoring Mission) de l’OSCE compte environ 600 personnels venus de 40 pays. Depuis 2014, elle a souvent été la cible d’intimidations, voire de tirs. En avril dernier, un observateur américain a été tué, près du village de Prychyb, dans la région séparatiste de Luhansk. Qui plus est, les liaisons des drones qu’elle met en oeuvre dans la région sont régulièrement brouillées.

En septembre 2014, lors du sommet de l’Otan organisé à Newport (Pays-de-Galles), il fut rapporté que la France et l’Allemagne, à la demande de l’OSCE, envisageaient un soutien en faveur de la SMM afin de l’aider à « surveiller le cessez-le-feu » dans le Donbass. Une mission d’évaluation fut conduite dans la foulée. Puis, ce projet tomba dans les oubliettes.

La France n’a pas commenté la proposition de M. Poutine (du moins pas encore et le site Internet du Quai d’Orsay n’en fait nullement mention). En revanche, l’Allemagne a estimé qu’elle constituait un « pas en avant », tout en faisant preuve de prudence. « Le diable est dans les détails », a lancé Ulrike Demmer, la porte-parole du gouvernement allemand.

« Nous sommes désormais prêts à discuter (…) mais nous ne pourrons parler d’une levée des sanctions [contre la Russie] que lorsque de nombreux autres pas auront été faits », a continué Mme Demmer. À commencer par « l’application complète du paquet de mesures de Minsk », a-t-elle précisé.

Pour Berlin, cette éventuelle force de maintien de la paix devrait être déployée dans l’ensemble du Donbass – et pas seulement le long de la ligne de contact. En outre, les séparatistes des républiques autoproclamées de Lougansk et de Donetsk ne devraient pas avoir leur mot à dire. « Ce serait une promotion inacceptable de (leur) statut », a fait valoir la porte-parole allemande.

La position affichée par Berlin est identique à celle du président Porochenko. « Le déploiement des casques bleus de l’ONU dans tout le territoire du Donbass constituerait une percée réelle dans le processus de paix », a-t-il dit, ce 7 septembre. Et cette éventuelle mission, a-t-il poursuivi, devra « être déployée sur tout le territoire occupé, y compris la partie non-contrôlée (par Kiev) de la frontière russo-ukrainienne » par laquelle « des armes et des combattants venant de Russie continuent d’entrer sur le territoire ukrainien. »

« Travailler à cette initiative n’est pas une raison pour lever les sanctions internationales existantes contre Moscou. Elles doivent rester en vigueur jusqu’à la restauration complète de la souveraineté et l’intégrité territoriale » de l’Ukraine, a encore plaidé M. Porochenko.

La propositio de M. Poutine au sujet de cette force de maintien de la paix survient alors que les États-Unis (via le Pentagone et le département d’État) envisagent de livrer des armes « létales » à l’Ukraine, dont des missiles antichars, afin de « modifier le rapport de force sur le terrain [le Donbass, ndlr]. »

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