Guyane/Harpie : En 2017, 72 militaires ont fait l’objet d’une évacuation sanitaire

Quand l’opération Harpie a été lancée en Guyane, en février 2008, l’on comptait 535 sites illégaux d’orpaillage. L’objectif était alors de perturber au maximum l’activité des « garimpeiros » (chercheurs d’or venus clandestinement du Brésil et du Surinam), laquelle porte atteinte à l’environnement en raison de la pollution générée par le mercure, utilisé pour amalgamer l’or, et génère de la violence eu égard à ses enjeux financiers.

Dix ans plus tard, le nombre de chantiers illégaux s’élève à 609, alors que, en janvier 2017, l’on n’en comptait plus que 233, grâce à l’action des Forces armées en Guyane et aux gendarmes (dont ceux de l’antenne locale du GIGN).

Cette hausse de l’orpaillage clandestin l’an passé s’explique par le fait que les militaires (tant des FAG que de la Gendarmerie) ont eu à mener d’autres missions. Ainsi, le renforcement de la lutte contre la délinquance et le mouvement social qui a agité la Guyane en 2017 ont détourné les gendarmes de l’opération Harpie. Même chosie pour les FAG, qui ont été sollicitées pour intervenir aux Antilles, après le passage de l’ouragan Irma.

Or, le moindre relâchement profite aux garimpeiros, lesquels, souligne le ministère des Armées, « tirent partie de toute opportunité pour se réinstaller. » Cela étant, par rapport en 2008, les sites d’orpaillage illégaux sont moins imposants, étant donné qu’ils n’abritent plus qu’à peine cent d’individus, contre parfois un millier il y a 10 ans.

Pour autant, l’opération Harpie est utile dans la mesure où, si elle n’existait pas, la situation serait encore beaucoup plus grave qu’elle ne l’est. En clair, elle permet de contenir le phénomène, sans pour autant l’éradiquer.

Ainsi, selon le ministère des Armées, les FAG et les gendarmes ont mené plus de 15.000 patrouilles dans la jungle, ce qui a abouti à la destruction de 5.225 motopompes (soit de quoi réaliser 2.600 chantiers alluvionnaires). « C’est autant de matériels que les garimpeiros n’ont pas pu utiliser pour conduire leur activité illégal », a-t-il souligné. En outre, 857 kg de mercure ont été saisis.

L’an passé, et malgré l’activité opérationnelle par ailleurs, les militaires du 3e Régiment Étranger d’Infanterie (REI) et du 9e Régiment d’Infanterie de Marine (RIMa), accompagnés par les gendarmes, ont mené 2.379 patrouilles (ce qui correspond à un engagement journalier de 310 hommes), au cours desquelles 645 sites illégaux, 180 puits et 25 galeries ont été détruits. Et les Garimpeiros ont eu un manque à gagner de plus de 14 millions d’euros (contre 18 millions en 2016).

Mais ces patrouilles, conduites dans un environnement hostiles, ont un revers. L’an passé, toujours, 72 militaires ont dû être évacués pour des motifs sanitaires (blessures, morsures, paludisme, fièvres, etc…). Ce qui est un nombre élevé.

En 2016, le Service de santé des armées (SSA) avait en effet indiqué au Haut comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) que, « sur la période 2013-2015, 105 évacuations sanitaires ont eu lieu entre les forêts ou fleuves et le littoral guyanais » et que « les traumatismes de toutes causes (plaies, chutes, fractures) étaient les plus fréquents. »

« Les élongations sont très importantes et il est difficile d’assurer une permanence des militaires en forêt. La forêt équatoriale, qui recouvre plus de 90 % du territoire, est un milieu hostile mettant à rude épreuve les organismes et les matériels. L’humidité de 90 à 95% en saison des pluies, associée à une température de 30°C en moyenne, rend les déplacements partculièrement ardus, une progression compliquée par le poids des équipements transportés, 30 kg en moyenne par soldat pour lui permettre d’agir et de durer » explique le ministère des Armées.

Quoi qu’il en soit, malgré le dévouement des FAG et de la gendarmerie et les risques pris face à des trafiquants qui n’hésitent pas à faire le coup de feu, l’opération Harpie ne permettra pas, à elle seule, d’éradiquer le fléau de l’orpaillage illégal en Guyane. Pour contrôler une surface de 400 km2, il faudrait théoriquement un régiments d’infanterie, soit 200 pour la Guyane… En outre, le gain que peuvent espèrer les garimpeiros explique leur opiniâtreté : la production de 3 ou 4 kg d’or équivaut à 100.000 euros de gains.

Pour rappel, depuis 2008, cinq militaires français ont perdu la vie lors de l’opération Harpie : le soldat de 1re classe Julien Giffard, l’adjudant Stéphane Moralia, le caporal-chef Sébastien Pissot, le caporal Émile Avaé et sergent Alexandre Chan Ashing.

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