L’Allemagne confirme son intention d’acquérir des F/A-18 Super Hornet auprès de Boeing

Sans surprise, au regard des échos de ces derniers mois, le ministère allemand de la Défense a confirmé, le 20 avril, son intention d’acquérir une flotte mixte d’avions de combat composée d’Eurofighter EF-2000 et de F/A-18 Super Hornet afin de remplacer les PANAVIA Tornado de la Luftwaffe [force aérienne].

Cette décision est logique. En effet, l’Allemagne faisant partie des plans nucléaires de l’Otan et, à ce titre, abritant sur son sol |à Buchel, ndlr] des bombes nucléaires tactiques B-61 mises à la disposition de l’Alliance par les États-Unis, il lui fallait des avions capables de les mettre en oeuvre, comme c’est actuellement le cas de certains Tornado.

Or, ces derniers étant à bout de souffle, Berlin n’avait pas le choix. En effet, pour que l’Eurofighter EF-2000 puisse emporter une B-61, une certification de la part des autorités américaines est nécessaire. Et, évidemment, Washington ayant la main dans cette affaire, le F-35 et le F/A-18 Super Hornet sont prioritaires par rapport à l’avion de combat européen.

Pendant un temps, l’option du F-35 fut envisagée à Berlin. Et l’état-major de la Luftwaffe y était très favorable… Mais pas l’industrie aéronautique allemande qui, emmenée par Airbus Defence & Space et son Pdg, Dirk Hoke, prit son bâton de pélerin pour convaincre les autorités allemandes de renoncer à l’appareil développé par Lockheed-Martin.

Ainsi, fit valoir M. Hoke, un choix en faveur du F-35 porterait un coup fatal à l’industrie européenne et empêcherait « toute coopération avec la France sur les questions d’avions de combat. » Coopération qui, depuis, a pris forme avec le programme SCAF [Système de combat aérien du futur], confié notamment à Dassault Aviation, Airbus Defence & Space, Safran et MTU.

La décision d’écarter l’avion de Lockheed-Martin fut donc prise. Ce qui fut néanmoins critiqué outre-Rhin. « Nous avons été victimes de chantage de la part des Français. […] Nos partenaires de l’Otan qui abritent des bombes nucléaires américaines sur leur territoire, comme l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas, ont choisi cet avion [le F-35]. […] Ils ont un bus moderne tandis que nous, nous avons une diligence », s’était emporté un député du parti chrétien-démocrate [CDU] auprès de la radio publique Deutsche Welle.

Quoi qu’il en soit, la solution retenue par Berlin passe donc par l’achat d’Eurofighter EF-2000 supplémentaires, de F/A-18 Super Hornet… et de E/A-18 Growler, la Luftwaffe ayant aussi à mener des missions de guerre électronique [en particulier de suppression des défense aériennes adverses – SEAD].

« Nous recommandons une solution mixte, qui fasse tourner l’industrie européenne de défense à plein régime mais aussi, et cela concerne un peu moins d’un tiers de la commande, qui fasse appel à un fournisseur non européen », en l’occurrence américain, a ainsi indiqué Arne Collatz-Johannsen, le porte-parole du ministère allemand de la Défense.

Une recommandation allant dans ce sens doit être faite le 22 avril au Bundestag [chambre basse du Parlement] par Annegrer Kramp-Karrenbauer, la ministre allemande de la Défense. Selon les plans de Berlin, il s’agirait de commander 90 Eurofighter [dont 38 sont déjà prévus dans le cadre du projet Quadriga, ndlr] et 45 F/A-18 / EA-18 Growler.

Une telle décision permet  de ménager la chèvre et le chou : l’Allemagne réaffirme ainsi son engagement en faveur de la défense européenne tout en respectant ses obligations à l’égard de l’Otan. Et, au passage, elle pourrait lui permettre de s’attirer les bonnes grâces du président américain, Donald Trump, qui n’a pas ménagé ses critiques sur la faiblesse de son budget militaire.

Si le choix du F/A-18 Super Hornet est confirmé, alors la Luftwaffe renouerait avec les avions de combat américains… Le dernier modèle qu’elle a mis en oeuvre était le F-4 Phantom, retiré du service en 2013.

Mais, outre-Rhin, ce sont les parlementaires qui ont le dernier mot. Et l’annonce faite par le ministère allemand de la Défense fait quelques vagues, notamment auprès des élus du parti social-démocrate [SPD]. S’ils n’ont jamais remis en cause la participation de l’Allemagne aux plans nucléaires de l’Otan quand l’un des leurs occupait la Chancellerie, il en va autrement aujoud’hui dans la mesure où, pour retrouver leur électorat, ils tiennent un discours beaucoup plus « pacifiste » que par le passé.

L’issue de ce dossier est suspendue aux résultat des prochaines élections fédérales, prévues en septembre 2021. De même que l’avenir du SCAF, lequel est toujours à la merci des députés allemands, dès lors qu’il s’agira de lui accorder de nouveaux financements.

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