Le blocage du canal de Suez par un porte-conteneurs va compliquer les opérations navales au Moyen-Orient

À quelques jours près, le groupe aéronaval constitué autour du porte-avions « Charles de Gaulle » n’aurait pas pu transiter par le Canal de Suez pour se rendre au Moyen-Orient comme il était prévu. De même que le porte-hélicoptères amphibie Tonnerre et la frégate légère furtive [FLF] Surcouf, engagés dans la mission Jeanne d’Arc 2021.

En effet, le 23 mars, le porte-conteneurs Ever Given, un mastodonte de 400 mètres de long, jaugeant 220.000 tonnes et battant pavillon panaméen, s’y est échoué à environ cinq nautiques de Suez, après avoir suivi une trajectoire assez curieuse, à en juger par les sites de suivi du trafic maritime.

Exploité par Evergreen Marine Corp, basé à Taïwan, ce navire qui quitté le port chinois de Yantian pour rejoindre celui de Rotterdam [Pays-Bas]. Selon l’Autorité égyptienne du canal de Suez [SCA], l’incident serait dû « principalement au manque de visibilité, en raison des conditions météorologiques, avec des vents ayant atteint 40 noeuds, ce qui a affecté le contrôle du navire. » Ce qui peut sembler étonnant au regard de son tonnage.

Dans un premier temps, il fut estimé que les opérations pour dégager l’Ever Given ne prendraient, au pire, que quelques jours. Seulement, elles seront beaucoup plus compliquées que prévu. D’après le groupe néerlandais d’aménagement portuaire Royal Boskalis Westminster, appelé à la rescousse par les autorités égyptiennes, elles pourraient prendre « des semaines ».

« Nous ne pouvons pas exclure que cela pourrait prendre des semaines, selon la situation », a en effet confié Peter Berdowski, le Pdg de la société néerlandaise, à l’agence Reuters. « Il n’y a actuellement aucune indication sur le moment où le canal sera dégagé et quand les transits pourront reprendre », a indiqué la SCA, le 24 mars au soir.

Le Canal de Suez étant incontournable pour le commerce entre l’Europe et l’Asie, les conséquences de son blocage par l’Ever Given risquent rapidement de se faire sentir, d’autant plus qu’il représente entre 10 % et 12 % du volume du commerce maritime mondial, lequel est déjà en sous-capacité pour répondre à la demande, les prix ayant été multipliés par six en quelques mois. Déjà, les cours du pétrole ont augmenté de 5% durant la seule journée du 24 mars. Et si la situation venait à s’éterniser, on peut craindre des tensions sur les chaînes d’approvisionnement en Europe, en particulier dans l’industrie.

Selon l’agence Bloomberg, les 50 navires commerciaux qui empruntent chaque jour le canal représentent une valeur totale de près de 10 milliards de dollars…

Mais les opérations navales vont également être affectées par ce blocage. Ainsi, pour le moment, le groupe aéronaval américain formé autour du porte-avions USS Dwight D. Eisenhower ne serait pas en mesure de se rendre au Moyen-Orient, comme il lui en est prêté l’intention [l’US Navy ne communique plus à l’avance le profil des missions de ses navires, ndlr]. Actuellement, il navigue en Méditerranée.

S’il sera plus compliqué de se rendre dans l’océan Indien via le Canal de Suez pendant « quelques semaines » [à moins de passer par le cap de Bonne Espérance], cela le sera évidemment tout autant pour le effectuer le trajet inverse. D’autant que la Marine nationale dispose de plusieurs navires dans l’océan Indien.

Dont le PHA Tonnerre et la frégate Surcouf, qui, avec l’appui de la frégate de surveillance Nivôse, viennent d’y intercepter plus de huit tonnes de cannabis, environ 300 kg d’héroïne et plus de 450 kg de méthamphétamines… La frégate Guépratte patrouille dans le golfe d’Oman, à proximité du détroit d’Ormuz, dans le cadre de la mission européenne Agenor et le Chasseur de mines tripartite [CMT] Aigle est déployé dans la même région, de même que, évidemment, le porte-avions Charles de Gaulle et son escorte.

Cela étant, le retour de ces navires en France n’est pas attendu d’ici l’été. Du moins est-ce le cas pour le groupe aéronaval et la mission Jeanne d’Arc 2021.

Photo : Le porte-avions « Charles de Gaulle », en transit dans le Canal de Suez en 2015 © Marine nationale

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]