Une attaque nord-coréenne contre les bases américaines de l’île de Guam pourrait-elle concerner l’Otan?
Le mois dernier, Pyongyang a averti qu’elle était en mesure de viser, avec ses missiles balistiques, l’île de Guam, un territoire non incorporé des États-Unis, où sont affectés 6.000 militaires américains. Et, devant la perspective du renforcement des sanctions prises à son égard par le Conseil de sécurité des Nations unies, la Corée du Nord, qui vient de réaliser son 6e essai nucléaire, a donné dans la surenchère ces derniers jours.
Si Washington « met en place cette résolution illégale sur un durcissement des sanctions, la Corée du Nord fera en sorte d’être absolument sûre que les États-Unis en paieront le prix », a en effet averti le ministère nord-coréen des Affaires étrangères. « Le monde sera témoin de la façon dont la Corée du Nord dompte les gangsters américains en lançant une série d’actions qui seront plus dures qu’ils ne l’ont jamais imaginé », a-t-il ajouté.
Plus tôt, un responsable de la diplomatie nord-coréenne, Ri Tok-Son, avait fustigé les autorités françaises pour la position qu’elles venaient d’affirmer au sujet des capacités militaires de Pyongyang. « Ils se sont occupés (…) à formuler des remarques absurdes comme ‘le missile de la Corée du Nord peut frapper l’Europe' », a-t-il dit. « Il est ridicule de dire que les armes nucléaires de la DPRK, la force dissuasive contre le chantage et la menace nucléaire américaine, puissent viser l’Europe », a-t-il ajouté.
Pourtant, la situation dans la péninsule coréenne intéresse la France en sa qualité de membre de la Commission militaire d’armistice (UNCMAC), chargée de surveiller le respect de l’accord d’armistice militaire coréen signé en juillet 1953 entre le Nord et le Sud. Mais au-delà de cet aspect, l’Otan pourrait être aussi concernée, à cause de l’article 5 du Traité de Washington.
« Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord », stipule cet article.
En clair, il « prévoit que si un Allié est victime d’une attaque armée, chacun des autres membres de l’Alliance considérera cet acte de violence comme une attaque armée contre l’ensemble des membres et prendra les mesures qu’il juge nécessaires pour apporter une assistance à l’Allié attaqué. »
À la question de savoir si une attaque nord-coréenne contre l’île de Guam pourrait déclencher cet article 5, le secrétaire général de l’Otan, Jens Stoltenberg, a botté en touche, en disant refuser de « spéculer » sur de telles considérations. « Ce que je dirais, c’est que nous nous concentrons maintenant entièrement sur la manière dont nous pouvons contribuer à une solution pacifique au conflit », a-t-il affirmé, lors d’un entretien donné à la BBC.
« L’attitude inconsidérée de la Corée du Nord est une menace mondiale qui requiert une réponse mondiale, ce qui inclut bien entendu l’Otan », a toutefois déclaré M. Stoltenberg.
« Nous demandons à la Corée du Nord d’abandonner ses programmes nucléaires, ses programmes de missiles et de s’abstenir de procéder à d’autres essais, car il s’agit d’une violation flagrante de plusieurs résolutions de l’ONU sur la sécurité et d’une menace pour la paix et la stabilité », a encore affirmé le secrétaire général de l’Otan.
Photo : Système antimissile américain THAAD